21.
On rapporte que le bienheureux Évangéliste saint Jean caressait doucement une perdrix, lorsqu'il fut aperçu par un chasseur. Cet homme s'étonna qu'un personnage d'un si grand mérite pût se plaire à une chose si petite et si basse. « N'êtes-vous pas , lui dit-il, ce Jean dont la réputation est si grande, le nom si célèbre et que j'ai tant désiré connaître? Comment vous livrez-vous à un pareil amusement? — Mon ami, lui dit l'Apôtre, que tenez-vous à votre main? — Un arc, lui répondit le chasseur. — Et pourquoi ne le portez-vous pas toujours tendu? — Il ne le faut pas ; car, s'il était toujours tendu, il perdrait sa puissance, et lorsque je voudrais lancer quelques flèches sur une bête sauvage, elles n'auraient plus de force pour l'atteindre. — Ne vous étonnez donc pas, jeune homme, répliqua l'Apôtre, de ce petit et court délassement. Si notre esprit était toujours tendu, il s'affaiblirait aussi par cette contrainte et il ne pourrait plus nous servir, quand il faudrait l'employer de nouveau avec plus de vigueur.