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Works Augustine of Hippo (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE SIXIÈME. LE SIXIÈME LIVRE DE JULIEN.

17.

Julien. Mais, au contraire, considère combien est sérieux notre combat contre toi et contre le Manichéen, qui t'enveloppe toujours dans sa ruine, et combien prompt notre triomphe. Tout ce qu'il a vomi pour blâmer l'oeuvre divine, nous l'avons consigné aussitôt dans le sillon de notre définition, et nous le forçons à nous expliquer ce qu'est le péché, selon lui, ce qui n'est évidemment rien autre que la volonté désirant ce que défend la justice, et dont on peut s'abstenir librement. Qu'on admette cela, et tous ces buissons de contradictions, qui avaient meurtri le mélange des corps, sont arrachés radicalement, et même au delà, disait un ancien[^6]. Quant aux affections de la crainte et aux sentiments de la douleur, dont il a cru se servir pour soulever une tempête et noyer les hommes, loin de forcer au mal, elles sont regardées comme les freins de la bonne volonté, et dès lors comme des aides et des messagères de la justice. Qui pourrait redouter le jugement sans les avertissements de la crainte ? Quels secours trouver dans les gémissements de la pénitence sans l'expiation de la douleur et de la peine intérieure ? De quoi servirait la sévérité du juge, si le péché volontaire ne trouvait son expiation dans les châtiments qu'il inflige? Tous ces témoignages nous disent assez haut que le péché n'est rien autre que la volonté libre méprisant les préceptes de la justice : et que la justice ne saurait subsister qu'en nous imputant les péchés qu'elle sait que nous avons librement prévus; et que dès lors aucune loi ne saurait nous faire un tort de ce qui nous est naturel, ni à personne un crime de ce qu'il n'a point fait, puisqu'il pouvait s'en abstenir. Cette doctrine met en déroute le Manichéen et le Traducien, qui s'efforcent, contrairement à toutes les lumières de l'intelligence, de transmettre par la génération un acte de volonté.

Augustin. Bien souvent déjà nous avons ré. pondu à toutes ces erreurs ; aussi, quiconque lit nos discussions et les retient, n'a pas besoin que je réponde chaque fois qu'il rencontre ton intarissable verbiage. Mais pour couper court à toute plainte, les esprits plus prompts me pardonneront, si je ne veux pas me dérober aux plus tardifs. Voici donc ma réponse, au sujet de la définition du péché dont tu crois t'appuyer beaucoup. Dire que le péché c'est la volonté recherchant ce que défend la justice, et dont on peut librement s'abstenir, c'est simplement déterminer le péché et non ce qui est aussi le châtiment du péché, ou simplement le péché d'Adam, dont la faute si grave a produit la misère pour ses enfants, ce joug si lourd qui pèse sur eux dès la sortie des entrailles maternelles, et ce corps corruptible qui appesantit l'âme. Une loi bien courte lui faisait connaître ce que défendait la justice; et dès lors il avait toute liberté de s'en abstenir, puisque la chair ne se soulevait point alors contre l'esprit, mal qui a fait dire aux fidèles : « Vous ne faites point les choses que vous voulez[^1]».L'aveuglement du coeur, qui nous fait ignorer ce que défend la justice, la violence des convoitises qui domine celui-là même qui sait ce qu'il doit éviter, ce ne sont point là seulement des péchés, mais des peines du péché. Et c'est pourquoi cela n'est point renfermé dans cette définition du péché, qui se borne à déterminer le péché, et non ce qui est aussi la peine du péché. Quiconque ignore ce qu'il doit faire, et fait alors ce qui n'est point à faire, n'est pas libre de s'abstenir, puisqu'il ne sait ce qu'il faut éviter. De même celui qui est, selon vous, sous le poids, non de son origine, mais de ses habitudes jusqu'à s'écrier : « Je ne fais point le bien que « je veux, mais je fais le mal que je hais[^2] », comment peut-il s'abstenir librement du mal qu'il ne veut point, mais qu'il fait, qu'il hait et qu'il commet? S'il était au pouvoir de l'homme de se délivrer de ces peines, on n'invoquerait point Dieu ni contre l'aveuglement, quia fait dire : « Eclairez mes yeux » , ni contre les désirs coupables, ainsi qu'il est dit « Que nulle iniquité ne domine sur moi[^3] ». Or si toutes ces choses dont on n'est pas libre de s'abstenir, n'étaient point des péchés, le Psalmiste ne dirait point: « Ne vous souvenez point des fautes de ma jeunesse ni de mon ignorance[^4] ». Il ne serait pas dit non plus

