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Les Soliloques
32.
L. R. Que penses-tu des autres êtres? — A. Que demandes-tu? — L. R. Ce que tu sais très-favorable à ma cause, car il reste à parler de l'âme et de Dieu; et si ces deux êtres sont vrais parce que la vérité existe en eux, personne ne doute de l'éternité de Dieu ; et l'âme doit être également regardée comme immortelle, si l'on prouve que la vérité qui ne peut périr existe aussi en elle. C'est pourquoi examinons cette question dernière : Le corps n'est-il pas véritablement vrai, c'est-à-dire : la vérité n'est-elle pas en lui, mais seulement quelque image de la vérité ? Car si le corps même, qui sans aucun doute est sujet à la mort, est vrai comme sont vraies les sciences, la science de l'argumentation ne sera plus cette vérité qui les rend toutes vraies, puisqu'elle ne parait pas avoir formé ce corps qui est vrai. Mais s'il n'est vrai que par imitation, et qu'en conséquence il ne soit pas entièrement vrai, rien peut-être n'empêche plus d'admettre que la science de l'argumentation soit la vérité. — A. Examinons cependant ce que c'est que le corps; et lorsque la question sera bien éclaircie, cette controverse, peut-être, ne sera point encore terminée. — L. R. Comment peux-tu savoir la volonté de Dieu? Sois donc attentif. Je pense que tout corps est composé de forme, d'une figure; s'il ne l'avait pas, il ne serait pas corps; et si elle était véritable, il serait esprit. Faut-il penser différemment? — A. J'accorde en partie ce que tu avances; je doute du reste. J'en conviens, un corps ne peut exister s'il n'a quelque figure ; mais je ne comprends pas comment il serait esprit s'il avait une figure véritable. — L. R. As-tu donc oublié le commencement du premier livre et les figures de géométrie? — A. Tu as raison de me les rappeler; je m'en souviens fort bien et avec plaisir. — L. R. Est-ce que l'on trouve dans les corps les mêmes figures que cette science considère? — A. On ne saurait croire, au contraire, combien elles sont moins parfaites. — L. R. Lesquelles donc crois-tu vraies? — A. Ne pense pas, je te prie , qu'il était nécessaire de me faire encore cette question. Qui aurait l'esprit assez aveugle pour ne pas voir que les figures géométriques sont dans la vérité même, ou que la vérité est en elles; au lieu que les figures des corps, précisément parce qu'elles paraissent se rapprocher de ces figures géométriques, présentent je ne sais quelle imitation du vrai, et sont par conséquent fausses? Je comprends maintenant tout ce que tu voulais me faire saisir.
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Two Books of Soliloquies
32.
R. What sayest thou concerning the rest? A. What? R. Because you see how much stands on my side. For we have remaining the Soul and God. And if these two are true for the reason that Truth is in them of the immortality of God no one doubts. But the mind is believed immortal, if Truth which cannot perish, is proved to be in it. Wherefore let as consider this last point, whether the body be not truly true, that is, whether there be in it, not Truth, but a certain image of Truth. For if even in the body, which we know to be perishable, we find such an element of truth, as there is in the sciences, it does not then so certainly follow, that the art of discussion is Truth, whereby all sciences are true. For true is even the body, which does not seem to have been formed by the force of argument. But if even the body is true by a certain imitation, and is on this account, not absolutely and purely true, there will then, perchance, be nothing to hinder the theory of argument from being taught to be Truth itself. A. Meanwhile let us inquire concerning the body; for not even when this shall have been settled, do I see a prospect of ending this controversy. R. Whence knowest thou what God purposes? Therefore attend: for I at least think the body to be contained in a certain form and guise, which if it had not, it would not be the body; if it had it in truth, it would be the mind. Or does the fact stand otherwise? A. I assent in part, of the rest I doubt; for, unless some figure is maintained, I grant that it is not a body. But how, if it had it in truth, it would be the mind, I do not well understand. R. Do you then remember nothing concerning the exordium of this book, and that Geometry of yours? A. Thou hast mentioned it to purpose; I do indeed remember, and am most willing to do so. R. Are such figures found in bodies, as that science demonstrates? A. Nay, it is incredible how greatly inferior they are convicted of being. R. Which of them, therefore, do you think true? A. Do not, I beg, think it necessary even to put that question to me. For who is so dull, as not to see that those figures which are taught in Geometry, dwell in Truth itself, or even Truth in these; but that those embodied figures, inasmuch as, they seem, so to speak, to tend towards these, have I know not what imitation of truth, and are therefore false? For now that whole matter which thou wert laboring to show, I understand.