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Works Jerome (347-420) Vies de plusieurs Saintes femmes de Rome
VIE DE SAINTE PAULA, VEUVE.

CHAPITRE IV. Des admirables vertus de sainte Paula, et particulièrement de sa charité envers les pauvres et de son amour pour la pauvreté.

Ayant rapporté jusqu'ici le voyage qu'elle fit étant accompagnée de plusieurs vierges entre lesquelles était sa fille Eustochia, il me faut maintenant parler plus au long de sa vertu, qui est ce qui lui est véritablement propre ; et je proteste devant Dieu, que je prends pour témoin et pour ;juge, de n'ajouter ni de n'exagérer rien dans le discours que j'en ferai , ainsi qu'ont accoutumé ceux qui entreprennent de louer quelqu'un ; mais qu'au contraire je retrancherai beaucoup de la vérité, de crainte qu'on eût peine à la croire si je la rapportais dans toute son étendue , et aussi afin que mes ennemis qui, selon la coutume des calomniateurs, cherchent continuellement des sujets de me déchirer, ne m'accusent point d'écrire des choses feintes et imaginaires, et de parer la corneille d'Esope avec les plumes d'autrui.

Paula s'abaissa jusqu'à un tel point par son extrême humilité, qui est la première des vertus chrétiennes, que des personnes qui ne l'auraient point connue,et que sa grande réputation aurait portées à désirer de la voir, n'auraient jamais cru que ce fût elle et l'auraient prise pour la moindre de ses servantes; car, étant d'ordinaire environnée de grandes troupes de vierges, elle paraissait par ses habits, par ses paroles et par son marcher être la moindre de toutes. Depuis la mort de son mari jusqu'au jour qu'elle rendit son âme à Dieu elle ne mangea jamais avec un seul homme, quelque saint qu'il fût, et quoique élevé à la dignité épiscopale. Elle ne fut aussi jamais aux bains, à moins que de se trouver en danger de sa vie; et elle ne se servait point de matelas, même dans des fièvres très violentes, mais elle reposait sur la terre dure qu'elle couvrait seulement avec des cilices, si l'on peut appeler repos de joindre les nuits aux jours pour les passer en des oraisons presque continuelles , accomplissant ainsi ce que dit David : « J'arroserai toutes les nuits mon lit de mes pleurs : je le tremperai de mes larmes. » Il semblait qu'il y en eût une source dans ses yeux , car elle pleurait de telle sorte pour des fautes très légères qu'on eût estimé qu'elle avait commis les plus grands crimes.

Lorsque nous lui représentions souvent qu'elle devait épargner sa vue et la conserver pour lire l'Écriture sainte, elle nous répondait « Il faut défigurer ce visage que j'ai si souvent peint avec du blanc et du rouge, coutre le commandement de Dieu ; il faut affliger ce corps qui a été dans tant de délices; il faut que des ris et des joies qui ont si longtemps duré soient récompensés par des pleurs continuels; il faut changer en l'âpreté d'un cilice la délicatesse de ce beau linge et la magnificence de ces riches étoffes de soie ; et comme autrefois j'ai pris tant de soin de plaire à mon mari et au monde, je désire maintenant de pouvoir plaire à Jésus-Christ. »

Entre tant et de si grandes vertus il me semble qu'il serait inutile de louer sa chasteté, qui, lors même qu'elle était encore engagée dans le siècle, a servi d'exemple à toutes les dames de Rome, sa conduite avant été telle que les plus médisants même n'ont osé rien inventer pour la blâmer. Il n'y avait point d'esprit au monde plus doux que le sien ni plus rempli d'humanité vers les pauvres. Elle ne cherchait point les personnes élevées en autorité, et elle ne méprisait point avec une aversion dédaigneuse ceux qui avaient de la vanité et de la gloire ; lorsqu'elle rencontrait des pauvres elle leur faisait du lien, et lorsqu'elle voyait des riches elle les exhortait à les assister. Il n'y avait que sa libéralité qui fût excessive ; et, prenant de l'argent à intérêt , elle changeait souvent de créanciers pour conserver son crédit , afin d'être par ce moyen en état de ne refuser l'aumône à personne ; sur quoi je confesse ma faute, en ce que, lui voyant faire des charités avec tant de profusion, je l'en reprenais et lui alléguais le passage de l'Apôtre : « Vous ne devez pas donner en sorte qu'en soulageant les autres vous vous incommodiez vous-même; mais il faut garder quelque mesure afin que, comme maintenant votre abondance supplée à leur nécessité, votre nécessité puisse être un jour soulagée par leur abondance; et qu'ainsi il y ait de l'égalité ; » et cet autre passage de l'Évangile : « Que celui qui a deux robes en donne une à celui qui n'en a point ; » et j'ajoutais qu'elle devait prendre garde à ne se mettre pas dans l'impuissance de pouvoir toujours faire le bien, qu'elle faisait de si bon coeur; à quoi elle me répondait en fort peu de paroles et avec grande modestie, prenant Dieu à témoin qu'elle ne faisait rien que par l'amour qu'elle avait pour lui ; qu'elle souhaitait de mourir en demandant l'aumône , de ne laisser pas un écu à sa fille, et d'être ensevelie dans un drap qui lui fût donné par charité. Enfin elle ajoutait pour dernière raison: « Si j'étais réduite à demander je trouverais plusieurs personnes qui me donneraient ; mais si ce pauvre meurt de faim faute de recevoir de moi ce que je lui puis aisément donner en l'empruntant , à qui est-ce que Dieu demandera compte de sa vie? » Ainsi je désirais qu'elle eût plus de soin de ses affaires domestiques ; mais l'ardeur de sa foi l'unissant tout entière à son Sauveur, elle voit lait être pauvre d'esprit pour suivre Jésus-Christ pauvre, lui rendant ainsi ce qu'elle avait reçu de lui en se réduisant dans l'indigence par l'amour qu'elle lui portait ; en quoi elle obtint enfin ce qu'elle avait désiré, ayant. laissé sa fille chargée de beaucoup de dettes, lesquelles n'ayant pu payer jusqu'ici, elle espère les acquitter un jour, se confiant pour cela, non pas au moyen qu'elle en ait, mais en la miséricorde de Jésus-Christ.

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