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Les confessions de Saint Augustin
CHAPITRE XI. CE QUE DIEU LUI A ENSEIGNÉ.
11. Seigneur, vous m’avez déjà dit à l’oreille du coeur, d’une voix forte, que vous êtes éternel, « seul en possession de l’immortalité ( I Tim. VI, 16); »parce que rien ne change en vous, ni forme, ni mouvement; que votre volonté n’est point sujette à l’inconstance des temps; car une volonté variable ne saurait être une volonté immortelle. Je vois clairement cette vérité en votre présence; qu’elle m’apparaisse chaque jour plus claire, je vous en conjure! et qu’à l’ombre de vos ailes, je demeure humblement dans cette connaissance que vous m’avez révélée! Seigneur, vous m’avez encore dit à l’oreille du coeur, d’une voix forte, que vous êtes l’auteur de toutes les natures, de toutes les substances qui ne sont pas ce que vous êtes, et sont néanmoins; qu’il n’est rien qui ne soit votre ouvrage, hors le néant et ce mouvement de la volonté qui, s’éloignant de vous, abandonne l’être par excellence pour l’être inférieur: car ce mouvement est une défaillance et un péché; qu’enfin nul péché, soit au faîte, soit au dernier degré de votre création, ne saurait vous nuire ou troubler votre ordre souverain. Je vois clairement cette vérité en votre présence; qu’elle m’apparaisse chaque jour plus claire, je vous en conjure! et qu’à l’ombre de vos ailes, je demeure humblement dans cette connaissance que vous m’avez révélée!
12. Seigneur, vous m’avez dit encore à l’oreille du coeur, d’une voix forte, que cette créature même ne vous est pas coéternelle, qui n’a d’autre volonté que la vôtre, qui, s’enivrant des intarissables délices d’une possession chaste et permanente, ne trahit nulle part et jamais sa mutabilité de nature, et, liée de tout son amour à votre présente éternité, n’a point d’avenir à attendre, point de passé dont la fuite ne lui laisse qu’un souvenir, supérieure à la vicissitude, étrangère aux atteintes du temps. O créature bienheureuse! si elle existe; heureuse de cet invincible attachement à votre béatitude; heureuse d’être à jamais la demeure de votre éternité, et le miroir de votre lumière ! Et qui mérite mieux le nom de ciel du ciel que ce temple spirituel, plongé dans l’ivresse de votre joie sans que rien incline ailleurs sa défaillance; pure intelligence, unie par le lien d’une paix divine aux esprits de sainteté, habitants de votre cité sainte, cité céleste, et par delà tous les cieux.
13. De là vienne à l’âme la grâce de comprendre jusqu’où son malheureux pèlerinage l’a éloignée de vous, et si elle a déjà soif de vous; si ses larmes sont devenues son pain, quand chaque jour on lui demande : Où est ton Dieu ( Ps. XLI, 3,4,11)? Si elle ne vous adresse d’autre voeu, d’autre prière, qu’afin d’habiter votre maison tous les jours de sa vie (Ps. XXVI, 4). Et quelle est sa vie que vous-même, et quels sont vos jours que votre éternité; puisque vos années ne manquent jamais, et que vous êtes le même (Ps. CI, 28)?
Que l’âme qui le peut comprenne donc combien votre éternité plane au-dessus de tous les temps, puisque les intelligences, votre temple, qui n’ont pas voyagé aux régions étrangères, demeurent par leur fidélité à votre amour affranchies des caprices du temps. Je vois clairement cette vérité en votre présence; qu’elle m’apparaisse chaque jour plus claire, je vous en conjure! et, qu’à l’ombre de vos ailes, je demeure humblement dans cette connaissance que vous m’avez révélée!
14. Mais je ne sais quoi d’informe se trouve dans les changements qui altèrent les choses de l’ordre inférieur. Et quel autre que l’insensé, égaré dans le vide, et flottant sur les vagues chimères de son coeur, pourrait me dire que, si toute forme était arrivée par réduction successive à l’anéantissement, la seule existence de cette informité, support réel de toute transformation, suffirait à produire les vicissitudes du temps? Chose impossible: car, point de temps, sans variété de mouvements, et point de variété, sans formes.
