21.
L’empereur Valens était occupé contre les Perses, lorsqu’il reçut cette fâcheuse nouvelle. Il partit incontinent d’Antioche pour se rendre à Constantinople, et pour aller de là en Thrace combattre ces Scythes fugitifs et infidèles. Comme l’armée commençait à marcher, elle rencontra un prodige: c’était un corps immobile couché le long du chemin, qui paraissait brisé de coups, depuis la tête jusqu’aux pieds, mais qui avait les yeux ouverts, et qui regardait ceux qui s’approchaient de lui. Plusieurs lui ayant demandé qui il était, et qui l’avait traité de la sorte, il ne répondit rien, ce qui leur ayant semblé fort étrange, ils le montrèrent à l’empereur qui lui fit les mêmes demandes, sans pouvoir tirer de réponse. On ne pouvait croire, ni qu’il eût un reste de vie, parce qu’il était sans mouvement, ni qu’il fût mort, parce qu’il avait l’usage des yeux. Enfin il disparut tout d’un coup, et laissa les assistants dans l’étonnement. Ceux qui savent ce que ces prodiges signifient, s’imaginèrent que c’était une image de l’état pitoyable où l’empire allait être réduit, jusqu’à ce qu’il périt par la méchante administration des princes. On ne reconnaîtra que trop que cette conjecture était véritable, quand on prendra la peine d’examiner attentivement ce qui arriva depuis.