LXIX - VIERGE DÉCHUE ET REPENTIE
Une vierge ascète, demeurant avec deux autres, fit de l'ascétisme pendant neuf ou dix ans. Enjôlée par quelque chantre, elle succomba, et ayant conçu dans son sein, elle accoucha. Or étant parvenue à une haine extrême de celui qui l'enjôla, elle ressentit de la componction au fond de l'âme et en vint à tant de repentir qu'elle se décourageait ostensiblement et se tuait de faim. [2] Mais dans ses oraisons elle priait Dieu en disant : « Dieu grand, qui portes les maux de toute créature et qui ne veux pas la mort et la perte de ceux qui défaillent, si tu consens à ce que je sois sauvée, montre-moi en ceci tes merveilles et emmène le fruit de mon péché que j'ai engendré, afin que je ne vienne pas à me servir d'une corde de jonc ou à me lancer moi-même comme un disque. » Priant en ces termes, elle fut exaucée; car ce qu'elle avait enfanté ne mourut pas beaucoup après. [3] Alors, à partir de ce jour, elle ne se rencontra plus avec celui qui l'avait captivée, et s'étant adonnée au jeûne le plus extrême, elle se consacra pendant trente ans au service de malades et d'estropiées, ayant tellement fléchi Dieu qu'il fut révélé à un des saints prêtres ceci : « La une telle m'a plu davantage dans sa pénitence que dans sa virginité. » Et j'écris ces choses pour que nous ne méprisions pas ceux qui se repentent sincèrement.