38.
Julien. « Autrement, que gagneront ceux qui sont baptisés pour les morts, s'il est vrai que les morts ne ressuscitent pas ? Pourquoi sont-ils baptisés pour les morts ? et pourquoi nous-mêmes nous exposons-nous continuellement à tant de périls ? Oui, par la gloire que je reçois de vous en Jésus-Christ Notre-Seigneur, je meurs tous les jours. Pour parler selon l'homme, que me sert d'avoir combattu à Ephèse contre des bêtes farouches, si les morts ne ressuscitent point ? Mangeons et buvons, car demain nous mourrons ». Au dire de l'Apôtre, si l'infidélité impie détruit l'espérance de la gloire à venir au sein de laquelle Dieu sera tout en tous, si l'on nie la résurrection des morts, à quoi bon se faire baptiser pour les morts ? Ces paroles ont donné lieu à une erreur, car quelques-uns se sont imaginé qu'aux premiers temps de la prédication évangélique, on se réunissait d'ordinaire autour des morts; qu'on faisait pour eux la profession de foi, et qu'on répandait sur leurs membres inanimés l'eau du baptême: cette erreur n'a pour fondement que l'ignorance. En effet, ces paroles de l'Apôtre : «Qui sont baptisés pour les morts», n'ont pas un autre sens que ce passage de l'Epître aux Romains : « Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême pour la mort du péché[^3] » , c'est-à-dire, par la grâce nous nous approchons du sacrement de baptême avec la volonté de mortifier désormais nos membres, et de passer pour véritablement morts, si nous n'avons pas l'espoir de vivre après notre mort. Pourquoi, dit Paul, m'exposer chaque jour à tant de périls ? Pourquoi tomber sans cesse dans le danger de mourir victime des persécuteurs , afin de pouvoir me glorifier devant Dieu de votre avancement dans le bien ? Pourquoi tout cela, si les morts ne ressuscitent pas ? Pourquoi, pour parler ainsi selon l'homme, ai-je combattu contre les bêtes à Ephèse, c'est-à-dire, pourquoi ai-je supporté la bestiale fureur de gens séditieux, si la résurrection des morts est encore incertaine ? « Ne vous laissez point séduire, les mauvais entretiens corrompent les bonnes moeurs. Il y en a quelques-uns, parmi vous, qui ne connaissent point Dieu ; je vous le dis pour votre honte[^1]». L'amour du péché vous porte à ne point croire à l'avenir : on aime à penser qu'il n'y aura pas de jugement, afin d'être plus hardi à commettre le péché. Ils n'ont pas de Dieu la moindre idée, ceux qui n'ont pas foi en 1a résurrection. Vous ne vous bornez pas à nier la justice rémunératrice de l'Eternel ; vous révoquez encore en doute sa puissance; c'est là pour vous un motif plus que suffisant de rougir. Dire qu'il peut y avoir parmi vous de telles gens, c'est vous faire honte.
Augustin. Cela est clair; tu n'as rien voulu dire ici qui ait trait à la question débattue entre nous. Tu as essayé d'expliquer à ton point de vue particulier les paroles de l'Apôtre; en plusieurs endroits, tu n'as pas suivi la pensée de l'auteur; mais, enfin, dans ce que tu as dit, je ne vois rien de contraire à la foi : inutile donc de répondre à ton verbiage.
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Rom. VI, 4.
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I Corinth. XV, 29-34.