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Jul. Considère donc quelles sont les conclusions de toute cette discussion. Si, malgré la différence qui les sépare, on devait établir une certaine parité entre les effets de la grâce de Jésus-Christ et les effets de là fauté d'Adam; ou, pour parler plus clairement, s'il y avait du moins égalité numérique entre les opérations de l'une et les opérations de l'autre, bien que celles-ci soient, par leur nature même, opposées à celles-là; il faudrait enseigner que `là grâce a sauvé autant d'hommes que la faute première en avait perdus, et que sous ce rapport il n'y a absolument aucune différence entre la première et la seconde. Dans cette hypothèse aussi, le remède aurait dû être appliqué exactement aux endroits mêmes que le mal aurait atteints; en d'autres termes, si le péché antique avait exercé une influence quelconque sur les mouvements de la chair, sur les organes de la génération et sur la honte qui y est attachée; enfin sur l'état malheureux où naissent les enfants, le remède apporté par la grâce aurait détruit précisément ces effets du péché d'Adam : autrement l'impuissance et l'inutilité de cette grâce seraient démontrées clairement par le fait même qu'elle n'aurait pu découvrir I'endroit de la maladie et que, au lieu de rétablir la nature dans la force et l'intégrité de son état primitif, elle n'aurait fait qu'appliquer à la volonté des remèdes sans valeur.
Aug. Il a déjà été répondu à cela quand nous avons parlé de la différence qui existe entre le siècle présent et le siècle futur[^1]. Aujourd'hui, en effet, nous recevons par un don de l'Esprit la force de combattre et de remporter la victoire; dans le siècle futur, au contraire, n'ayant plus d'ennemi ni extérieur, ni intérieur, nous jouirons d'une paix ineffable et éternelle. C'est pourquoi, quiconque prétend posséder ici-bas tous les biens dont la possession est réservée au siècle futur, montre par là même qu'il ne possède point le don de la foi.
- Ci-dessus, ch. XCIII, XCIV, CVI.