VII.
Quelqu'un demandera peut-être en cet endroit le nom de ce fils, si puissant et si chéri de Dieu, qui non seulement est avant le monde, mais qui l'a créé par sa force infinie, et en a rangé les parties en ordre par sa sagesse. La première leçon que nous devons apprendre à cet égard, est que son nom n'est connu que de lui et de Dieu son père, et qu'il ne l'est point des anges qui sont dans le ciel, et qu'il ne sera point déclaré, selon que l'Écriture le témoigne, que les desseins de Dieu n'aient été entièrement accomplis. Trismégiste assure que ce nom-là ne peut être prononcé par la bouche d'un homme ; voici ses paroles :
« La volonté de ce bien divin est le principe de ce principe; c'est elle qui a produit un Dieu dont le nom ne peut être prononcé par la bouche d'un homme. »
Et, un peu après, il ajoute ce qui suit :
« On ne saurait expliquer, ô mon fils ! la sagesse de Dieu ; son nom est au-dessus de toutes les paroles des hommes, » Mais quoique le nom que le père lui a donné dès le commencement ne soit point connu, il en a néanmoins un autre parmi les anges, et un autre parmi les hommes. Il a parmi les hommes le nom de Jésus ; celui de Christ n'est pas un nom propre, c'est une marque de puissance et de royauté, et c'est ainsi que les Juifs appellent leurs rois. Je crois devoir l'expliquer, à cause de ceux qui le corrompent par ignorance, et qui, en changeant une lettre, disent Chrest au lieu de Christ. Les Juifs avaient reçu ordre de faire un baume pour sacrer ceux qui étaient élevés à la dignité soit sacerdotale, soit royale. Ce sacre était autrefois parmi eux âne marque de la souveraine puissance, comme la pourpre en est une aujourd'hui parmi les Romains. Les anciens Grecs se servaient du verbe χρίεσθαι, pour signifier l'onction du sacre, comme leurs descendants se sont servis depuis de celui d'ἀλείφεοσθαι. Homère en rend témoignage, en exprimant dans ses poésies la manière dont cette cérémonie s'observait. C'est pour cela que nous appelons le Fils de Dieu Christ, c'est-à-dire oint, et en hébreu Messie. On trouve ἠλείμμενος dans quelques livres grecs mal traduits de l'hébreu. De quelque mot que l'on se serve, il est certain que l'on ne désigne point qu'il soit roi de la terre, parce que le temps de prendre possession de ce royaume-là n'est pas encore arrivé ; mais on marque qu'il est roi d'un royaume céleste et éternel, dont je parlerai dans le dernier livre de cet ouvrage. Maintenant je dirai quelque chose de sa première naissance.