3.
J'ai oublié pourquoi vous m'avez renvoyé les livres sur le baptême des enfants que j'avais adressés à votre excellence ; c'était peut-être pour que je les revisse et les corrigeasse, car je les ai trouvés pleins de fautes; mais il m'a été impossible d'y mettre la main jusqu'à présent; je n'ai pas même pu achever la lettre que j'avais commencé à dicter pour vous, quand j'étais là, et qui devait être jointe à mon ouvrage ; sachez qu'elle est restée imparfaite parce que j'y ai trop peu ajouté. Si je pouvais vous rendre compte de toutes mes journées et de tant de travaux indispensables qui m'occupent, vous gémiriez et vous vous étonneriez de la multitude d'affaires dont le poids m'accable et qu'il ne m'est pas possible de renvoyer; elles ne me permettent pas d'accomplir ce que vous me demandez avec instance et ce que je regrette extrêmement de ne pouvoir faire. Lorsque les besoins de ceux qui me pressent et qu'il ne m'est permis ni de repousser ni de dédaigner me laissent quelque repos, il ne me manque pas à dicter de préférence de ces choses qui se présentent à de tels moments qu'elles ne supportent pas le moindre retard. C'est ainsi que j'ai fait une assez grande besogne, l'abrégé de notre conférence de Carthage, dont personne ne voulait se charger à cause du monceau d'écritures qu'il fallait lire; c'est ainsi que j'ai écrit la lettre aux donatistes laïques sur cette même conférence; je l'ai achevée depuis peu, ainsi que deux autres lettres assez longues, l'une à votre adresse, l’autre à l'adresse de l’illustre Volusien : vous avez dû les recevoir. Enfin j'ai maintenant en main un livre en réponse à cinq questions que m'a proposées notre cher Honoré, réponse que je ne puis faire attendre, vous le voyez bien. La charité agit comme une mère : celle-ci ne proportionne pas ses soins à son amour, mais aux besoins de chacun de ses enfants; elle veut que les faibles ne le soient plus, et, quant aux forts, elle ne les dédaigne pas : si elle les laisse un peu de temps, c'est qu'elle se sent en sûreté à leur égard. Cette nécessité de remplir des tâches qui me sont imposées ne me laisse pas le temps de faire ce qui serait le plus de mon goût, car ces travaux dévorent le peu de loisir qui me reste au milieu des affaires ou des désirs d'autrui dont je suis obsédé, et parfois je ne sais plus que faire.