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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE VII. LA LUMIÈRE MATÉRIELLE. LA LUMIÈRE DE LA RAISON. LA LUMIÈRE DIVINE.
A propos de cette fable, en trois ou plutôt en quatre parties, que vous dirai-je de la lumière secrète du Père, sinon que vous n'êtes pas capables d'imaginer une autre lumière que celle qui frippe vos yeux? En voyant cette lumière visible pour toute chair, non-seulement d'hommes, mais même d'animaux et d'insectes, cette lumière si universellement connue, vous en formez ce rêve de votre coeur, vous la dilatez à l'infini et vous dites que c'est en elle que le Père habite avec ses sujets. Quand, en effet, avez-vous jamais distingué la lumière matérielle de la lumière intellectuelle, puisque, pour vous, comprendre la vérité n'a jamais signifié autre chose que se figurer des formes corporelles, soit limitées, soit illimitées sous certains côtés : vains fantômes dont vous ne voyez pas le néant? Par conséquent, autant il y a de différence entre la pensée qui me fait songer à votre région de lumière qui n'existe nulle part, et la pensée qui me fait songera Alexandrie que je n'ai jamais vue, mais qui existe, autant encore il y a de différence entre la pensée qui me fait songer à Alexandrie que je ne connais pas, et celle qui me porte vers Carthage que je connais : autant et incomparablement plus grande est la distance entre la pensée qui me représente des corps réels et connus, et celle par laquelle je comprends la justice, la chasteté, la foi, la vérité, la charité, la bonté, et toute autre chose de ce genre. Dites-moi donc, si vous le pouvez, quelle espèce de lumière est cette dernière pensée : lumière qui fait discerner entre elles toutes les choses qui ne sont pas elle, et voir clairement combien elles en diffèrent ? Et cependant cette lumière n'est pas encore la lumière qui est Dieu : car l'une est créature, et l'autre est le créateur ; l'une est l'ouvrage, l'autre l'ouvrier ; l'une enfin sujette à changement, voulant ce qu'elle ne voulait pas, apprenant ce qu'elle ne savait pas, se souvenant de ce qu'elle avait oublié, tandis que l'autre subsiste par une volonté immuable, par la vérité, par l'éternité ; que d'elle procèdent le principe de notre existence, la raison de nos connaissances, la loi de nos affections : qu'elle a donné à tous les animaux privés de raison la nature qui les fait vivre, la vigueur qui les fait sentir, le mouvement qui forme leurs appétits; qu'elle a aussi donné à tous les corps la mesure qui les fait subsister, le nombre qui fait leur beauté et le poids qui détermine leur ordre. Or, cette lumière, indivisible Trinité, est le Dieu unique ; et cette substance qui n'a aucun corps, qui est par elle-même incorporelle, spirituelle, immuable, vous la partagez entre les parties de l'espace, vous n'assignez pas même seulement trois places à la Trinité, mais quatre : au Père une, c'est-à-dire la lumière inaccessible, que vous ne comprenez en aucune façon ; au Fils deux, le soleil et la lune ; et au Saint-Esprit une, c'est-à-dire l'atmosphère ambiante. Je n'ai parlé jusqu'ici que de la lumière inaccessible du Père ; mais, pour les vrais croyants, le Fils et le Saint-Esprit n'en sont point séparés.
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Reply to Faustus the Manichaean
7.
As for this threefold or rather fourfold fiction, what shall I say of the secret light of the Father, but that you can think of no light except what you have seen? From your knowledge of visible light, with which beasts and insects as well as men are familiar, you form some vague idea in your mind, and call it the light in which God the Father dwells with His subjects. How can you distinguish between the light by which we see, and that by which we understand, when, according to your ideas, to understand truth is nothing else than to form the conception of material forms, either finite or in some cases infinite; and you actually believe in these wild fancies? It is manifest that the act of my mind in thinking of your region of light which has no existence, is entirely different from my conception of Alexandria, which exists, though I have not seen it. And, again, the act of forming a conception of Alexandria, which I have never seen, is very different from thinking of Carthage, which I know. But this difference is insignificant as compared with that between my thinking of material things which I know from seeing them, and my understanding justice, chastity, faith, truth, love, goodness, and things of this nature. Can you describe this intellectual light, which gives us a clear perception of the distinction between itself and other things, as well as of the distinction between those things themselves? And yet even this is not the sense in which it can be said that God is light, for this light is created, whereas God is the Creator; the light is made, and He is the Maker; the light is changeable. For the intellect changes from dislike to desire, from ignorance to knowledge, from forgetfulness to recollection; whereas God remains the same in will, in truth, and in eternity. From God we derive the beginning of existence, the principle of knowledge, the law of affection. From God all animals, rational and irrational, derive the nature of their life, the capacity of sensation, the faculty of emotion. From God all bodies derive their subsistence in extension, their beauty in number, and their order in weight. This light is one divine being, in an inseparable triune existence; and yet, without supposing the assumption of any bodily form, you assign to separate places parts of the immaterial, spiritual, and unchangeable substance. And instead of three places for the Trinity, you have four: one, the light inaccessible, which you know nothing about, for the Father; two, the sun and moon, for the Son; and again one, the circle of the atmosphere, for the Holy Spirit. Of the inaccessible light of the Father I shall say nothing further at present, for orthodox believers do not separate the Son and the Spirit from the Father in relation to this light.