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Les confessions de Saint Augustin
CHAPITRE X. EXTRAVAGANCE DES MANICHÉENS.
18. Dans mon ignorance, je me raillais de ces hommes divins, vos serviteurs et vos prophètes. Et que faisais-je en riant des saints que vous apprêter à rire de moi? J’en étais venu peu à peu à la niaiserie de croire que la figue que l’on cueille et l’arbre maternel pleurent des larmes de lait; et que si un saint selon Manès eût mangé cette figue, innocent toutefois du crime de l’avoir cueillie, c’étaient des anges mêlés à son haleine, c’étaient même des parcelles de Dieu, que, dans les soupirs de l’oraison, la digestion de ce fruit rapportait à ses lèvres; parcelles du Dieu souverain et véritable à jamais comprimées dans cette substance végétale, si elles n’eussent été dégagées par la dent et l’estomac de l’élu. Malheureux! je croyais qu’il valait mieux avoir pitié des productions de la terre que des hommes pour qui elle produit. Car si tout autre qu’un Manichéen m’eût demandé quelque chose pour apaiser sa faim, le fruit donné à cet homme m’eût paru comme dévoué au dernier supplice.
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Confessiones (CSEL)
Caput 10
Haec ego nesciens, inridebam illos sanctos servos et prophetas tuos. et quid agebam, cum inridebam eos, nisi ut inriderer abs te, sensim atque paulatim perductus ad eas nugas, ut crederem ficum plorare, cum decerpitur, et matrem eius arborem lacrimis lacteis? quam tamen ficum si comedisset aliquis sanctus, alieno sane, non suo scelere decerptam, misceret visceribus, et anhelaret de illa angelos, immo vero particulas dei, gemendo in oratione atque ructando: quae particulae summi et veri dei ligatae fuissent in illo pomo, nisi electi sancti dente ac ventre solverentur. et credidi miser magis misericordiam praestandam fructibus terrae, quam hominibus, propter quos nascerentur. si quis vero esuriens peteret, qui Manichaeus non esset, quasi capitali supplicio damnanda buccella videretur, si ei daretur.