1.
Toutes les épîtres de Paul sont édifiantes; mais celles qui sont datées de sa prison offrent surtout ce caractère : de ce genre sont les épîtres aux Ephésiens, à Philémon, à Timothée et l'épître actuelle : car cette épître aussi a été écrite, quand Paul était dans les fers , comme l'attestent ces mots : « Ce mystère pour lequel je suis dans les liens, afin que je le découvre aux hommes en la manière que je dois le découvrir ». (Col. IV, 3, 4.) Mais cette épître semble postérieure à l'épître aux Romains. L'épître aux Romains a été écrite quand Paul n'avait pas encore vu Rome. Lorsque celle-ci a été écrite, au contraire, Paul avait vu Rome et touchait au terme de sa prédication. Voici la preuve évidente de ce fait dans son épître à Philémon, il dit : « Quoique je sois déjà vieux » (Philém. 9), en le priant pour Onésime. Dans cette épître-ci, c'est Onésime lui-même qu'il envoie, comme il le dit lui-même : « J'envoie aussi Onésime, mon cher et fidèle frère ». (Col. IV, 9.) Il l'appelle son cher et fidèle frère. Il prend aussi un ton plein de fermeté, en disant dans cette épître : « Demeurez inébranlables, dans l'espérance que vous donne l'Evangile que vous avez entendu et qui a été prêché à toutes les créatures qui sont sous le ciel ». Car la prédication durait déjà depuis un certain temps. C'est ce qui me fait croire aussi que cette épître a précédé l'épître à Timothée, qui a été écrite vers l'époque de sa mort, puisqu'il y est dit « Quant à moi, je suis comme une victime qui a déjà reçu l'aspersion, pour être sacrifiée ». (II Timothée, IV, 6.) Cette épître est plus ancienne que celle qui est adressée aux Philippiens. Elle semble dater des premières années de sa captivité à Rome. Pourquoi donc est-ce que je dis que ces épîtres offrent plus d'intérêt que les autres? Parce qu'elles datent de sa captivité. Il fait comme ces héros qui prennent la plume, après avoir déposé le glaive, en se reposant sur leurs trophées. Cette captivité, il le savait bien, était sa gloire. « Le fils que j'ai eu quand j'étais dans les liens », écrit-il à Philémon. (Philém.10.) Par ces paroles, il nous engage à nous réjouir au sein même de l'adversité et de la détresse, loin de nous laisser abattre.
Philémon était là parmi eux. Car, en lui écrivant, il dit : « Paul à Archippe, le compagnon de nos combats » (Philém. 2); et dans l'épître aux Colossiens, on trouve ces mots : « Dites à Archippe » (Col. IV, 17) ; cet Archippe était probablement chargé de quelque fonction ecclésiastique. Quant à Paul, il n'avait jt mais vu ni les Colossiens, ni les Romains, ni les Hébreux, quand il leur écrivait. C'est un fait auquel il fait allusion en plusieurs endroits. Ici notamment écoutez-le: « Pour tous (102) ceux qui ne me connaissent point de visage, et ne m'ont jamais vu »; et plus bas: « Si je suis absent de corps, je suis néanmoins avec vous en esprit ». (Col. II, 1, 5.) Il savait donc que sa présence était partout chose très-importante, et même quand il est absent, il veut se faire passer pour présent. Quand il punit le fornicateur, il veut qu'on se figure qu'il assiste à la sentence : « Pour moi », dit-il, « étant absent de corps, mais présent en esprit, j'ai déjà porté, comme présent, ce jugement contre celui qui a fait une telle action »; et ailleurs : « Je viendrai à vous et je sonderai non pas le langage, mais la vertu de ces hommes qui sont enflés de vanité » (I Cor. V, 3 et III, 19) ; et ailleurs : « Non-seulement quand je suis présent parmi vous, mais surtout quand je suis absent ». (Gal. III, 18.)
« Paul, apôtre de Jésus-Christ, par la volonté de Dieu ». Il est bon de dire d'abord quel est le sujet de cette épître. Quel est donc ce sujet? Nous trouvons la réponse dans l'épître elle-même. C'était par l'intermédiaire des anges que les Colossiens voulaient avoir accès auprès de Dieu. Ils avaient encore plusieurs observances ou judaïques ou païennes que saint Paul veut abolir, et c'est pour cela qu'il dit dès le commencement de sa lettre: « Par la volonté de Dieu». — « Et Timothée, son frère», dit-il. Ce Timothée était donc aussi un apôtre. Il était vraisemblablement connu des Colossiens. « Aux saints qui sont à Colosse », ville de Phrygie, voisine de Laodicée. Et « aux fidèles, frères en Jésus-Christ ». D'où vient, dit-il, je vous le demande, que vous êtes saint? D'où vous vient ce nom de fidèle? N'est-ce pas de ce que vous avez été sanctifié par la mort du Christ? N'est-ce pas de ce que vous croyez au Christ? Comment êtes-vous devenu notre frère? Car ce n'est ni par vos œuvres, ni par vos paroles, ni par une conduite pleine de droiture que vous vous êtes montré fidèle. D'où vient, je vous prie, que tant de mystères vous ont été confiés ? N'est-ce pas à cause du Christ? — « Que Dieu notre Père vous donne la grâce et la paix ! » D'où vous vient la grâce? D'où vous vient la paix? « De Dieu notre Père », dit-il. — Il n'a pas dit de Dieu, le Père du Christ. Je dirai à ceux qui poursuivent l'Esprit-Saint de leurs calomnies : D'où vient que Dieu est devenu le Père de ceux qui étaient des esclaves? Qui a pu opérer ces merveilles? Qui vous a rendu saint? Qui vous a rendu fidèle? Qui a fait de vous un enfant de Dieu? Celui qui vous a rendu digne de foi, celui-là a été cause que l'on vous a tout confié.