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Contra Faustum Manichaeum libri triginta tres
1.
Faustus dixit:_ Quare Moysen non accipitis? _Amoris pietatisque causa, qua colimus Christum. Quis enim irreligiosus adeo est, ut eum libenter aspiciat, qui suo maledixerit patri? p. 401,15 Quapropter et nos Moysen, quamquam humanorum nulli umquam divinorumque pepercerit blasphemando, plus tamen hinc exsecramur, quod Christum filium dei, qui nostrae salutis gratia pependit in ligno, diro devotionis convicio lacessivit, utrum volens an casu videris. Neutro enim horum excusatus erit, ut commendatus debeat accipi. Ait enim maledictum esse omnem, qui pendet in ligno. Hunc ergo tu vis ut accipiam, huic ut credam, cum si divinus fuit, constet eum scientem volentemque maledixisse Christo, si vero nolens nesciensque maledixerit, constet eum non fuisse divinum. p. 402,1 Tu ergo elige utrumvis aut Moysen prophetam non fuisse et imprudentia peccasse, ut dum aliis ex more suo maledicit, nesciens blasphemaverit et deum, aut fuisse quidem divinum nec futura haec ignoravisse, sed invidentem tamen nostrae saluti, quae futura erat ex ligno, in eius auctorem maledici oris sui venena prompsisse. Et quis ergo credat hunc vidisse aut cognovisse patrem, qui sic laceraverit filium; hunc adventum filii potuisse praedicere, qui ascensionis eius ignoraverit exitum? Huc accedit, quod illud etiam considero, quam late hoc sit sparsum convicium quamque multa comprehendat et violet, ut omnes etiam tangat iustos et martyres, quotquot similis passionis exitu defuncti sunt vita, ut Petrus et Andreas ac reliqui eiusdem sortis. Quos nisi Moyses aut ut non propheta nescisset aut ut malignus odisset, si fuit propheta, non tam crudae devotionis contumelia lacerasset. p. 402,16 Neque enim vulgo saltem eos maledictos dicit, id est apud homines tantum sed maledictos deo. Quod si ita est, unde iam benedictionis relinquetur spes vel Christo vel apostolis vel ipsis nobis, si nominis eius causa crucifigi contingat? Quam denique imprudens erat et vacans inspiratione divina, ut cogitare nequiverit diversis ex causis homines in ligno suspendi alios quidem ob iniquum facinus, quosdam vero iustitiae causa et propter deum! Idcircoque confuse omnes et sine discretione ulla sub idem coniecit maledictum, cum esset dicendum, si ei prudentia inesset ulla, non dicam divinatio, etsi adeo crux offenderat eum, ut sola excepta abdicataque esset ex omni genere punitionum, maledictum esse sceleratum et impium omnem, qui pependisset in ligno, ut esset discretio aliqua inter iustos et iniustos; p. 403,3 quamquam nec sic quidem vera dixisset, cum latronem Christus de ligno secum introduxit in paradisum patris sui. Ubi est ergo maledictus omnis, qui pendet in ligno? An Barabbas latro ille insignis, qui non solum in ligno suspensus minime est, sed etiam Iudaeorum rogatu emissus e carcere, magis fuit benedictus quam ille, qui cum Christo de cruce ascendit in caelum? Quid denique quod etiam eum maledictum vocat, qui solem adoraverit aut lunam ? Si ergo sub gentili positus rege solem cogar adorare et, cum restitero maledictum hoc metuens, iubear crucifigi, in aliud eius incurram maledictum, quod adversus eum deprompsit, qui pendet in ligno. An ipsi quidem bonis omnibus maledicere consuetum est, nos vero tanti devotiones eius existimare debemus, quanti sunt stomachantium vetularum? p. 403,17 Sic enim et dei omnes pueros ac virgines pari devotione prosequitur dicens maledictum esse omnem, qui non suscitaverit semen in Israhel. Quod aeque convicium principaliter quidem Iesum tangit, qui ortus et ipse, ut dicitis, ex Iudaeis, nullam tamen inter eos servandae posteritatis causa sobolem suscitavit, deinde et discipulos eius, quorum nonnullos quidem ab uxoribus seiunxit, quos copulatos invenerat, quosdam vero et coniungi vetuit, quos deprehendit intactos. Qua de re Moyseos impunitam hanc linguam maledictorum iaculis Christum lumen, sanctimoniam, divina omnia petentem iure nos cognoveris exsecratos. An ne forte multum interesse putes inter suspensum et crucifixum – nam et hoc in praesidium vobis defensionis soletis assumere – commentis hisce vestris Paulum audias praescribentem: Christus nos redemit de maledicto legis factus pro nobis maledictum, quia scriptum est: ‛Maledictus omnis, qui pendet in ligno’. p. 404,8
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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE PREMIER. FAUSTE REPROCHE A MOÏSE DES MALÉDICTIONS LANCÉES MAL A PROPOS.
