XLV-XLVI.
Je vois dans mes membres, une autre loi qui combat la loi de mon esprit, et me captive sous la loi du péché, laquelle est dans mes membres 1. » L'Apôtre appelle loi du péché, celle qui enchaîne les esclaves de quelque inclination mauvaise. Cette loi, dit-il, combat la Loi de l'esprit et réduit l'homme en captivité; preuve manifeste qu'il parle ici de l'homme qui n'est pas encore sous la grâce 2. Car, si ces inclinations mauvaises combattaient seulement contre lui, sans le réduire en captivité, elles ne seraient point criminelles. En effet, ce qu'il y a de criminel, c'est uniquement de consentir aux penchants déréglés de la chair et de les suivre Car si ces penchants demeurent, s'ils persévèrent 'réellement, mais sans obtenir notre consentement, nous ne sommes plus alors esclaves; nous sommes déjà sous la grâce, dont l'Apôtre parlera bientôt. Car après avoir imploré à grands cris le secours du Libérateur, afin que la charité, fruit de la grâce, soit toute-puissante là où était impuissante la crainte inspirée par la Loi : « Malheureux homme que je suis, s'écrie-t-il, qui me délivrera du corps de cette mort? » Et il répond aussitôt : « Ce sera la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur. » Puis il commence à peindre l’homme vivant sous la grâce : troisième état parmi les quatre que nous avons distingués plus haut 3. Ce qu'il ajoute immédiatement se rapporte déjà à cet état : « Ainsi j'obéis moi-même par l'esprit, à la Loi de Dieu, et par la chair à la loi du péché. » Celui donc qui, vivant sans la grâce, obéit par l'esprit à la Loi de Dieu, et par la chair, à la loi du péché, celui-là ne consent plus à commettre le péché, il n'est plus esclave des inclinations de la chair qui persévèrent encore en lui. Saint Paul appelle loi du péché, cette condition où nous a placés la transgression d'Adam et qui nous rend sujets à la mort. C'est en effet de cette dégradation de la chair, que naissent la sollicitations de la concupiscence charnelle; c'est d'elle aussi que saint Paul dit ailleurs : « Et nous-mêmes nous avons été par nature enfants de colère, comme tous les autres 4. »