LXIII - VIERGE QUI ACCUEILLIT LE BIENHEUREUX ATHANASE
[1] A Alexandrie, j'ai connu une vierge que j'ai rencontrée d'environ soixante-dix ans. Or tout le clergé témoignait qu'étant jeune, environ à vingt ans et fort excellemment belle, elle était à éviter à cause de sa beauté, afin qu'elle ne donnât à personne sujet de blâme par suite de soupçon. Quoi qu'il en soit, lorsqu'il arriva que les Ariens conspirèrent contre le bienheureux Athanase, évoque d'Alexandrie, au moyen d'Eusèbe le préposé, sous l'empereur Constance, et lorsqu'ils l'accusaient injustement par leurs calomnies, évitant d'être jugé par un tribunal corrompu, il ne se confia à personne, ni parent, ni ami, ni clerc, ni un autre. [2] Mais les envoyés du préfet étant entrés soudain dans l'évêché et le cherchant, il prit sa tunique et sa casaque et, au beau milieu de la nuit, il s'enfuit chez cette vierge. Or déconcertée à cause de la chose, elle fut tout à fait effrayée. Alors il lui dit : « Comme je suis cherché par les Ariens et dénoncé injustement, en conséquence pour ne pas remporter moi-même une réputation déraisonnable et jeter dans un péché ceux qui veulent me punir, je me suis mis dans l'idée de fuir. [3] Puis Dieu m'a révélé cette nuit ceci : Tu n'as à être sauvé chez personne, sinon chez celle-là. » Elle donc, dans une joie considérable, ayant rejeté toute discussion, se lit toute entière au Seigneur ; elle cacha ce très saint pendant six ans, la vie durant de Constance : elle lavait ses pieds, faisait le service des sécrétions, pourvoyait à tous ses besoins, empruntait des livres et les lui procurait. Et personne parmi les hommes d'Alexandrie entière ne sut dans les six ans où passait son temps le bienheureux Athanase. Or dès que la mort de Constance fut annoncée et qu'elle parvint à ses oreilles, s'étant bien habillé de nouveau dans la nuit, il fut trouvé dans l'église, et tous furent hors d'eux-mêmes, et le contemplèrent comme un vivant d'entre les morts. Alors il se justifiait de la sorte à ses amis sincères : « C'est pour ceci que je ne me suis pas réfugié vers vous, afin qu'il vous fût facile de faire serment et d'autre part aussi à cause des perquisitions. Et je me suis réfugié vers celle sur laquelle personne ne pouvait avoir de soupçon, parce que belle et assez jeune. J'ai recherché deux choses : et son salut, car je lui ai été utile, et ma réputation. »