CHAPITRE XXIX : NICOLAS ET CEUX AUXQUELS IL A DONNÉ SON NOM
[1] En ce temps-là, naquit aussi l'hérésie dite des Nicolaïtes, qui dura très peu et dont il est question dans l'Apocalypse de Jean. Ses adeptes pré tendent que Nicolas était un des diacres, compagnons d'Etienne, choisis par les apôtres pour le service des pauvres. Voici, du moins, ce que raconte de lui en propres termes Clément d'Alexandrie au troisième livre de ses Stromates :
« [2] II avait, dit-on, une femme dans l'éclat de sa jeunesse. Après l'ascension du Sauveur, les apôtres lui reprochèrent d'en être jaloux : alors Nicolas l'amena et l'abandonna à qui la voudrait épouser. On dit que cette conduite était en effet conforme à la maxime qu'il faut faire peu de cas de la chair. Ceux qui adoptent son hérésie suivent, simplement, sans examen, cet exemple et ce principe, et ils se laissent aller à une honteuse prostitution.1 [3] Pour moi, je crois que jamais Nicolas n'eut d'autre femme .que celle qu'il avait épousée ; quant à ses enfants, ses filles vécurent vierges et son fils garda la chasteté. Les choses étant ainsi, cet abandon en présence des apôtres de sa femme, qui était un objet de jalousie, fut un renoncement à la passion, et cette continence en ce qui regarde les joies les plus 323 recherchées enseigna à faire peu de cas de la chair. Car il ne me semble pas qu'il voulut, selon la défense du Christ, « servir deux maîtres », le plaisir et le Seigneur. [4] On prétend aussi que Matthias enseignait ainsi à combattre la chair, à en faire peu de cas, et à ne rien lui accorder qui puisse la flatter, mais à grandir plutôt son âme par la foi et la science. »
Voilà ce qui concerne ceux qui ont essayé, en ces temps-là, de fausser la vérité. Ils ont complètement disparu, plus vite qu'on ne peut le dire.
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παραχᾶσθαι τῇ σαρκί : la maxime est équivoque ; dans HERMAS, Sim., V, vii, 2, elle est prise dans un sens défavorable. ↩