27.
En présence de ces vérités, devait-on répudier la maxime du livre de la Sagesse, livre dont les pages sont lues dans l’Eglise de Jésus-Christ depuis la plus haute antiquité, et qui a toujours été vénéré, comme inspiré de Dieu même, par tous les chrétiens, depuis les évêques jusqu'aux simples fidèles, en comprenant dans ce nombre les pénitents et les catéchumènes? Tous nos anciens commentateurs des saintes Ecritures nous fourniraient en abondance les preuves les plus explicites en faveur de cette doctrine que nous ne cessons d'opposer à l'erreur des Pélagiens; ils nous apprendraient tous que la grâce de Dieu ne nous est pas donnée selon nos mérités, mais qu'elle est parfaitement gratuite; qu'elle ne dépend ni de celui qui veut, ni de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde; et qu'il ne saurait en Dieu y avoir aucune injustice1. Si donc nous empruntions aux anciens auteurs catholiques les preuves si nombreuses que la sainte Ecriture leur a fournies en faveur de la vérité que nous soutenons, je suis persuadé que ces frères, pour qui nous écrivons en ce moment, y acquiesceraient d'une manière absolue; du reste, vous nous en donnez l'assurance dans vos lettres. Quel besoin, dès lors, de scruter minutieusement les ouvrages de ces docteurs qui, avant la naissance de l'hérésie pélagienne, ne se crurent pas dans la nécessité de traiter sous toutes ses faces cette difficile question? Et pourtant, avec quelle autorité ne l'auraient-ils pas fait, s'ils avaient eu en face nos propres adversaires? De là vient que leur opinion sur la grâce de Dieu n'est formulée que d'une manière purement accidentelle dans quelques passages de leurs écrits. Au contraire, ils insistent longuement sur toutes les erreurs qu'ils reprochent aux ennemis de l'Eglise, sur les exhortations à la pratique de certaines vertus qui constituent le culte du Dieu vivant et véritable et nous donnent droit à la vie éternelle et au bonheur suprême. D'ailleurs, la multiplicité de leurs prières nous révèle suffisamment ce qu'ils pensaient de la puissance de la grâce, car ils n'auraient pas demandé à Dieu ce qu'il nous ordonne de faire, s'ils n'avaient pas été persuadés que c'est Dieu lui-même qui nous accorde la grâce de faire ce qu'il nous commande.
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Id. IX, 15, 14. ↩