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Works Augustine of Hippo (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE CINQUIÈME. LE CINQUIÈME LIVRE DE JULIEN.

61.

Julien. La volonté donc, qui n'est que le mouvement de l'âme sans coaction, doit à la nature de pouvoir être à elle-même son effet. Elle est née dans la nature même, et toutefois de ce qui est possible, non de ce qui est.nécessaire. Si l'on nous dit ici que la nature est mauvaise, parce qu'elle a pu avoir une volonté mauvaise, je réponds : Mais cette nature est bonne, puisqu'elle a pu avoir une volonté bonne. On l'accusera donc en même temps d'être très-bonne et très-mauvaise. Mais il n'est point dans l'ordre qu'une même chose ait en même temps des mérites et des qualités contraires. Si donc on la regarde comme mauvaise, parce qu'elle a pu faire le mal,, qu'on la regarde aussi comme bonne, puisqu'elle a pu faire le bien. Mais comment, dira-t-on, a-t-elle pu faire le mal, quand elle faisait aussi le bien ? Je réponds Parce que ce bien qu'on appelle aussi vertu ne pouvait lui être propre, s'il n'était en même temps. volontaire : or il n'eût pas été volontaire, s'il eût été bien nécessairement, et il eût été bien nécessairement, s'il n'eût pu être mal. Pour conserver donc au bien sa valeur, il a fallu la possibilité du mal.

Augustin. Si je ne me trompe, tu ne veux pas accorder la volonté du bien à cette nature qui fut la condition primordiale de l'homme; comme si Dieu n'eût pu douer l'homme d'une volonté bonne, dans laquelle néanmoins il ne le forcerait point de rester, mais en laissant à son libre arbitre d'y demeurer toujours ou non, selon sa volonté, et d'en sortir sans y être forcé pour choisir le mal, comme il est arrivé. Car l'homme n'a point eu auparavant la volonté du péché, et n'a point commencé par la volonté du mal une vie dans laquelle Dieu l'a fait droit, et déjà capable d'user de sa raison. Qui pourrait entendre dire que l'homme fut créé comme naissent les- enfants? Cette nature ainsi perfectionnée, non plus par les ans, mais par la main de Dieu, ne pouvait demeurer sans aucune volonté, et cette volonté ne pouvait être mauvaise, autrement .l'Ecriture ne dirait point : « Dieu a fait l'homme droit[^1] ». L'homme fut donc créé avec une nature bonne, prêt à obéir à Dieu, recevant avec docilité ses ordres, qu'il pouvait accomplir sans aucune difficulté, tant qu'il l'eût voulu, et qu'il pouvait négliger à son gré, sans contrainte : et toutefois ni la première alternative n'était sans profit, ni la seconde sans châtiment. D'où nous pouvons conclure dans la piété et la sagesse de nos pensées que la première volonté bonne fut l'oeuvre de Dieu; ce fut avec elle, en effet, qu'il fit l'homme droit car nul ne saurait être droit que par une volonté droite.

Aussi que l'on perde la volonté du bien, et nul ne peut nous la rendre, sinon celui qui l'a créée : et ne croyons point que la nécessité du péché se puisse guérir autrement que parla miséricorde de ce même Dieu dont elle accomplit la juste et insondable sentence, en s'attachant à la postérité de celui qui pécha sans y être contraint. Aussi l'Apôtre, après avoir pleuré cette nécessité pénale du péché qui habitait en lui, qui le contraignait au mal qu'il ne voulait point, nous enseigne bientôt à qui nous devons recourir : « Misérable homme que je suis », s'écrie-t-il, « qui me délivrera du corps de cette mort? La grâce de Dieu, par Jésus-Christ Notre-Seigneur[^2] ».

Tu vois assurément qu'il ne tire aucun secours de cette possibilité dans laquelle -tu crois avoir trouvé un grand avantage : elle est perdue, quand on fait le mal nécessairement; et sous l'action nécessaire du mal, l'homme s'écrie : « Malheureux homme que je suis[^3] » Mais qu'il lui vienne en aide celui dont la grâce peut surmonter tout ce que tu appelles nécessité , parce .qu'il n'en saurait être différemment : « Car ce qui est impossible à l'homme est facile à Dieu[^4] ». Pour lui, qu'un chameau passe par le trou d'une aiguille, ce n'est point nécessaire ; mais cela devient possible , de même qu'il passa en chair et en os à travers les portes fermées.