« Vous avez rassemblé mes péchés en un fais celui, et vous m'avez compté ce que j'ai fait malgré moi[^5] ». Cette définition du péché, tel que Adam le commit, lui qui savait ce que défendait la justice, et qui n'évita point ce qu'il lui était libre d'éviter, peut triompher des Manichéens ; mais ce triomphe est en notre faveur, puisque nous proclamons que de là découlent sur l'humanité tous les maux que nous voyons peser sur les enfants, et qui a fait dire à l'auteur sacré, à propos du péché : « Nul n'est exempt de souillures, pas même l'enfant qui ne compte qu'un seul jour sur la terre[^7] ». Mais toi, en niant ces doctrines, tu t'efforces, par ton funeste plaidoyer, d'accabler encore notre nature, en l'empêchant de chercher la délivrance de ses maux et quant au Manichéen, tu lui permets d'introduire une nature étrangère, coéternelle à Dieu, quand on lui demande d'où vient le mal. Il ne vient point, pour accuser la nature, nous jeter à la face l'appréhension de la crainte ou le sentiment de la douleur, que tu as voulu faire valoir contre lui, « parce que la crainte et la douleur sont les aides « et les messagères de la justice » ; puisque la crainte du jugement éloigne du péché , et que la douleur excite le repentir. Ce n'est point là ce que l'on te demande, mais bien où est la peine de la crainte chez les enfants qui n'évitent point le péché, et pourquoi ces grandes douleurs chez ceux qui ne commettent point le péché. Tu as dit en effet : « De quoi servirait la sévérité du juge, si la peine de la douleur imposée n'était un châtiment pour le péché volontaire? » Où est donc la justice à faire peser la douleur du châtiment sur ceux qui n'ont aucun péché volontaire ? Ce qui prouve combien sont vaines et frivoles ces louanges que tu as données à la crainte et à la douleur. Il y a là, en effet, de grands supplices que n'endureraient point, dès leur naissance, ces jeunes et nouvelles images de Dieu, et cela par le jugement le plus juste et la souveraine puissance de Dieu, si la culpabilité ne leur venait de l'antique péché d'origine. Enfin, dans le paradis, si nul n'eût péché et que des enfants fussent nés de ceux que Dieu avait unis par une véritable bénédiction, loin de nous de croire que nul, soit grand, soit petit, eût subi ces tourments. Il y a une souffrance non-seulement dans la douleur, ce qui est évident, mais aussi dans la crainte, selon le témoignage de l'Ecriture[^8] : loin de nous de croire qu'il y eût eu le moindre tourment dans le lieu de délices. Dès lors, quel que soit leur âge , qu'eussent-ils pu craindre si nul ne les eût fait craindre ? De quoi se plaindre si nul ne les eût blessés? Dans cette vie pénible, où nous avons été jetés pour souffrir, chassés que nous étions du paradis de délices, il reste, même chez ceux dont les fautes sont pardonnées, le poids des douleurs et des craintes, afin de mettre à l'épreuve notre foi à cette vie future, où nous ne souffrirons rien de tout cela non-seulement dans nos propres peines, mais pas même dans les peines de nos petits enfants ; car ce n'est pas pour les exempter de ces peines, que nous demandons pour eux la régénération, mais pour qu'ils soient admis dans ce royaume où il n'y aura rien de tel. Telle est la vraie foi, la foi catholique, méprisée par toi, et que même tu essayes de réfuter dans ton langage bruyant et ampoulé : et quand le Manichéen te demandera d'où viennent les maux que souffrent les enfants, tu seras à bout malgré ta loquacité ; dès lors, en effet, que tu nies le péché originel, il lui sera facile de te briser le front et d'introduire la nature étrangère du mal. Mais la foi catholique ne craint point ce qui te paraît impossible, « qu'une affaire de volonté devienne une affaire de génération », quand elle entend Dieu qui nous dit qu'il recherche les péchés des pères sur la troisième et sur la quatrième génération des enfants[^9]. L'affaire de la volonté qui constitue le péché des pères, devient une affaire de génération, quand elle est vengée sur les enfants : Abraham, père du peuple juif, et de qui Melchisédech reçut la dîme, fit un acte de volonté en donnant la dîme à ce prêtre; et toutefois l'Ecriture nous atteste que ses fils qui étaient en lui payèrent alors la dîme[^10] ; ce qui serait impossible, si une affaire de volonté ne devenait une affaire de génération.

  1. Cicero, 2 De finibus.

  2. Galat. V, 17.

  3. Rom. VII, 15.

  4. Ps. CXVIII, 133.

  5. Id. XXIV, 7.

  6. Job, XIV, 17, selon les Septante.

  7. Job, XIV, 4.

  8. I Jean, IV 18.

  9. Exod. XX, 5 ; XXXIV, 5.

  10. Hébr. VII, 9, 10.

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Contre la seconde réponse de Julien

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