Edition
Hide
Soliloquia (PL)
23.
Illud vero quod interrogasti, quis concesserit, aut cui posse fieri videatur, ut id quod in subjecto est, maneat ipso intereunte subjecto? Monstruosum enim et a veritate alienissimum est, ut id quod non esset nisi in ipso esset, etiam cum ipsum non fuerit possit esse. R. Illud igitur quod quaerebamus inventum est. A. Quid narras? R. Id quod audis. A. Jamne ergo liquido constat animum esse immortalem? R. Si ea quae concessisti vera sint, liquidissime: nisi forte animum dicis, etiamsi moriatur, animum esse. A. Nunquam equidem hoc dixerim; sed eo ipso quo interit, fieri ut animus non sit, dico. Nec me ab hac sententia revocat, quod a magnis philosophis dictum est, eam rem quae, quocumque venerit, vitam praestat, mortem in se admittere non posse. Quamvis enim lumen quocumque intrare potuerit, faciat id lucere, tenebrasque in se propter memorabilem illam vim contrariorum non possit admittere; tamen exstinguitur, locusque ille exstincto lumine tenebratur. Ita illud quod tenebris resistebat, neque ullo modo in se tenebras admisit, et sic eis intereundo locum fecit, ut poterat etiam discedendo. Itaque timeo ne mors ita contingat corpori, ut tenebrae loco, aliquando discedente animo ut lumine, aliquando autem ibidem exstincto; ut jam non de omni morte corporis securitas sit, sed aliquod genus mortis sit optandum, quo anima ex corpore incolumis educatur, perducaturque ad locum, si est ullus talis locus, ubi non possit exstingui. Aut, si ne hoc quidem potest, atque in ipso corpore anima quasi lumen accenditur, nec alibi potest durare, omnisque mors est exstinctio quaedam animae in corpore vel vitae; aliquod genus eligendum est quantum homo sinitur, quo idipsum quod vivitur, cum securitate ac tranquillitate vivatur, quanquam nescio quomodo istud possit fieri si anima moritur. O multum beatos, quibus sive ab ipsis, sive abs quolibet, non esse metuendam mortem, etiamsi anima intereat, persuasum est! At mihi misero nullae adhuc rationes, nulli libri persuadere potuerunt.
Translation
Hide
Les Soliloques
23.
Quant à ce que tu m'as demandé, s'il était possible que le sujet cessant d'exister, ce qui est dans le sujet continue à demeurer, quel est celui qui pourrait accorder ou admettre une telle proposition ? Il est tout à fait contraire à la vérité, il est même absurde que ce qui ne peut être que dans un sujet puisse exister, quand même ce sujet n'existerait pas. — L. R. Nous avons enfin trouvé ce que nous cherchions. — A. Que dis-tu? — L. R. Ce que tu entends. — A. Quoi ! est-il déjà évident que l'âme est immortelle? — L. R. Si ce que tu m'as accordé est vrai, la chose est évidente, à moins que tu ne prétendes que l'âme, même en mourant, existerait encore. — A. Je n'avouerai jamais une pareille proposition, et je dis que si l'âme meurt, elle n'existe plus; et ce qu'ont avancé quelques grands philosophes, que la substance qui donne la vie partout où elle se montre ne peut être sujette à la mort, ne m'éloigne pas de ce sentiment. Quoique la lumière éclaire tous les lieux où elle peut pénétrer et ne puisse admettre en elle les ténèbres, à raison de cette force puissante qui tient au principe des contraires, elle est sujette à s'éteindre, et le lieu qu'elle a éclairé devient obscur; ainsi cette lumière qui résistait aux ténèbres, et qui ne s'y mêlait d'aucune manière, leur a cédé l'empire en n'existant plus, comme elle le pouvait en s'éloignant. Ne puis-je donc pas craindre que la mort ne soit au corps ce que les ténèbres sont au lieu, lorsque l'âme s'en éloigne ou s'y éteint comme la lumière ? Alors, loin d'être en sûreté contre la mort du corps, il faudrait désirer une espèce de mort qui en séparât l'âme toute vivante et la conduisît dans un lieu où elle ne pût s'éteindre, si toutefois il existe un tel lieu. Ou bien, si la chose est impossible, si l'âme est comme une lumière qui s'allume dans le corps et ne peut exister ailleurs, si toute mort est l'extinction de cette âme ou de la vie dans ce corps; il faut choisir, autant que la condition humaine le permet, un genre de vie où cette existence si courte puisse passer avec sécurité et tranquillité ; j'ignore au reste comment la chose serait possible, si l'âme devait mourir. Heureux ceux qui sont persuadés, soit par eux-mêmes, soit par une autorité quelconque, que la mort n'est pas à craindre, lors même que l'âme mourrait ! Quant à moi, malheureux ! aucune raison, aucun livre n'ont pu me le persuader encore.