CHAPITRE XXI.
DES MEURTRES QUI, PAR EXCEPTION, N’IMPLIQUENT POINT CRIME D’HOMICIDE.
Dieu lui-même a fait quelques exceptions à la défense de tuer l’homme, tantôt par un commandement général, tantôt par un ordre temporaire et personnel. En pareil cas, celui qui tue ne fait que prêter son ministère à un ordre supérieur ; il est comme un glaive entre les mains de celui qui frappe, et par conséquent il ne faut pas croire que ceux-là aient violé le précepte: « Tu ne tueras point », qui ont entrepris des guerres par l’inspiration de Dieu, ou qui, revêtus du caractère de la puissance publique et obéissant aux lois de l’Etat, c’est-à-dire à des lois très-justes et très-raisonnables, ont puni de mort les malfaiteurs. L’Ecriture est si loin d’accuser Abraham d’une cruauté coupable pour s’être déterminé, par pur esprit d’obéissance, à tuer son fils, qu’elle loue sa piété1. Et l’on a raison de se demander si l’on peut considérer Jephté comme obéissant à un ordre de Dieu, quand, voyant sa fille qui venait à sa rencontre, il la tue pour être fidèle au voeu qu’il avait fait d’immoler le premier être vivant qui s’offrirait à ses regards son retour après la victoire2. De même, comment justifie-t-on Samson de s’être enseveli avec les ennemis sous les ruines d’un édifice? en disant qu’il obéissait au commandement intérieur de l’Esprit, qui se servait de lui pour faire des miracles3. Ainsi donc, sauf les deux cas exceptionnels d’une loi générale et juste ou d’un ordre particulier de celui qui est la source de toute justice, quiconque tue un homme, soi-même ou son prochain, est coupable d’homicide.
