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Works John Chrysostom (344-407) In Matthaeum homiliae I-XC Commentaire sur l'Evangile selon Saint Matthieu
HOMÉLIE XXXV

1.

Jésus-Christ recommence encore à donner ici des préceptes sévères et pénibles, et il parle avec une grande autorité. Il prévient de lui-même ses apôtres qui, entendant des prédictions si terribles, lui pouvaient dire : Quoi donc! Seigneur, êtes-vous venu au monde pour nous perdre, et avec nous ceux qui ajouteront foi à nos paroles, et pour remplir la terre de divisions et de troubles? Il leur répond par avance et leur déclare: « Qu’il n’est pas venu au monde pour y apporter la paix. »

Comment donc a-t-il commandé à ses apôtres, lorsqu’ils entreraient dans une maison, d’y donner la paix? Comment les anges ont-ils dit à sa naissance: « Gloire à Dieu dans le u ciel, et paix aux hommes sur la terre (Luc, II, 26)? » et comment enfin tous les prophètes ont-ils prédit que Dieu donnerait un jour la paix aux hommes? C’est parce que c’est donner la paix que de retrancher la partie qui gâte les autres, et de séparer ce qui peut causer la division. C’est ainsi que le ciel se peut réconcilier avec la terre. Un médecin a donné au corps la santé qui en est la paix, en coupant un membre malade qu’il est impossible de guérir. Un général apaise toutes ses troupes lorsque, pour étouffer une conspiration, il divise les factieux les uns contre les autres.

C’est ce qui se fit autrefois dans cette fameuse tour. Une division salutaire rompit une union très-pernicieuse, et la confusion produisit la paix. C’est ainsi que saint Paul divisa ceux qui s’étaient unis pour le perdre. Et au sujet de Naboth, l’accord qui se fit produisit une paix plus cruelle que la plus cruelle guerre. La paix n’est pas toujours un bien, puisque les voleurs et les scélérats ont la paix entre eux. Mais cette guerre dont Jésus-Christ parle ne (287) vient pas tant de son premier dessein, que de la malice des hommes. Il souhaiterait qu’ils fussent tous liés ensemble par un même esprit de piété; mais parce qu’ils se divisent les uns contre les autres, ces divisions produisent nécessairement la guerre. Lors donc qu’il dit ces paroles « Je ne suis point venu pour apporter la paix sur la terre, » il les dit pour consoler ses apôtres, comme s’il leur disait Ne croyez pas que ce soit vous qui soyez cause de toutes ces divisions. C’est par mon ordre et par ma volonté qu’elles doivent arriver; parce que je connais quelle sera pour lors la. disposition des hommes. Ne vous troublez donc point alors, comme s’il vous arrivait quelque chose que vous n’eussiez pas prévu; c’est moi-même qui le veux; c’est moi qui vous assure que je suis venu « pour apporter la guerre au « monde. » Ainsi ne vous étonnez point que, toute la terre s’arme et se soulève contre vous. Quand, par ces combats, ce qu’il y a de corrompu dans le monde en aura été retranché, le ciel se réconciliera avec la terre.

Jésus-Christ leur parle de la sorte pour les fortifier contre les opinions peu avantageuses que plusieurs devaient avoir d’eux. Il ne leur dit pas même : « Je suis venu apporter » la guerre, mais ce qui est plus effrayant : « Je suis venu apporter l’épée sur la terre. » Et ne vous étonnez pas qu’il se serve de paroles qui semblent si dures. Il a voulu les accoutumer d’abord à ces expressions fortes, afin qu’ils ne fussent pas surpris, lorsqu’ils se trouveraient dans l’occasion. Il voulait empêcher qu’on ne pût dire qu’il eût trompé la simplicité de ses apôtres par des paroles douces et flatteuses en leur cachant le mal qu’ils devaient souffrir un jour. Il affecte même de leur parler de ces choses en des termes plus durs que ne sont ceux dont on devrait naturellement user pour exprimer ce qu’il dit, parce qu’il vaut mieux témoigner sa douceur par des effets que par des paroles.

C’est pourquoi il ne se contente pas de cette proposition générale. Il s’étend même sur les circonstances de cette nouvelle sorte de guerre qu’il apporte au monde, et il en fait une peinture qui surpasse tout ce qu’il y a d’horreur dans les plus cruelles guerres civiles.

« Car je suis venu pour séparer l’homme d’avec son père, la fille d’avec sa mère, et la belle-fille d’avec sa belle-mère (35).» On ne verra pas seulement les citoyens s’élever contre les citoyens, et les amis contre les amis; mais les plus proches et ceux qui étaient le plus étroitement liés se feront une plus cruelle guerre. La nature se déclarera contre elle-même. Le fils se séparera de son père, et la fille de sa mère. Ce ne seront plus seulement ceux de la même maison qui se feront la guerre, mais ceux qui étaient le plus unis par tous les liens du sang. Rien ne pouvait mieux marquer la toute-puissance de Jésus-Christ que de voir les apôtres entendre ces prédictions effroyables, et les croire sans s’étonner, et pouvoir même les persuader aux autres.

Mais il faut toujours se souvenir que ce n’était pas Dieu qui était l’auteur de ces sanglantes divisions, et qu’elles n’étaient que l’effet de la malice des hommes. Cependant il parle comme s’il en était l’auteur, car c’est la coutume de l’Ecriture de s’exprimer de la sorte, comme elle dit ailleurs : «Dieu leur a donné des yeux afin qu’ils rie voient point. » (lsaïe, XII, 2.) Et Jésus-Christ le fait en cette rencontre, afin, comme nous avons dit, que lorsqu’ils seraient dans l’occasion, et qu’on les attaquerait avec toutes sortes d’outrages et d’injures, ils ne se trouvassent point surpris après qu’il leur avait prédit et représenté toutes choses d’une manière si forte.

