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Works Augustine of Hippo (354-430) De musica

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Traité de la musique

19.

Le M. Au moins m'accorderas-tu que, parmi les hommes, les uns sont plus vifs, les autres plus lents à sentir les nombres défectueux, et que la plupart n'en apprécient les défauts que par comparaison avec les nombres irréprochables, après avoir- expérimenté l.'harmonie des uns et la discordance des autres? — L’E. D'accord. — Le M. Et d'où vient cette différence, sinon de la nature ou de l'exercice, ou de ces deux causes réunies? — L’E. Elle ne peut venir, à mon sens, que de ces deux causes. — Le M. Est-il possible qu'un homme apprécie et sente, dans toute leur justesse, des intervalles de temps dont un autre est incapable de mesurer l'étendue? — L’E. C'est possible, je le crois. — Le M. Eh ! si celui qui est incapable de sentir aussi profondément, s'exerce et joint l'étude à d'heureuses dispositions naturelles, pourra-t-il acquérir cette faculté? — L’E. Sans aucun doute. — Le M. Mais ses progrès peuvent-ils aller jusqu'à juger de mouvements plus vastes? Peut-il devenir capable, du moins en dehors des interruptions du sommeil, de saisir, dans ses rapports simples et compliqués, la succession des heures et des jours, des mois et des années, de la comprendre, à l'aide du jugement, et de l'approuver par un signe d'assentiment comme une série d'iambes en mouvement1? — L’E. Il ne le peut. — Le M. Et pourquoi ne le pourrait-il? N'est-ce pas parce que chaque espèce d'êtres vivants a reçu , dans une exacte proportion avec l'ensemble des êtres, une capacité particulière pour apprécier les rapports d'espace et de temps? Car, si leur corps est proportionné à l'ensemble de l'univers dont ils font partie, si leur durée est proportionnée à tous les siècles dont ils sont un point, leur manière de sentir ne l'est-elle pas aux actes qu'ils accomplissent conformément au mouvement universel dont ils sont comme un élément?

C'est ainsi qu'en renfermant tout, le monde, souvent appelé dans l'Ecriture le ciel et la terre, est plein de grandeur : et il garde sa grandeur soit qu'on diminue soit qu'on augmente, dans une juste proportion, ses différentes parties. Et en effet, dans l'immensité des temps et des lieux, rien n'est grand, rien n'est petit absolument, mais d'après le degré de grandeur ou de petitesse qui sert de point de comparaison. Si donc, pour suffire aux actes de la vie charnelle, il a été donné à la nature humaine un sens dont la portée ne s'étend qu'à apprécier les intervalles de temps proportionnés à ce mode d'existence, ce sens est soumis à la même condition de mortalité que la nature humaine dégradée. L'habitude, dit avec raison le proverbe, est une seconde nature, une nature, pour ainsi parler, artificielle. Or l'expérience nous apprend que certains sens, qui, dans leur vivacité originelle, s'étaient formés par l'habitude à juger les objets matériels de toute espèce, ont été étouffés et anéantis par une autre habitude.


  1. Image charmante. Les heures sont au jour, les mois à l'année, comme les brèves aux longues dans un iambe. ↩

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De musica (PL)

19.

M. Saltem illud concedis, alios homines citius offendi claudicantibus numeris, alios tardius, et plerosque nonnisi ex comparatione integrorum judicare vitiosos, cum et illos congruos et illos incongruos audierint. D. Concedo. M. Unde tandem hanc differentiam putas existere, nisi aut natura, aut exercitatione, aut utroque? D. Sic arbitror. M. Quaero igitur utrum possit aliquis aliquando productiora intervalla judicare et approbare, quae alius non possit. D. Credo esse posse. M. Quid? ille qui non potest, si se exerceat congruenter, nec adeo tardus sit, nonne poterit? D. Poterit vero. M. Num in tantum possunt isti proficere ad productiora judicanda, ut horarum, vel dierum, vel etiam mensium annorumve dupla et simpla spatia, cum saltem somno interpediantur, sensu illo judiciario possint comprehendere, et tanquam illos iambos motionis nutibus approbare? D. Non possunt. M. Quid ita non possunt, nisi quia unicuique animanti in genere proprio, proportione universitatis, sensus locorum temporumque tributus est; ut quomodo corpus ejus proportione universi corporis tantum est, cujus pars est, et aetas ejus proportione universi saeculi tanta est, cujus pars est; ita sensus ejus actioni ejus congruat, quam proportione agit universi motus, cujus haec pars est? Sic habendo omnia magnus est hic mundus, qui saepe in Scripturis divinis coeli et terrae nomine nuncupatur, cujus omnes partes si proportione minuantur, tantus est; et si proportione augeantur, nihilominus tantus est: quia nihil in spatiis locorum et temporum per seipsum magnum est, sed ad aliquid brevius; et nihil rursus in his per seipsum breve est, sed ad aliquid majus. Quapropter si humanae naturae ad carnalis vitae actiones talis sensus tributus est, quo majora temporum spatia judicare non possit, quam intervalla postulant ad talis vitae usum pertinentia; quoniam talis hominis natura mortalis est, etiam talem sensum mortalem puto. Non enim frustra consuetudo quasi secunda, et quasi affabricata natura dicitur. Videmus autem velut quosdam sensus novos in judicandis cujuscemodi rebus corporeis consuetudine affectos, alia consuetudine deperire.

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