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Works Augustine of Hippo (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME LXII.

6.

«Seigneur», dit le Prophète, «mon âme a soif de vous: mon corps lui-même sèche du désir de vous voir». C’est trop peu que mon âme soit altérée : il faut que mon corps éprouve aussi le même tourment. Mais comment, en quel sens peut-il partager les tortures de mon coeur, puisque à un corps altéré il faut de l’eau pour se rafraîchir, et que le coeur ne peut étancher sa soif qu’à la source de la sagesse? C’est à cette fontaine sacrée que nos âmes seront désaltérées, selon cette autre parole du Psalmiste : « Ils seront enivrés des biens de votre maison, et vous les rassasierez du torrent de vos délices1 ». Nous devons donc avoir soif de la sagesse etde la justice, et nous n’en serons pleinement rassasiés qu’à la fin de notre vie, au moment où Dieu nous mettra en possession des biens qu’il nous a promis. Le Seigneur nous a promis de nous élever au même rang que les anges2: ils ne souffrent pas, comme nous, de la faim et de la soif, car ils se nourrissent d’un aliment immortel : la vérité, la lumière, la justice fait leur nourriture. C’est pourquoi, rien ne manque à leur bonheur : du sein de cette inénarrable félicité, du haut de cette Jérusalem céleste qu’ils habitent, et dont nous sommes encore exilés, ils portent sur nous leurs regards, ils nous plaignent de ce que nous sommes ainsi éloignés du séjour du bonheur: par l’ordre de Dieu, ils viennent ànotre aide pour nous faire parvenir plus sûrement un jour à cette éternelle patrie qui doit nous réunir les uns aux autres, et où nous puiserons dans le Seigneur, comme en une source féconde, la vérité et l’éternité qui doivent mettre le comble à nos désirs. « Mon corps lui-même», dit le Prophète, « sèche du désir de vous voir», parce que, Dieu l’a dit, notre chair ressuscitera d’entre les morts. A notre âme donc est promise la béatitude céleste; à notre corps, la résurrection. Oui, nous ressusciterons dans notre chair: le Seigneur nous en fait la promesse formelle. Ecoutez-le donc bien; apprenez-le, et ne l’oubliez pas : voilà le sujet de notre espérance: voilà pourquoi nous sommes chrétiens. Car nous n’avons pas embrassé la foi pour acquérir un bonheur terrestre, qui devient souvent l’apanage des voleurs et des scélérats : nous sommes chrétiens, et, comme tels, nous avons le droit et le devoir de prétendre à un bonheur bien différent : nous entrerons en possession de ce bonheur quand se seront entièrement écoulés les temps réservés à l’existence de ce monde. La résurrection de la chair, voilà ce que nous attendons, voilà ce que Dieu nous promet; et elle se fera de manière qu’à la fin des siècles, le corps aujourd’hui habité par notre âme, reviendra à la vie. La grandeur de ce mystère ne doit point effrayer votre foi, car le Dieu qui nous a créé lorsque nous n’existions pas encore, trouvera-t-il une difficulté insurmontable à nous rétablir dans l’état où nous nous trouvons aujourd’hui? Vous n’avez donc aucun motif de douter de la réalité des promesses divines, par cela même que vous voyez les morts se corrompre, et tomber en cendres et en poussière. De ce qu’on brûle le corps d’un défunt, ou de ce que des chiens le dévorent, il ne suit nullement qu’il ne doive pas ressusciter : vous auriez tort de le croire, parce que ces cadavres ont beau être déchirés ou réduits en cendres, ils sont toujours relativement à Dieu dans leur entier : ils ne font, en effet, que retourner et retomber dans ces éléments du monde, du sein desquels le Seigneur les avait primitivement tirés pour en former notre corps nous ne pouvons plus les apercevoir; mais le Seigneur sait où il les reprendra pour nous les rendre, comme, avant de nous créer, il a su où les prendre pour nous les donner. Tel sera donc le caractère de cette résurrection, que notre corps d’aujourd’hui, qui est destiné à sortir plus tard vivant d’entre les morts, ne sera plus, comme maintenant, sujet à la corruption. Aujourd’hui, par une conséquence nécessaire de la fragilité de notre chair mortelle, il faut que nous mangions sous peine d’éprouver le tourment de la faim et de perdre nos forces : il faut que nous buvions, ou que nous ressentions les ardeurs de la soif, et la défaillance : il est indispensable pour nous de nous reposer, parce qu’autrement nous tomberions en langueur, et que le sommeil nous accablerait bientôt. D’autre part, si nous consacrons au sommeil trop de temps, nous nous affaiblissons: c’est pour nous une impérieuse nécessité de sortir de notre assoupissement. Quoique nous buvions et mangions uniquement pour réparer nos forces, si nos repas sont prolongés, au lieu de nous fortifier, ils nuisent à notre santé. Restons droits trop longtemps, nous nous fatiguons, il faut nous asseoir : que nous demeurions, au contraire, trop longtemps assis, la fatigue vient à la rescousse, et nous oblige à nous lever. Remarquez-le encore : notre corps ne demeure jamais dans le même état. De l’enfance nous passons avec une rapidité extrême à la jeunesse : tu crois encore rencontrer un enfant, que déjà tu ne le reconnais plus, il est déjà devenu grand : à cette première jeunesse succède aussi vite l’adolescence : la jeunesse a disparu, et tu n’en saurais plus trouver les traces : l’homme fait se forme à la suite de l’adolescence, que tu chercherais inutilement à retrouver. Enfin, l’âge mûr fait place à la vieillesse, sans laisser aucun vestige de son passage, et le vieillard meurt, et tu n’en vois plus rien. Nos différents âges n’ont donc pas de stabilité : nous ne nous arrêtons nulle part, et, partout, nous rencontrons fatigue, lassitude et corruption. L’objet de nos espérances, la glorieuse résurrection que le Seigneur nous promet, voilà ce qui nous soutient au milieu de nos innombrables défaillances; aussi éprouvons-nous une soif ardente pour ce bienheureux séjour, où nous serons revêtus d’incorruptibilité; aussi, notre corps soupire-t-il lui-même vivement après le jour où il verra Dieu. Plus il souffre au sein de cette Idumée, dans la solitude de ce désert, plus ses désirs s’enflamment; plus il se fatigue, plus il souhaite d’entrer dans la demeure de son éternel repos.


  1. Ps. XXXV, 9.  ↩

  2. Luc, XX, 36. ↩

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