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Œuvres Jean Chrysostome (344-407) In Matthaeum homiliae I-XC Commentaire sur l'Evangile selon Saint Matthieu
HOMÉLIE XVI

6.

Demandons maintenant à ceux qui rejettent l’ancienne loi, si le commandement de ne se point mettre en colère est contraire à celui de ne point tuer; et s’il n’en est pas plutôt la perfection et comme le couronnement. N’est-il pas visible que l’un est l’accomplissement de l’autre et qu’ainsi il est plus grand? Celui qui s’abstient de la colère s'abstiendra bien plus aisément de l’homicide; et celui qui étouffe dans son coeur tous les mouvements d’indignation, arrêtera bien plus aisément ses mains pour leur interdire toute violence. La colère est la racine de l’homicide. Celui qui coupe cette racine en coupera facilement toutes les branches, ou plutôt il ne les laissera pas même pousser. Ainsi Jésus-Christ ne donnait point ces nouveaux préceptes pour détruire la loi; mais pour la faire observer plus parfaitement. Car quel est le but de la loi? N’est-ce pas d’empêcher l’homicide? Il eût donc fallu pour être contraire à la loi commander le meurtre, puisque tuer, et ne pas tuer, sont les deux contraires. Mais lorsqu’il ne permet pas même qu’on se mette en colère, il est visible qu’il tend au même but où la loi tendait, mais qu’il le fait plus parfaitement. Celui qui ne pense qu’à ne point tuer, n’aura jamais tant d’aversion de l’homicide que celui qui veut étouffer même la colère; et ce dernier est sans comparaison plus éloigné de tomber dans le crime que n’est le premier.

Mais, pour mieux combattre ces hérétiques, voyons tout ce qu’ils nous disent : Le Dieu, disent-ils, qui a créé le monde, « qui fait lever le soleil sur les bons et sur les méchants, et pleuvoir sur les justes et sur les injustes (Matth. V, 45), » est un esprit mauvais. Il est vrai que les moins emportés d’entre eux ont horreur de cette impiété; et qu’ils se contentent de dire que ce Dieu peut être juste; mais (132) qu’il ne peut pas être bon. Ils feignent ensuite un autre Dieu qui ne fut jamais et qui ne créa jamais rien, qu’ils disent être le Père de Jésus-Christ. Celui qu’ils nient être bon, demeure selon eux dans ce qu’il a créé, comme dans un bien qui lui appartient et qu’il conserve; et l’autre à qui ils donnent le nom de bon, vient tout d’un coup usurper l’héritage de l’autre, et entreprend d’être le Sauveur de ceux dont il n’est pas le Créateur. Voyez-vous. les fils du démon, comme ils puisent leur langage à la source de leur père, puisqu’ils ôtent à Dieu la création qui lui est propre, quoique saint Jean crie: « Il est venu dans son domaine « et le monde a été fait par lui ? » (Jean, I, 11.)

Ils examinent ensuite l’ancienne loi qui dit: « Oeil pour oeil, et dent pour dent. » Ils s’emportent contre ces paroles et demandent comment celui qui les a dites, a pu être bon. Que répondrons-nous à cela, sinon que ces préceptes sont en effet pleins de bonté? Car le législateur n’ordonne pas cela afin que nous nous entr’arrachions les yeux, mais afin que la crainte de souffrir ce mal, nous empêche de le faire aux autres. Comme lorsqu’il a menacé les Ninivites de renverser leur ville, il n’avait pas résolu de le faire, puisque, pour l’exécuter, il n’avait qu’à les punir sans les menacer,-mais il voulait seulement les effrayer, afin que par leur pénitence ils apaisassent sa colère. De même-ici, par cette perte d’un oeil dont il menace ceux qui arracheraient celui de leur frère, il veut retenir par le frein de la crainte ceux qui ne se laisseraient pas gouverner à la raison et à l’humanité. Il faudrait donc avoir perdu l’esprit et être furieux, pour dire qu’il y a de la cruauté à arrêter l’homicide , et à réprimer l’adultère.

Pour moi je suis si éloigné de trouver qu’il y ait de la cruauté dans cette loi, que je trouverais de l’injustice dans la disposition contraire. Vous dites que Dieu est cruel, parce qu’il commande d’arracher oeil pour oeil, et moi je vous dis que, s’il n’avait fait ce précepte, plusieurs auraient dit de lui ce que vous en dites. Car supposons que toute la loi soit détruite, que personne n’ait plus rien à craindre de ses châtiments, qu’il soit libre à tous les méchants de satisfaire sans crainte leurs passions; qu’ils pussent voler, tuer, être parjures, être adultères et parricides; n’est-il pas vrai que tout serait dans une confusion étrange, et que toutes les places, toutes les villes, toute la terre et la mer seraient remplies de meurtres et de toutes sortes de crimes? Si lors même que les lois sont en vigueur, et qu’elles répandent la terreur et les menaces, les méchantes âmes ont peine à se réprimer; que serait-ce sans ce secours, et qui pourrait arrêter leurs excès? Avec quelle insolence ne se déchaîneraient-elles pas contre nos personnes et contre nos vies?

Mais il n’y aurait pas seulement de la cruauté à permettre aux méchants tout ce qu’il leur plairait de faire; il n’y en aurait pas moins à négliger celui qui, sans faire aucun tort, aurait été injustement outragé par les autres. Si quelqu’un assemblait tout ce qu’il pourrait trouver de libertins et d’assassins, qu’il leur mit les armes à la main, et leur commandât de tuer dans toute la ville ce qui se présenterait à eux, cet homme ne passerait-il pas pour un monstre en cruauté et en barbarie? Et si quelque autre au contraire liait toutes ces personnes que ce furieux aurait armées, et délivrait de leurs mains ceux qu’ils allaient égorger, cet homme ne passerait-il pas pour un conservateur de la paix et de la sûreté publique? Appliquez cet exemple à notre sujet. Celui qui commande de donner oeil pour oeil, retient comme par de fortes chaînes la violence des méchants, et est semblable à celui qui arrêterait ces furieux à qui l’on aurait donné des armes; et celui qui n’établissant aucune peine, met par cette impunité comme les armes aux mains de tout le monde, imite celui qui assemblerait ces libertins, et les armerait pour mettre à feu et à sang toute la ville.

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