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Histoire ecclésiastique
CHAPITRE XVII : DES MARTYRS QUE MENTIONNE JUSTIN DANS SON OUVRAGE
[1] Le même Justin avant son propre combat fait mention dans sa première apologie d'autres chrétiens qui ont souffert le martyre. Il fait aussi ce récit qui est utile à notre sujet ; voici ce qu'il écrit (voy. Y Appendice) :1
« [2] Une femme vivait avec un mari licencieux ; elle avait été licencieuse elle-même autrefois. Quand elle eut connu les enseignements du Christ, elle s'assagit et elle essaya de persuader aussi à son mari de l'imiter. Elle lui exposa les enseignements qu'elle avait reçus et lui représenta le châtiment futur du feu éternel dont sont menacés ceux qui ne vivent pas selon la pureté et la droite raison. [3] Celui-ci demeura dans les mêmes débauches et par ses pratiques s'aliéna l'esprit de la femme. Celle-ci pensa en effet que c'était une impiété de continuer à partager la couche d'un homme toujours en quête de voluptés réprouvées par la loi naturelle et par la justice, et elle résolut de le quitter. [4] Ses proches la supplièrent et lui conseillèrent de patienter dans l'espoir d'un changement chez son mari : elle se fit violence et resta. [5] Cependant son mari partit pour Alexandrie et elle apprit qu'il se conduisait plus mal encore. Aussi bien pour ne pas devenir complice de ses crimes 445 et de ses infamies en continuant à vivre avec lui, à s'asseoir à sa table et à partager sa couche, elle lui donna ce que vous appelez le repudium et se sépara de lui. [6] Ce bonhomme aurait dû se réjouir de ce que sa femme, qui se plaisait autrefois à se livrer sans retenue au vin et à toutes sortes de désordres avec les serviteurs elles mercenaires, avait renoncé à une telle conduite ; il aurait dû être bien aise de ce qu'elle voulait le voir cesser lui aussi ces pratiques. Mais comme elle l'avait quitté malgré lui, il porta contre elle une accusation, disant qu'elle était chrétienne. [7] Elle te présenta une requête à toi, empereur, et elle exprima le désir qu'il lui fût accordé préalablement d'arranger ses affaires, promettant que celles-ci une fois terminées, elle viendrait répondre à l'accusation, et tu y consentis.
« [8] Son mari n'avait alors plus rien à lui dire pour le moment. Il se tourna contre un certain Ptolémée, qu'Urbicius condamna, parce qu'il avait été le maître de cette femme dans la doctrine des chrétiens ; voici comment. [9] Le débauché persuada à un centurion de ses amis de jeter en prison Ptolémée (voy. l'Appendice), de s'en emparer et de lui demander seulement s'il était chrétien. Ptolémée, par amour de la vérité, par répugnance de l'équivoque et du mensonge, confessa qu'il l'était. Le centurion le mit dans les fers et le fit longtemps souffrir en prison. [10] Enfin, le captif fut conduit auprès d'Urbicius qui pareillement lui posa la même et unique question, à savoir, s'il était chrétien. Celui-ci de nouveau, persuadé qu'il était redevable des biens qui étaient en lui 447 à la doctrine du Christ, confessa l'école de la vertu divine. [11] Celui qui nie quelque chose, le fait, ou bien pour condamner ce qu'il nie, ou bien sachant qu'il en est indigne et qu'il y est étranger, pour éviter de rendre témoignage. Rien de ceci ne convient à un vrai chrétien. [12] Urbicius ordonna qu'on emmenât Ptolémée au supplice. Un certain Lucius, lui aussi chrétien, voyant une sentence aussi déraisonnablement prononcée, dit à Urbicius : « Quel est le grief? Cet homme n'est convaincu ni d'adultère, ni de débauche, ni d'homicide, ni de pillage, ni de vol, ni en un mot d'une injustice quelconque. Il avoue seulement porter le nom de chrétien et tu le unis. Urbicius, tu ne juges pas selon les intentions de l'empereur Antonin le Pieux, ni du philosophe, fils de César, ni du sacré Sénat. » [13] Urbicius, sans répondre autre chose à Lucius, lui dit : « Toi aussi me « parais être chrétien ». Celui-ci répliqua : « Parfaitement. » Le préfet commanda qu'on le conduisît lui aussi à la mort. Le condamné répliqua qu'il lui en savait gré, parce qu'il allait quitter des maîtres très méchants pour se rendre auprès de Dieu qui est un bon père et un bon roi. Un troisième survint, qui fut aussi condamné avec eux.»2
