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Jul. Je répéterai seulement, pour ne pas m'écarter de l'objet de la présente discussion, que le libre arbitre a été donné uniquement, et sans qu'il soit possible de lui assigner un autre rôle, afin que la volonté d'aucun homme ne soit jamais entraînée malgré elle vers la justice, ou vers l'iniquité.
Aug. L'Apôtre sentant dans ses membres une loi qui combat contre la loi de son esprit et qui le rend lui-même captif sous la loi du péché, s'écrie : « Je ne fais pas le bien que je veux et je fais le mal que je hais », dis-nous donc comment la volonté de cet Apôtre n'était point entraînée malgré elle vers le mal. Car, pour emprunter un instant votre langage, si celui qui prononce ces paroles gémit sous le poids d'une habitude mauvaise parce qu'il ne se trouve pas encore, suivant votre expression, sous le règne de la grâce de Jésus-Christ; la volonté de cet homme est-elle, oui ou non, libre dans ses déterminations? Si la volonté de cet homme est libre, pourquoi ne fait-il pas le bien qu'il veut et pourquoi fait-il le mal qu'il hait? Si au contraire la volonté de cet homme n'est pas libre par la raison qu'il n'est pas encore sous le règne de la grâce de Jésus-Christ, je répéterai alors ce que j'ai déjà dit et ce qu'il faut, je le vois, vous répéter souvent : Personne ne peut par le libre arbitre de sa volonté et sans le secours de la grâce de Jésus-Christ, accomplir le bien qu'il veut et éviter le mal qu'il hait : non pas que la volonté humaine soit entraînée vers le bien par cette grâce, comme elle était entraînée auparavant vers le mal, c'est-à-dire malgré elle; mais elle se trouve à la fois délivrée de l'esclavage sous lequel elle gémissait et attirée vers son libérateur par un amour également suave et libre, non point par cette crainte servile qui est une véritable torture.