Fauste. Pourquoi ne recevez-vous pas Moïse? — Parce que nous aimons et honorons le Christ. Quel est, en effet, l'homme assez irréligieux pour accueillir celui qui a maudit son père? Or, bien que les blasphèmes de Moïse n'aient épargné ni choses divines, ni choses humaines, ce qui nous inspire cependant le plus d'horreur pour lui, c'est qu'il a lancé d'affreuses malédictions contre le Christ, le Fils de Dieu, qui a été suspendu au bois pour notre salut. L'a-t-il fait sciemment, ou par hasard, c'est à toi de le voir. Mais ni l'un ni l'autre ne l'excuse ni ne dispose à le recevoir. En effet, il déclare maudit quiconque est suspendu au bois[^4]. Et tu veux que je l'accepte, que je croie à sa parole ; lui qui a sciemment et volontairement maudit le Christ, s'il était prophète, et s'il n'était pas prophète, l'a maudit par ignorance et sans le savoir ? Choisis donc entre ces deux hypothèses : ou Moïse n'a pas été prophète et a péché par imprudence en enveloppant Dieu, sans le savoir? dans les malédictions qu'il formule contre d'autres, selon son usage; ou il était prophète, et alors il n'a point ignoré ce qui devait arriver, mais par jalousie contre notre salut qui devait avoir lieu par le bois, il a lancé contre Celui qui en est l'auteur le venin de sa bouche malfaisante. Et qui donc croira que celui qui déchire ainsi le Fils, a vu ou connu le Père; que celui qui a ignoré le terme ou l'ascension du Fils, a pu prédire son avènement? J'ajouterai encore une considération qui me frappe : c'est l'étendue et la portée de cette injure, le nombre de ceux qu'elle atteint et blesse: tous les justes et tous les martyrs, qui ont subi ce genre de mort, comme Pierre, André et tous ceux qui ont partagé leur sort. Si Moïse n'avait pas péché par ignorance, faute du don de prophétie, ou si, étant prophète, il n'eût pas cédé à l'instinct de la malice et de la haine, il ne leur eût pas infligé un si cruel anathème: car il ne les déclare pas seulement maudits d'une façon vulgaire, c'est-à-dire chez les hommes, mais aussi devant Dieu. Or, si cela est, quel espoir de bénédiction reste-t-il au Christ même, ou aux Apôtres, ou à nous, s'il nous arrive d'être crucifiés en qualité de chrétiens? Enfin, à quel point n'était-il pas imprudent et dénué de l'inspiration divine, pour ne pas songer que les hommes peuvent être attachés au bois pour des causes différentes; les uns en expiation d'un forfait, les autres pour la justice et pour Dieu? Aussi a-t-il lancé sa malédiction au hasard, sur tous et sans distinction; tandis que, s'il avait eu la moindre, je ne dirai pas inspiration prophétique, mais prévoyance, et si la croix le blessait au point de former, elle seule, une exception et un supplice à part entre tous les genres de supplices, il devait simplement déclarer maudit tout scélérat, tout impie suspendu au bois, afin d'établir une distinction entre les bons et les méchants ; et encore n'eût-il pas été absolument dans le vrai, puisque c'est du gibet que le Christ a fait entrer avec lui le larron dans le paradis de son Père[^1]. Où est donc l'anathème: « Maudit celui qui est suspendu au bois ? » Est-ce que Barrabas, cet insigne brigand, qui non-seulement ne fut pas suspendu au bois, mais qui fut même élargi à la demande des Juifs[^2], fut plus béni que celui qui monta, avec le Christ, de la croix au ciel? Dirai-je enfin que Moïse appelle maudit quiconque adore le soleil et la lune[^3] ? Si donc, étant sujet d'un roi païen, je suis forcé d'adorer le soleil, que je résiste et que, craignant la malédiction attachée à cet acte, je sois condamné à être crucifié : quoi ! j'encourrai l'autre malédiction lancée par Moïse contre celui qui est suspendu au bois? Veut-il donc maudire tous les gens de bien? Pour nous, nous ne devons pas plus faire cas de ses anathèmes que de ceux d'une vieille femme en colère. C'est ainsi encore qu'il poursuit d'une même malédiction les enfants et les vierges, quand il déclare maudit celui qui ne laissera point de postérité en Israël[^5]. Injure, qui s'adresse encore particulièrement à Jésus, lequel étant issu selon vous, du peuple juif, n'a cependant point laissé de postérité dans sa nation, et aussi sur ses disciples, dont quelques-uns étaient mariés et qu'il a séparés de leurs femmes, tandis qu'il a défendu le mariage à ceux qu'il a trouvés vierges. En conséquence, sachez que nous avons à bon droit en abomination cette langue insolente de Moïse, qui décoche les traits de sa malice contre le Christ qui est la lumière, contre la virginité, contre tout ce qu'il y a de divin. Que si par hasard vous prétendez qu'il v a une grande différence entre un suspendu et un crucifié (car c'est là ordinairement votre principal moyen de défense), écoutez Paul, rejetant vos subterfuges : « Le Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, en devenant malédiction pour nous. Car il est écrit : Maudit quiconque est suspendu au bois[^6] ».
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Deut. XXI, 23.
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Luc, XXIII, 43.
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Matt. XXVII, 26.
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Deut. XVII, 3.
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Deut. XXV, 5,10.
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Gal. III, 13.