Edition
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Adversus Hermogenem
VIII.
[1] Atquin etiam praeponit illam deo et deum potius subicit materiae, cum uult eum de materia cuncta fecisse. Si enim ex illa usus est ad opera mundi, iam et materia superior inuenitur, quae illi copiam operandi subministrauit, et deus subiectus materiae uidetur, cuius substantiae eguit. Nemo enim non eget eo de cuius utitur; nemo non subicitur ei de cuius eget ut possit uti: sic et nemo de alieno utendo non minor est eo de cuius utitur, et nemo qui praestat de suo uti non in hoc superior est eo cui praestat uti. Itaque materia ipsa quidem deo non eguit sed egenti se deo praestitit diuitem et locupletem et liberalem minori, opinor, et inualido et minus idoneo de nihilo facere quae uelit. [2] Grande re uera beneficium deo contulit, ut haberet hodie per quae deus cognosceretur et omnipotens uocaretur, nisi quod iam non omnipotens, si non et hoc potens: ex nihilo omnia proferre. [3] Sane et sibi praestitit aliquid materia, ut et ipsa cum deo possit agnosci, coaequalis deo, immo et adiutrix, nisi quod solus eam Hermogenes cognouit et haereticorum patriarchae philosophi; prophetis enim et apostolis usque adhuc latuit, puto et Christo.
Traduction
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Contre Hermogène
VIII.
Il y a mieux; il l'élève au-dessus de Dieu lui-même, et c'est Dieu plutôt qu'il asservit à la Matière, lorsqu'il veut que Dieu ait tout produit à l'aide de la Matière. Si en effet il s'en servit pour créer l'univers, voilà que la matière lui est supérieure, puisqu'elle lui fournit les éléments de son œuvre, et Dieu est soumis à la Matière, puisqu'il a eu besoin de sa substance. Personne, en effet, qui n'ait besoin de la chose qu'il emploie; personne qui ne soit soumis à la chose dont il a besoin pour pouvoir s'en servir; conséquemment personne qui, en se servant d'un bien étranger, ne soit inférieur à celui dont il emploie la chose. Personne enfin qui, en accordant, à un autre d'user de ce qui lui appartient, ne soit par là même supérieur à celui qu'il investit de ce droit. Il suit de là que la Matière n'a point eu besoin de Dieu, mais qu'à ce Dieu qui avait besoin d'elle, elle s'est montrée riche, libérale, magnifique, parce qu'il était inférieur à elle, j'imagine, condamné à la faiblesse, et inhabile à créer de rien ce qu'il voulait. Grand et signalé service qu'elle rendit à Dieu! Par elle, il a eu de quoi faire reconnaître aujourd'hui sa divinité, et proclamer sa toute-puissance, excepté toutefois qu'il n'est pas tout-puissant, s'il n'a point la puissance de tirer du néant toutes choses! Toujours est-il que la Matière a gagné par là d'être reconnue la contemporaine et l'égale de Dieu, ou, pour mieux dire, sa protectrice, à moins cependant qu'elle ne soit connue comme telle que d'Hermogène et des philosophes, qui sont les patriarches des hérétiques. Car elle est encore cachée pour les prophètes, pour les Apôtres, et j'imagine aussi pour Jésus-Christ.