19.
L. R. Maintenant réponds-moi, la science de la discussion est-elle vraie ou fausse ? — A. Qui doute qu'elle soit vraie ? mais la grammaire aussi est vraie. — L. R. L'est-elle autant que la science de la discussion ? — A. Je ne vois pas ce qui peut être plus vrai que ce qui est vrai. — L. R. Sans doute ce qui n'a aucun mélange de faux, mélange qui te choquait, lorsque tu examinais comment certaines choses ne pouvaient être vraies, sans être en même temps fausses. Ignores-tu que toutes ces fictions et ces mensonges appartiennent à la grammaire? — A. Je ne l'ignore pas; mais, comme je le pense, ce n'est pas la grammaire qui les rend fausses; elle se borne à faire connaître ce qu'elles sont. En effet, la fable est un mensonge composé pour l'utilité ou pour l'agrément. La grammaire est, au contraire, l'art de gouverner et de régler la voix articulée. Par une nécessité de sa nature, elle est forcée de recueillir toutes les fictions composées dans les langues humaines, et conservées par la mémoire et par l'écriture; ce n'est pas elle qui en est l'auteur, mais elle établit d'après elles des règles véritables. — L. R. C'est très-bien; je n'examine pas maintenant si les distinctions et les définitions dont tu viens de te servir sont exactes; mais, je te demande si c'est la grammaire elle-même ou plutôt la science de l'argumentation qui prouve qu'elles le sont. — A. Je ne nie pas que le pouvoir et la facilité de définir dont je me suis servi pour ces distinctions, n'appartiennent à l'art de la discussion.