2.
Ce saint solitaire offrait à Dieu, nuit et jour, ses prières, ses veilles et ses jeûnes, pour obtenir la chasteté du coeur et de l'âme, et lorsqu'il vit qu'il était exaucé, et qu'il ne ressentait plus dans son coeur les ardeurs de la concupiscence, la joie que lui causa cette pureté augmenta tellement son amour pour cette vertu, qu'il redoubla ses jeûnes et ses prières, dans l'espoir que Dieu lui accorderait, pour l'homme extérieur, la grâce qu'il avait reçue pour l'homme intérieur, en faisant mourir en lui jusqu'aux mouvements simples et naturels que les enfants mêmes ressentent. Il n'espérait rien de ses efforts, mais tout de la bonté divine, et il l'implorait avec ardeur, pensant que Dieu détruit facilement les mouvements de la chair, jusque dans leur racine, puisque les hommes pouvaient eux-mêmes les faire cesser par des moyens matériels, tandis qu'ils n'étaient jamais parvenus ainsi à cette pureté de l'âme qu'il avait déjà obtenue.
Comme il sollicitait sans cesse cette grâce, par ses prières et ses larmes, un ange lui apparut pendant la nuit, lui ouvrit les entrailles, en arracha un morceau de chair enflammé, et lui dit, en refermant la plaie :
« Voici que je vous ai délivré de l'impureté de la chair; sachez que, dès aujourd'hui, vous jouirez de cette pureté du corps que vous avez demandée avec tant de persévérance. » J'ai voulu raconter en peu de mots cette grâce particulière qu'il avait reçue de Dieu; mais je ne parlerai pas des vertus qui lui étaient communes avec les autres solitaires, pour ne pas faire croire qu'il les avait seul , comme la faveur que je viens de rapporter. Le grand désir que nous avions de nous entretenir avec ce saint homme, nous décida à aller le trouver pendant le carême. Il nous reçut avec sa paix ordinaire, et nous interrogea sur nos dispositions intérieures, sur la nature de nos pensées, et il nous demanda ce qu'un si long séjour dans le désert avait fait pour la pureté de notre âme. Nous lui répondîmes en gémissant :