21.
Que sur ce point donc personne ne s'abuse ni ne trompe les autres. Tout subterfuge s'évanouit et s'efface à la lumière du sens, si parfaitement évident, de la sainte Ecriture. Notre origine nous communique la mort dans ce corps mortel; c'est notre origine aussi qui dans cette chair pécheresse nous transmet le fléché; et c'est pour le guérir, tant pour la partie criminelle que nous devons à notre naissance, que pour la partie que nous avons ajoutée par notre propre volonté; c'est aussi pour rendre la vie à la chair même que le Médecin nous est venu avec-la ressemblance de notre chair pécheresse; malades et non point valides et sains, nous avons besoin de lui; il n'est pas venu appeler des justes, mais bien des pécheurs1.
Reste, il est vrai, le passage où l'Apôtre avertit les fidèles de ne point se séparer s'ils sont unis à des conjoints infidèles. Car, dit-il, « le mari infidèle est dans ce cas sanctifié en son épouse; comme en l'un de nos frères sa femme infidèle est aussi sanctifiée. Autrement, vos fils seraient impurs, tandis que maintenant ils sont purs2 ». Comment faut-il entendre ce passage ?
On peut d'abord lui donner le sens que nous avons nous-même indiqué ailleurs3, et que Pélage a développé identiquement en commentant l'épître aux Corinthiens4. En effet, il s'était vu des exemples d'âmes gagnées à Jésus-Christ, d'épouses converties par leurs maris, de maris par leurs épouses, ou de petits enfants encore, que la volonté saintement victorieuse d'un père ou d'une mère chrétienne avait faits chrétiens.
On peut y voir un second sens qui, ce semble, parle plus clairement encore, et s'impose en quelque sorte dans le texte de l'Apôtre. Il s'agirait d'une sorte de sanctification qui purifiait d'une façon quelconque le conjoint infidèle à cause de son conjoint fidèle. Ainsi, par exemple, aux époques mensuelles de la femme, le mari ou l'épouse qui avait compris sur ce point la leçon de la loi, s'abstenait du mariage; Ezéchiel, en effet, place cette pratique au nombre des préceptes qu'on ne doit point entendre au sens figuré5, Vous pouvez supposer même toute autre influence sanctifiante, bien que non clairement désignée, mais qui, inévitablement, devait rejaillir des liens de nature établis entre les époux et leurs enfants.
Cependant une vérité doit être maintenue sans ombre de doute. Quelle que soit la sanctification dont il s'agit ici, elle n'avait pas le pouvoir de faire des chrétiens ni de remettre les péchés sans les sacrements qui, seuls, parla toi du Christ et de l'Eglise, peuvent produire des fidèles. Non: ni les époux infidèles, malgré leur union si intime avec des conjoints si Saints et si fidèles qu'on les suppose, ne sont pour cela purifiés de l'iniquité qui sépare du royaume de Dieu et entraîne à la damnation ; ni les petits enfants, malgré leur naissance de parents si saints et si fidèles qu'on le voudra, ne sont absous de la tache du péché originel, à moins qu'ils n'aient été eux-mêmes baptisés en Jésus-Christ. C'est surtout leur cause que nous devons plaider, avec d'autant plus de zèle qu'ils peuvent moins la défendre eux-mêmes.