4.
S'il se bornait à dire que la grâce est le libre arbitre, ou la rémission des péchés, ou bien la loi elle-même, ce ne serait pas reconnaître ce qui nous aide à vaincre les passions et les tentations , ce que nous confère l'Esprit-Saint abondamment répandu sur nous 1, par celui qui est monté au ciel, et « ayant fait de la captivité sa captive, » distribue aux hommes ses dons 2. Aussi nous prions afin de pouvoir triompher de la tentation et afin que l'Esprit de Dieu, dont nous avons reçu le gage 3, soutienne notre faiblesse 4. Mais celui qui prie et dit : « Ne nous induisez pas en tentation , » ne prie pas ainsi pour être homme, puisqu'il l'est par sa nature; ni pour avoir le libre arbitre qu'il a déjà reçu quand cette nature elle-même a été créée; il ne demande pas non plus la rémission des péchés, car il a dit précédemment : « Pardonnez-nous nos offenses 5; » il ne prie pas enfin pour recevoir la loi, mais pour qu'il puisse l'accomplir. Car s'il est induit en tentation, c'est-à-dire s'il succombe, il commet un péché , ce qui est contre la loi. Il prie donc pour ne pas pécher, c'est-à-dire pour ne rien faire de mal; c'est ce que l'apôtre saint Paul demande pour les Corinthiens lorsqu'il dit : « Mais nous prions le Seigneur pour que vous ne fassiez rien de mal 6. » D'où il résulte clairement que, pour ne pas pécher, c'est-à-dire pour ne pas mal faire, quoique, sans aucun doute, nous ayons le libre arbitre, son pouvoir ne suffit pas, et que notre faiblesse a besoin d'être aidée. La prière elle-même est donc la preuve la plus évidente de la grâce; que Pélage la reconnaisse, et nous nous réjouirons de le voir orthodoxe ou amendé.