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Jul. D'autre part, j'ai déjà dans ce premier opuscule plaidé la cause de la concupiscence ou passion de la chair, que l'on appelle aussi la passion du plaisir, et qui a sa raison d'être dans la nécessité de perpétuer la race humaine ; j'ai démontré que cette concupiscence n'est pas autre chose qu'une de ces propriétés dont le Créateur a doué également le corps des êtres raisonnables et celui des êtres dépourvus de raison ; et que Dieu lui-même est l'auteur des impressions voluptueuses que nous éprouvons dans notre chair : mais puisque Augustin s'élève avec violence contre cette passion ; puisqu'il déclare qu'elle est mauvaise, en d'autres termes, qu'elle est un péché naturel et la source de tous les autres péchés ; puisqu'il s'appuie surtout pour établir sa doctrine sur le sentiment de honte qui s'attache à cette passion et qu'il se raille de moi sous prétexte que je rougis de la nommer par son nom propre.....
Aug. Je dis que la concupiscence de la chair, par laquelle celle-ci convoite contre l'esprit, et qui reçoit aussi le nom de passion de la volupté, est mauvaise ; qu'elle doit présentement être réprimée dans cette chair et être affaiblie par de bonnes habitudes; que dans la vie éternelle au contraire notre chair doit être délivrée complètement de cette passion déréglée, et non pas séparée de notre âme, comme si une substance mauvaise avait été ajoutée ou unie à notre être, conformément à la doctrine insensée des Manichéens mais, quelles que soient tes pensées au sujet de cette passion, je ne croirais pas, si je n'en trouvais la preuve dans ces livres que tu as remplis d'un verbiage également futile et insensé, je ne croirais pas que tu puisses placer dans le paradis cette concupiscence telle qu'elle existe aujourd'hui, c'est-à-dire, sollicitant à des actions criminelles les personnes chastes qui vivent soit dans l'état du mariage, soit dans la continence, et pervertissant le coeur de ceux qui ne lui résistent point par un acte de volonté plus puissante.