5.
Pour garder la vie que nous aimons, nous ne la dépouillons pas comme ces hommes ont 1 dépouillé leur propre vie; nous l'employons à acquérir celle qui est éternelle ; elle en est 9 comme la servante, et afin qu'elle fasse mieux son service, nous ne l'enchaînons point dans de vains ornements , nous ne l'accablons pas du poids de nuisibles soucis; nous écoutons le Seigneur nous promettant cette autre vie que nous devons désirer avec la plus grande ardeur, et criant comme dans l'assemblée du monde entier.: « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués, et qui êtes chargés, je vous soulagerai. Prenez mon joug sur vous, et apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur; et vous trouverez le repos pour vos âmes. Car mon joug est doux et mon fardeau léger. 1» Cette leçon de pieuse humilité chasse de nos coeurs et y éteint en quelque sorte cette vaine et inquiète cupidité qui désire ce qui est au delà de notre puissance. La peine est là où l'on aime et l'on recherche beaucoup de choses à l'acquisition et à la possession desquelles la volonté ne suffit point, parce que le pouvoir lui manque. Mais une vie de justice nous arrive du moment que nous la voulons, parce que la vouloir pleinement, c'est la justice, et que la justice pour être parfaite, ne demande rien de plus qu'une parfaite volonté. Voyez s'il y a peine dès qu'il suffit de vouloir. Voilà pourquoi cette divine parole a été prononcée : « Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté 2. » Là où est la paix, là est le repos; le repus c'est la fin de tout désir et de toute peine. Mais cette volonté, pour être pleine, il faut qu'elle soit , saine ; elle le sera si elle ne refuse pas le médecin, dont la grâce seule peut guérir de la maladie des mauvais désirs. C'est donc le médecin lui-même qui crie : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués; » il dit que son joug est doux et son fardeau léger. Quand la charité sera répandue dans nos tueurs par le Saint-Esprit, nous aimerons ce qui nous est ordonné; ce joug ne sera ni dur ni pesant si nous ne portons que celui-là et si nous le portons avec une soumission d'autant plus libre qu'elle est plus humble. C'est le seul fardeau dont le poids soulage au lieu d'accabler. Si on aime les richesses, qu'on les place là où elles ne peuvent périr. Si on aime l'honneur, qu'on le mette là où personne d'indigne ne sera honoré. Si on aime la santé, il faut désirer en jouir là où l'on ne craint plus de la perdre. Si on aime la vie, qu'on la possède là où il n'y a plus de mort.