XVIII.
Maintenant, pour répondre avec plus de simplicité, il ne convenait pas que le fils de Dieu naquît d'une semence humaine, de peur qu'étant tout entier fils de l'homme il ne fût point Fils de Dieu; qu'il n'eût rien de plus excellent que Salomon, de plus excellent que Jonas, et qu'il ne fallût le croire tel que le dit Ebion. Ainsi, pour que celui qui était Fils de Dieu par la semence du Père, c'est-à-dire par son Esprit, fût également fils de l'homme, de la chair de l'homme, il ne devait prendre que la chair, et cela sans le concours de l'homme. Par conséquent, de même que n'étant point encore né de la |422 Vierge il a pu avoir Dieu pour père, sans mère de condition humaine, de même, quand il naissait d'une Vierges, il a pu avoir une mère de condition humaine sans avoir un homme pour père. En un mot, l'homme est avec le Dieu par le mélange de la chair de l'homme avec l'Esprit de Dieu. Chair sans semence, voilà ce qu'il doit à l'homme; Esprit avec semence, voilà ce qui vient de Dieu. Si donc une disposition pleine de sagesse voulut que le Fils de Dieu naquît d'une Vierge, pourquoi n'aurait-il pas reçu d'une Vierge ce corps qu'il a fait naître d'une Vierge? Parce que, me répondent-ils, autre chose est le corps que la Vierge prit de Dieu. N'est-il pas dit: Le Verbe s'est fait chair1? Cette parole exprime ce qui a été fait chair, sans signifier toutefois que ce qui a été fait, chair soit autre chose que le Verbe. Mais de savoir si c'est de la chair ou de cette divine semence que le Verbe a été fait chair, c'est à l'Ecriture de nous le dire. Puisque l'Ecriture ne s'explique que sur ce qui a été fait, sans nous apprendre de quel principe il a été fait, elle nous indique assez qu'il a été fait, non pas de lui-même, mais par un autre. S'il n'a, pas, été fait de lui-même, mais par un autre, examine maintenant de quel principe il est plus convenable de croire que le Verbe a été fait, plutôt que de la chair dans laquelle, il a été fait. Je n'eu veux point d'autre preuve que cette déclaration si formelle et si irrévocable de Notre-Seigneur: « Ce qui est né de la chair est chair, » parce qu'il est né de la chair.
Diras-tu qu'ici il n'a voulu parler que de l'homme et non de lui-même? alors nie absolument l'humanité du Christ, et soutiens ainsi que ces paroles ne s'appliquent point à lui. Il y a plus. Il ajoute: « Ce qui est né de l'Esprit est Esprit, parce que Dieu est Esprit » et qu'il est né de Dieu. Assurément, ces mots se rapportent d'autant |423 plus à lui qu'ils se rapportent même à ceux qui croient en lui. Si donc ils s'adressent à lui, pourquoi n'eu serait-il pas ainsi des précédents? Car tu ne peux les diviser, ni attribuer ceux-ci au Christ, ceux-là aux autres hommes, toi qui ne nies pas dans le Christ la double substance de l'esprit et de la chair.
D'ailleurs, s'il y a eu une chair et un esprit, lorsqu'il s'exprime sur la qualité des deux substances qu'il porte, l'on ne peut soutenir qu'ici il ait voulu parler de son esprit, et là qu'il n'ait point voulu parler de sa chair. Ainsi, puisqu'il provient de l'Esprit de Dieu et que l'Esprit est Dieu, il est Dieu né de Dieu, et homme engendré dans la chair, par la chair de l'homme.
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Ces hérétiques voulaient que le Christ se fut incarné de lui-même, sans avoir de mère. ↩