Que si quelqu’un s’étonne que des divisions si étranges aient pu arriver à l’occasion de l’Evangile, qu’il se souvienne de l’Ancien Testament. On y a vu des histoires aussi sanglantes que celle que prédit Jésus-Christ, et qui font voir une liaison admirable de l’une et de l’autre loi; et que Celui qui parle ici à ses apôtres était le même qui présidait alors à tous ces événements. Qu’il se souvienne que du temps de Moïse la colère de Dieu ne put être apaisée qu’après que les frères eurent tué leurs propres frères pour venger Dieu qui avait été outragé par le culte impie et idolâtre qu’on avait rendu au veau d’or et à Belphégor. (Exod. XXXII, 27.)

Où sont donc ceux qui disent: le Dieu de l’Ancien Testament est un Dieu méchant, mais le Dieu du Nouveau est un Dieu doux et plein de bonté? Qu’ils considèrent que Jésus-Christ, parlant de son Evangile, dit que les proches répandront le sang de leurs proches. Et nous soutenons que cela même est un effet de la douceur de Dieu, et une grande miséricorde. Aussi Jésus-Christ voulant montrer qu’il était le même qui avait agréé dans l’ancienne loi (288) ces victimes sanglantes, veut bien rapporter l’endroit d’un prophète, qui bien qu’il n’ait pas été dit pour ce sujet, ne laisse pas de l’exprimer parfaitement.

« L’homme aura pour ennemis ceux de sa propre maison. » (Mich. VII, 3.) Voyant que les Juifs étaient divisés, qu’il y avait de vrais et. de faux prophètes , et que toutes les familles étaient partagées à leur sujet, les uns voulant suivre les véritables, et les autres s’attachant aux faux, le prophète Michée avertissait le peuple de se tenir sur ses gardes «N’ayez point, » disait-il, « de confiance dans vos amis, ni d’espérance dans vos chefs. Gardez-vous même de votre propre femme, et ne lui confiez rien, parce que l’homme aura pour ennemis ceux de sa propre maison. » Le prophète tâche par ces paroles d’élever celui qui les croirait au-dessus de tout. Car ce n’est pas un mal que de mourir; mais c’est un mal que de mourir mal.

Jésus-Christ dit aussi : « Je suis venu apporter le feu sur la terre. » Il marque par là combien grand doit être l’amour qu’il nous demande. Il nous a aimés avec excès, il veut que nous l’aimions de même. C’est pourquoi il fortifiait ses disciples par ces paroles, et il voulait les mettre au-dessus de tous les maux. Il semble qu’il leur dise : Si ceux que vous allez enseigner doivent renoncer à leurs femmes, à leurs enfants et à leurs pères, jugez ce que vous devez faire, vous autres qui serez leurs maîtres. Car tous les maux que je vous prédis ne se termineront pas à vous., mais ils passeront encore à ceux que vous convertirez, et qui embrasseront mon Evangile. Je suis venu apporter aux hommes des biens ineffables je redemande aussi d’eux une grande obéissance et un grand amour.

« Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi; et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi, n’est pas digne de moi (37). » Remarquez ici, mes frères, l’autorité de Celui qui parle. Voyez comment il se déclare Fils unique de son Père, en commandant de renoncer à tout, et de préférer son amour à tout le reste. Je ne vous commande pas seulement, dit-il, de me préférer à vos amis et à vos proches. Mais je vous dis de plus, que si vous préférez votre propre vie à l’amour que vous me devez, vous êtes bien éloignés d’être du nombre de mes disciples.

Quoi donc! Ces paroles ne sont-elles pas opposées au commandement que Dieu fait dans l’ancienne loi d’honorer son père et sa mère? — Au contraire, le rapport est, sur ce point, parfait entre l’une et l’autre loi. Ainsi dans l’ancienne, Dieu commande non-seulement de haïr les idolâtres, mais même de les lapider. Et le Prophète admire dans le Deutéronome ceux de qui il dit: « Celui qui dit à son père et à sa mère : Je ne vous connais point; et à ses frères: Vous m’êtes étrangers; et à ses enfants : Je ne sais qui vous êtes, celui-là, Seigneur, garde votre parole. » (Deut. VII, 13.) Que si saint Paul recommande avec tant de soin aux enfants d’être obéissants à leurs pères, ne vous en étonnez pas. Car il ne leur commande de leur obéir qu’en ce qui ne blesse point la piété. C’est une chose qui de soi est très-juste et très-sainte de leur rendre toute sorte d’honneur et de déférence. Mais s’ils exigent de nous ce qui ne leur est point dû, il ne faut point leur obéir contre l’obéissance qui est due à Dieu. C’est pourquoi saint Luc dit : « Si quelqu’un vient à moi, et ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sa vie même, il ne peut être mon disciple.» (Luc, XIV, 27.) Dieu ne vous dit pas d’une manière absolue: Haïssez vos parents et vos proches, mais seulement lorsqu’ils voudront que vous les aimiez plus que moi ne craignez point alors de les haïr, puisque cet amour si déraisonnable que vous auriez pour eux ne servirait qu’à perdre et celui qui aime et ceux qui seraient aimés.

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