Tu fais donc d'inutiles efforts pour défendre la nature viciée. Si tu veux faire pour elle quelque chose d'utile, cherche à la guérir et non à l'excuser. Admets qu'elle fait elle-même ce qui lui a mérité la damnation. Quelle que soit, en effet, l'origine qu'on assigne à la volonté du mal, dès lors qu'on nie qu'elle soit née d'elle-même, on affirme par là qu'elle est injustement condamnée. Or quelle plus criante injustice, que d'être damnée pour ce qu'elle n'a point fait? Si, au contraire, elle a fait de quoi être damnée, pourquoi lui chercher une excuse dans le possible, et l'accuser ainsi d'une manière tout à fait inexcusable? Tu dis en effet que « la mauvaise volonté existe en réalité dans la nature, mais qu'elle n'y est que possible et non nécessaire ». Si ce possible est en dehors de la nature, c'est lui et non la nature qu'il faut condamner pour avoir fait naître la mauvaise volonté. Mais si ce possible fait partie de la nature, cette nature donc fait une mauvaise volonté, d'autant plus qu'elle pouvait ne pas le faire comme le montre la définition que tu nous as donnée du possible. Nul ne vient te dire La nature est mauvaise, par cela même qu'elle a pu avoir une volonté mauvaise. Nous sommés loin de le dire, nous, contre qui tu invectives. Pourquoi tant appuyer sur des raisons superflues?

Mais quand tu viens dire : « Ce bien qu'on appelle vertu ne serait point volontaire, s'il y avait pour lui nécessité du bien, et il serait forcé au bien s'il n'avait le pouvoir de faire le mal », tu as complètement oublié Dieu, dont la vertu est d'autant plus nécessaire qu'il la veut de telle sorte qu'il ne saurait ne pas la vouloir. Tu as dit, en effet, dans ton premier livre de cet ouvrage, que « Dieu ne peut être que juste » : et s'il y a la nécessité, qu'on l'appelle nécessité, pourvu néanmoins que l'on convienne que rien n'est plus heureux que cette nécessité ; nécessité pour Dieu de ne point faire le mal, aussi grande pour lui que la nécessité de jouir du bonheur éternel. Une telle nécessité, en effet, ne craint pas tes paroles dans lesquelles tu n'as pas osé dire : « Il y aurait pour lui nécessité du bien », préférant cette phrase : « C'eût été pour lui une souffrance de n'avoir a point le pouvoir du mal » : comme si Dieu eût épargné à l'homme comme un fardeau pénible de supporter cette nécessité du bien que n'aurait pas accompagnée le pouvoir de faire le mal, bien tellement grand qu'il est une récompense pour les saints, que tu as oubliés aussi bien que Dieu. Notre vie, en effet, ne sera point sans vertu quand il nous sera accordé de ne plus pouvoir nous séparer de Dieu, parce que nous ne pourrons le vouloir. Ce bonheur qui nous est promis d'être toujours avec Dieu[^5] , nous sera tellement assuré, que nous ne voudrons pas, que nous ne pourrons vouloir nous séparer de lui. La vertu ne saurait donc exister chez nous qu'à la condition de n'avoir point la volonté du mal quand nous pourrions l'avoir : mais par le mérite de cette vertu moindre, nous devons nous élever à cette récompense qui sera la vertu, la vertu assez grande pour que nous n'ayons plus la volonté du mal, et même que nous ne puissions l'avoir. O désirable nécessité ! Elle sera le don de la vérité, que nous posséderons avec cette absolue sécurité sans laquelle ne saurait exister dans sa plénitude le bonheur que nous posséderons, et qui n'a plus besoin d'accroissement.

  1. Ecclés. VII, 30.

  2. Rom. VII, 24 et 25.

  3. Matth. XIX, 26.

  4. Jean, XX, 26.

  5. I Thess. IV, 16.

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Contre la seconde réponse de Julien

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