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Lorsque cette étude aura renouvelé notre coeur, la sainte Écriture commencera à nous apparaître sous une autre face, et sa beauté augmentera, à mesure que nous ferons des progrès; car la sainte Écriture est comprise de chacun selon les dispositions où il se trouve. Elle paraît terrestre aux charnels et divine aux spirituels ; de sorte que ceux qui la voyaient d'abord enveloppée d'obscurité profonde, ne peuvent ensuite en admirer assez l'éclat et en supporter la lumière.
Pour mieux le comprendre, choisissons, comme exemple, un commandement de la loi qui nous montrera que tous les préceptes divins peuvent s'appliquer de plusieurs manières, selon la mesure de nos âmes. Il est écrit dans la loi : a Vous ne commettrez pas de fornication. » (Exod., XX, 14.) L'homme charnel, encore sujet à des passions honteuses, obéira utilement à la simple lettre de ce commandement; mais celui qui se sera déjà dégagé de cette boue impure, devra l'observer d'une manière plus spirituelle. Non-seulement il s'éloignera du culte des idoles, mais il évitera toutes les superstitions des gentils, l'interprétation des augures, des signes, des jours et des moments, les conjectures qu'on tire des paroles et des noms, et qui souillent la pureté de notre foi. C'est de cette fornication que Jérusalem était coupable , lorsque le Prophète lui reproche d'avoir péché sur les collines élevées et à l'ombre des bois (Jérém., III, 1); et Dieu la reprend encore ainsi par son Prophète : « Qu'ils viennent maintenant et qu'ils te sauvent, ces augures du ciel qui considèrent les astres et qui calculent les mois pour t'annoncer les choses à venir. » (Isaïe, XLVII, 13.) Le Seigneur parle ailleurs de cette fornication lorsqu'il dit : « L'esprit de fornication les a trompés, et ils se sont éloignés de leur Dieu. » (Osée, IV, 12.)
Celui qui se sera éloigné de ces deux fornications, en évitera une troisième, qui consiste dans les superstitions des Juifs, dont l'Apôtre dit : Vous observez les jours, les mois, les saisons et les années» (Gal., IV, 10) ; et encore : a On vous dit : Ne touchez pas à cela, n'y goûtez pas, ne vous en servez pas. » (Col., II, 21.) Il est certain qu'il s'agit dans ce texte des superstitions de la loi, et que celui qui les suit, se sépare du Christ et n'est pas digne d'entendre cette parole de l'Apôtre : a Je vous ai fiancés à un seul pour vous présenter au Christ comme une chaste vierge. » (II Cor., XI, 2.) Il devra plutôt prendre pour lui cette parole du même Apôtre : « Je crains pour vous que, comme le serpent a séduit Ève par sa malice, vos esprits ne soient corrompus et détournés de la simplicité qui est dans le Christ Jésus.» (Ibid., 3.)
Celui qui aura évité la souillure de cette fornication devra se préserver de la quatrième , qui est l'adultère de l'hérésie, dont l'Apôtre a dit : « Je sais qu'après mon départ, il viendra parmi vous des loups dévorants qui n'épargneront pas le troupeau, et qu'il s'élèvera, de votre sein même, des hommes qui diront des mensonges pour s'attirer des disciples. » (Act., XX, 29.)
Celui qui pourra échapper à ces fautes devra craindre une fornication plus subtile, qui consiste dans la légèreté et l'égarement des pensées ; car toute pensée non-seulement déshonnête, mais encore oiseuse qui éloigne de Dieu , est pour l'homme parfait une fornication très-coupable.