LIV.
Des mots isolés soulèvent souvent des questions de même que des associations de mots. Parce qu'il est écrit dans l'Apôtre: « Afin que ce qu'il y a de mortel, » c'est-à-dire la chair, soit dévore par la vie, nos adversaires prennent ce mot pour l'anéantissement de la chair, comme si l'on ne disait pas dévorer sa colère, dévorer son ressentiment, c'est-à-dire le cacher, l'ensevelir et le contenir au fond de nous-mêmes. D'ailleurs les paroles suivantes: « Il faut que ce corps mortel soit revêtu d'immortalité, » prouvent assez comment ce qu'il y a de mortel est dévoré par la vie, en s'enveloppant d'un vêlement d'immortalité qui le le recouvre et le contient, mais non en se consumant dans une destruction complète. |527
Donc la mort aussi, dis-tu, ne laissera pas de subsister, quoique dévorée. Les termes sont communs, il est vrai; mais juge d'après le sens, et tu comprendras comme il faut. Autre chose est la mort, autre chose ce qui est mortel. De là il suit que la mort sera dévorée d'une manière, et ce qui est mortel de l'autre. La mort ne comporte pas l'immortalité; ce qui est mortel l'admet. Enfin il est écrit: « Il est nécessaire que ce corps mortel revête l'immortalité. » Comment donc la reçoit-il? « Parce qu'il est dévoré par la vie. » Comment est-il dévoré par la vie? Lorsqu'il est reçu, réduit et enfermé dans elle-même. Au reste, c'est avec justice que la mort est dévorée pour ne plus subsister, parce qu'elle-même ne dévore que pour anéantir. « La mort, en triomphant, a dévoré; voilà pourquoi elle a été dévorée elle-même dans la lutte.----O mort, où est ton aiguillon? ô mort, où est la victoire? » Conséquemment la vie qui est l'antagoniste de la mort, absorbera dans cette lutte, pour le sauver, ce que la mort avait absorbé dans la lutte pour le détruire.