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Traité du Sacerdoce
1.
Que l’on peut se servir de la ruse pour le bien, ou plutôt qu’ainsi employée elle mérite moins ce nom que celui de conduite ingénieuse, on pourrait assurément le montrer plus longuement; mais comme ce qui a été dit le montre d’une manière suffisante, il deviendrait fatigant, ennuyeux d’ajouter au discours des développements superflus. Ce serait maintenant à toi de prouver que ce n’a pas été pour ton avantage que j’ai suivi cette conduite à ton égard.
Basile répondit: Et quel avantage ai-je donc retiré de cette ingénieuse adresse, de cette prudence, comme il te plaira de l’appeler; dis-le moi, afin que je demeure persuadé que tu ne m’as pas trompé.
CHRYSOSTOME. — Et quel plus grand avantage, lui dis-je, que d’exercer un ministère que Notre-Seigneur Jésus-Christ a déclaré être une preuve de notre amour pour lui? Car s’adressant au prince des apôtres : Pierre, lui dit-il, m’aimes-tu? Et Pierre ayant répondu: Oui, Seigneur, il ajouta: Si tu m’aimes, pais mes brebis. (Jean, XXI, 15).
Lorsque le Maître demande au disciple s’il l’aime, ce n’est pas pour le savoir, lui qui connaît le fond des coeurs; c’est afin de nous apprendre combien il s’intéresse à la conduite de son troupeau. Cela est évident et entraîne une conséquence qui ne l’est pas moins, savoir: qu’une grande et ineffable récompense attend celui qui exerce une fonction que Jésus-Christ tient en si haute estime. Par le zèle que notre domestique apporte à soigner le bétail qui lui est confié, nous jugeons de l’attachement qu’il a pour nous, quoiqu’il ne s’agisse que d’animaux qui s’achètent à prix d’argent; quelle récompense, à plus forte raison, le Sauveur des âmes ne réserve-t-il pas à celui qui gouverne le troupeau racheté par lui, non par argent ni autre chose semblable, mais par sa propre mort et par l’effusion de son sang?
L’Apôtre répond : Seigneur, vous savez que je vous aime, prenant pour témoin de son amour celui même qui en était l’objet; mais Jésus-Christ ne s’en tient pas là, il demande des preuves d’amour. C’est qu’en effet son désir était moins de faire voir combien Pierre l’aimait, puisque Pierre avait déjà donné plusieurs marques non équivoques de ses sentiments, que de nous montrer combien il aime lui-même son Eglise; il voulait donner à saint Pierre et à nous cet enseignement, afin que nous ayons nous-mêmes un grand zèle pour ses intérêts. Pourquoi Dieu n’a-t-il pas épargné son Fils unique? Pourquoi l’a-t-il livré, ce cher et unique objet de sa tendresse? Pour se réconcilier les hommes devenus ses ennemis, et pour se faire (573) un peuple particulier. Et ce Fils lui-même, pourquoi a-t-il versé jusqu’à la dernière goutte de son sang? si ce n’est pour racheter les brebis qu’il a remises aux mains de Pierre et de ses successeurs. Jésus-Christ disait encore : Quel est le serviteur fidèle et prudent que son maître a établi pour gouverner sa maison? (Matth. XXIV, 45.) Voilà encore des paroles qui ont l’apparence du doute; mais celui qui les prononçait ne doutait pas davantage en les prononçant, que lorsqu’il demandait à Pierre s’il l’aimait, moins pour s’assurer de son amour que pour montrer la grandeur du sien. De même ici quand il demande : Quel est le serviteur fidèle et prudent? Jésus-Christ le connaît assez: seulement il veut nous montrer la rareté de tels serviteurs et la grandeur de leur ministère. Qu’on en juge par la grandeur de la récompense qu’il leur destine : Je vous dis en vérité qu’il l’établira sur tous ses biens. (Matth. XXIV, 47.)
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Treatise concerning the christian priesthood
1.
That it is possible then to make use of deceit for a good purpose, or rather that in such a case it ought not to be called deceit, but a kind of good management worthy of all admiration, might be proved at greater length; but since what has already been said suffices for demonstration, it would be irksome and tedious to lengthen out my discourse upon the subject. And now it will remain for you to prove whether I have not employed this art to your advantage.
Basil: And what kind of advantage have I derived from this piece of good management, or wise policy, or whatever you may please to call it, so as to persuade me that I have not been deceived by you?
Chrysostom: What advantage, pray, could be greater than to be seen doing those things which Christ with his own lips declared to be proofs of love to Himself? 1 For addressing the leader of the apostles He said, "Peter, lovest thou me?" and when he confessed that he did, the Lord added, "if thou lovest me tend my sheep." The Master asked the disciple if He was loved by him, not in order to get information (how should He who penetrates the hearts of all men?), but in order to teach us how great an interest He takes in the superintendence of these sheep. This being plain, it will likewise be manifest that a great and unspeakable reward will be reserved for him whose labors are concerned with these sheep, upon which Christ places such a high value. For when we see any one bestowing care upon members of our household, or upon our flocks, we count his zeal for them as a sign of love towards ourselves: yet all these things are to be bought for money:--with how great a gift then will He requite those who tend the flock which He purchased, not with money, nor anything of that kind, but by His own death, giving his own blood as the price of the herd. Wherefore when the disciple said, "Thou knowest Lord that I love Thee," and invoked the beloved one Himself as a witness of his love, the Saviour did not stop there, but added that which was the token of love. For He did not at that time wish to show how much Peter loved Him, but how much He Himself loved His own Church, and he desired to teach Peter and all of us that we also should bestow much zeal upon the same. For why did God not spare His only-begotten Son, but delivered Him up, although the only one He had? 2 It was that He might reconcile to Himself those who were disposed towards Him as enemies, and make them His peculiar people. For what purpose did He shed His blood? It was that He might win these sheep which He entrusted to Peter and his successors. Naturally then did Christ say, "Who then is the faithful and wise servant, whom his lord shall make ruler over His household." 3 Again, the words are those of one who is in doubt, yet the speaker did not utter them in doubt, but just as He asked Peter whether he loved Him, not from any need to learn the affection of the disciple, but from a desire to show the exceeding depth of his own love: so now also when He says, "Who then is the faithful and wise servant?" he speaks not as being ignorant who is faithful and wise, but as desiring to set forth the rarity of such a character, and the greatness of this office. Observe at any rate how great the reward is--"He will appoint him," he says, "ruler over all his goods." 4