XI.
Quant au soleil, à la lune et au reste des astres, nous voyons bien qu'ils sont des corps célestes ; mais nous ne voyons pas qu'ils soient des corps animés. Qu'on nous lise un témoignage des livres saints à cet égard, et nous le croyons aussitôt. Mais le passage d'une épître de saint Paul, que vous m'avez cité comme la preuve qu'ils en donnent ordinairement, peut aussi être entendu des hommes seuls. Dans chaque homme, en effet, se trouve toute créature, non point toute créature universellement, par exemple, le ciel, la terre et tout ce qu'ils renferment; mais en général et d'une certaine manière. On y trouve d'abord la créature raisonnable, que la raison comme la foi nous montre dans les anges; la créature sensitive (sensualis, si je puis ainsi m'exprimer), que les animaux ont reçue en partage; car ils se servent de leurs sens et des mouvements de leurs sens, pour se porter vivement vers les choses utiles et s'éloigner des choses nuisibles ; puis la créature qui vit et ne sent pas, telle qu'on peut la remarquer dans les arbres; car les accroissements de notre corps se font en nous sans que nous les sentions; et nos cheveux, quoiqu'ils n'éprouvent aucune sensation lorsqu'on les coupe, prennent cependant de l'accroissement. Enfin, on voit en nous, avec plus d'évidence encore, la créature corporelle même; laquelle, bien que faite et formée de la terre, renferme cependant certaines particules de chacun des éléments de ce monde corporel, particules dont la réunion constitue le tempérament sain. Car la vigueur des membres naît de la chaleur, qui elle-même a pour principe le feu dont la lumière brille dans les yeux; les canaux des veines appelées artères, ainsi que les cavités des poumons sont remplis d'air; s'il n'y avait aucune partie liquide, la formation de la salive deviendrait impossible, et la vie serait consumée par la sécheresse. Enfin, le sang lui-même, remplissant les autres veines dans sa course rapide, promène partout ses flots et ses ondes paisibles. Ainsi il n'est aucune espèce de créature qu'on ne puisse reconnaître dans l'homme; et ainsi toute créature souffre et gémit en lui, dans l'attente de la révélation des enfants de Dieu1; et de plus elle sera, par la résurrection du corps, délivrée tout entière, sinon dans tous les hommes, de la servitude de la corruption, parce qu'elle réside tout entière dans chacun d'eux. On pourrait peut-être donner à ce passage de l'épître de saint Paul une interprétation différente et meilleure; mais on ne peut pas nous imposer comme conséquence nécessaire de ces expressions, l'obligation de croire que le soleil, la lune et les astres poussent de communs gémissements, jusqu'à ce qu'ils soient délivrés, à la fin des siècles, de la servitude de la corruption.
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Rom. VIII, 22, 23. ↩