11.
Vous couvrez mes aveux d'un orgueilleux dédain, vous allez même jusqu'à me comparer en cela aux animaux. Pour moi, je vous invite d'abord, et si vous ne cédez pas, je vous somme de mieux connaître notre commune infirmité dans laquelle la vertu se perfectionne; je ne veux pas que, en vous flattant de connaître ce que vous ne connaissez pas, vous vous mettiez dans l'impossibilité de parvenir à la vérité. Je suis convaincu qu'il est tel phénomène que vous cherchez à comprendre sans pouvoir y parvenir; et cependant, chercheriez-vous si vous n'aviez pas l'espérance de réussir? Cela seul me prouve que vous ne connaissez pas les forces de votre intelligence, puisque, loin de faire avec moi l'aveu de notre commune ignorance, vous faites hautement profession de connaître votre nature. Que dirai-je de la volonté, dans laquelle nous confessons sans hésiter l'existence du libre arbitre? Le bienheureux apôtre saint Pierre voulait donner sa vie pour Jésus-Christ1; il le voulait sincèrement, et Dieu lui-même était témoin de sa bonne volonté; mais cette volonté même ne connaissait pas la mesure de ses forces. Le danger se présente, et cet apôtre, pour qui Jésus-Christ était réellement le Fils de Dieu , s'enfuit et se cache honteusement. Nous nous sentons vouloir ou ne pas vouloir; mais, à moins de nous tromper nous-mêmes, avouons, cher fils, que nous ignorons ce que peut notre volonté, alors même qu'elle est bonne; nous ne savons ni quelles sont ses forces, ni à quelles épreuves elle cédera ou elle ne cédera pas.
-
Jean, XIII, 37. ↩