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The Confessions of St. Augustin In Thirteen Books
Chapter XI.--What May Be Discovered to Him by God.
11. Already hast Thou told me, O Lord, with a strong voice, in my inner ear, that Thou art eternal, having alone immortality. 1 Since Thou art not changed by any shape or motion, nor is Thy will altered by times, because no will which changes is immortal. This in Thy sight is clear to me, and let it become more and more clear, I beseech Thee; and in that manifestation let me abide more soberly under Thy wings. Likewise hast Thou said to me, O Lord, with a strong voice, in my inner ear, that Thou hast made all natures and substances, which are not what Thou Thyself art, and yet they are; and that only is not from Thee which is not, and the motion of the will from Thee who art, to that which in a less degree is, because such motion is guilt and sin; 2 and that no one's sin doth either hurt Thee, or disturb the order of Thy rule, 3 either first or last. This, in Thy sight, is clear to me and let it become more and more clear, I beseech Thee; and in that manifestation let me abide more soberly under Thy wings.
12. Likewise hast Thou said to me, with a strong voice, in my inner ear, that that creature, whose will Thou alone art, is not co-eternal unto Thee, and which, with a most persevering purity 4 drawing its support from Thee, doth, in place and at no time, put forth its own mutability; 5 and Thyself being ever present with it, unto whom with its entire affection it holds itself, having no future to expect nor conveying into the past what it remembereth, is varied by no change, nor extended into any times. 6 O blessed one,--if any such there be,--in clinging unto Thy Blessedness; blest in Thee, its everlasting Inhabitant and its Enlightener! Nor do I find what the heaven of heavens, which is the Lord's, can be better called than Thine house, which contemplateth Thy delight without any defection of going forth to another; a pure mind, most peacefully one, by that stability of peace of holy spirits, 7 the citizens of Thy city "in the heavenly places," above these heavenly places which are seen. 8
13. Whence the soul, whose wandering has been made far away, may understand, if now she thirsts for Thee, if now her tears have become bread to her, while it is daily said unto her "Where is thy God?" 9 if she now seeketh of Thee one thing, and desireth that she may dwell in Thy house all the days of her life. 10 And what is her life but Thee? And what are Thy days but Thy eternity, as Thy years which fail not, because Thou art the same? Hence, therefore, can the soul, which is able, understand how far beyond all times Thou art eternal; when Thy house, which has not wandered from Thee, although it be not co-eternal with Thee, yet by continually and unfailingly clinging unto Thee, suffers no vicissitude of times. This in Thy sight is clear unto me, and may it become more and more clear unto me, I beseech Thee; and in this manifestation may I abide more soberly under Thy wings.
14. Behold, I know not what shapelessness there is in those changes of these last and lowest creatures. And who shall tell me, unless it be some one who, through the emptiness of his own heart, wanders and is staggered by his own fancies? Who, unless such a one, would tell me that (all figure being diminished and consumed), if the formlessness only remain, through which the thing was changed and was turned from one figure into another, that that can exhibit the changes of times? For surely it could not be, because without the change of motions times are not, and there is no change where there is no figure.
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1 Tim. vi. 16. ↩
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For Augustin's view of evil as a "privation of good," see p. 64, note 1, above, and with it compare vii. sec. 22, above; Con. Secundin. c. 12; and De Lib. Arb. ii. 53. Parker, in his Theism, Atheism, etc. p. 119, contends that God Himself must in some way be the author of evil, and a similar view is maintained by Schleiermacher, Christliche Glaube, sec. 80. ↩
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See ii. sec. 13, and v. sec. 2, notes 4, 9, above. ↩
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See iv. sec. 3, and note 1, above. ↩
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See sec. 19, below. ↩
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See xi. sec. 38, above, and sec. 18, below. ↩
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See xiii. sec. 50, below. ↩
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Eph. i. 20, etc. ↩
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Ps. xlii. 2, 3, 10. ↩
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Ps. xxvii. 4. ↩