8.
L'ABBÉ JOSEPH. Il est certainement très juste et très-conforme à notre état de tenir fidèlement les promesses que nous avons faites. Aussi un religieux ne doit en faire aucune légèrement, dans la crainte d'être obligé de la tenir, ou de manquer à sa parole, s'il y trouve un avantage. Mais nous n'avons pas à discuter maintenant sur l'état de la santé ; nous avons à chercher le remède de la maladie et à vous donner un bon conseil, non pas sur ce qu'il fallait faire, mais sur le moyen d'éviter l'écueil que vous redoutez. Lorsque nous sommes libres de toute entrave et que nous pouvons choisir, de deux choses bonnes, nous préférons la meilleure; et de deux maux nous acceptons le moindre. Ce que vous me dites me fait croire que votre promesse inconsidérée vous a mis dans cette alternative, et que, des deux côtés, vous trouverez des inconvénients; vous devez choisir le parti qui sera le moins désavantageux et le plus réparable. Si donc vous êtes persuadés qu'il vous est plus utile de rester dans cette solitude que de retourner dans votre couvent, et que vous ne pouvez tenir votre promesse sans nuire beaucoup à votre âme, il vaudrait mieux manquer à votre parole et tomber dans une faute légère, qui n'aurait pas de suite, que de vous exposer à toujours vivre dans la tiédeur et le relâchement. Car lorsqu'un homme n'a pas bien considéré à quoi il s'engageait, s'il veut faire mieux, on ne saurait l'accuser d'inconstance et le blâmer de ne pas tenir une promesse qu'il a faite témérairement. Nous en avons la preuve évidente dans les saintes Écritures, qui montrent combien souvent il a été funeste de remplir ses engagements, et combien, au contraire, il a été avantageux d'y renoncer.