A cela, Justin ajoute avec raison et comme conclusion (voy. l'Appendice) les paroles rappelées plus haut: « Et moi aussi je m'attends à des embûches de la part de quelqu'un de ceux qui portent le nom de philosophe, etc. »
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Voy, l'éd. citée des Apologies, p. xv. et, sur la citation qui suit, p. xxxv. M. Schwartz considère comme des interpolations antérieures à Eusèbe. 8, ὃν... ἐκολάσατο (omis par Rufin) : 9, εἴς... Πτολεμαῖον (omis par Rufin): 13. ἐπεῖπεν (et aussi γινώσκων que donne à la place le ms. de Justin). Le préfet s'appelait Q. LolliusUrbicus (non Urbicius). - ↩
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τούτοις... ἀκολούθως, sur la portée donnée à ces mois par les éditeurs de Justin, voy. l'éd. citée, p. xxxv. ↩
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The Church History of Eusebius
Chapter XVII.--The Martyrs whom Justin mentions in his Own Work.
1. The same man, before his conflict, mentions in his first Apology 1 others that suffered martyrdom before him, and most fittingly records the following events.
2. He writes thus: 2 "A certain woman lived with a dissolute husband; she herself, too, having formerly been of the same character. But when she came to the knowledge of the teachings of Christ, she became temperate, and endeavored to persuade her husband likewise to be temperate, repeating the teachings, and declaring the punishment in eternal fire which shall come upon those who do not live temperately and conformably to right reason.
3. But he, continuing in the same excesses, alienated his wife by his conduct. For she finally, thinking it wrong to live as a wife with a man who, contrary to the law of nature and right, sought every possible means of pleasure, desired to be divorced from him.
4. And when she was earnestly entreated by her friends, who counseled her still to remain with him, on the ground that her husband might some time give hope of amendment, she did violence to herself and remained.
5. But when her husband had gone to Alexandria, and was reported to be conducting himself still worse, she--in order that she might not, by continuing in wedlock, and by sharing his board and bed, become a partaker in his lawlessness and impiety--gave him what we 3 call a bill of divorce and left him.
6. But her noble and excellent husband,--instead of rejoicing, as he ought to have done, that she had given up those actions which she had formerly recklessly committed with the servants and hirelings, when she delighted in drunkenness and in every vice, and that she desired him likewise to give them up,--when she had gone from him contrary to his wish, brought an accusation concerning her, declaring that she was a Christian.
7. And she petitioned you, the emperor, that she might be permitted first to set her affairs in order, and afterwards, after the settlement of her affairs, to make her defense against the accusation. And this you granted.
8. But he who had once been her husband, being no longer able to prosecute her, directed his attacks against a certain Ptolemaeus, 4 who had been her teacher in the doctrines of Christianity, and whom Urbicius 5 had punished. Against him he proceeded in the following manner:
9. "He persuaded a centurion who was his friend to cast Ptolemaeus into prison, and to take him and ask him this only: whether he were a Christian? And when Ptolemaeus, who was a lover of truth, and not of a deceitful and false disposition, confessed that he was a Christian, the centurion bound him and punished him for a long time in the prison.
10. And finally, when the man was brought before Urbicius he was likewise asked this question only: whether he were a Christian? And again, conscious of the benefits which he enjoyed through the teaching of Christ, he confessed his schooling in divine virtue.
11. For whoever denies that he is a Christian, either denies because he despises Christianity, or he avoids confession because he is conscious that he is unworthy and an alien to it; neither of which is the case with the true Christian.
12. And when Urbicius commanded that he be led away to punishment, a certain Lucius, 6 who was also a Christian, seeing judgment so unjustly passed, said to Urbicius, Why have you punished this man who is not an adulterer, nor a fornicator, nor a murderer, nor a thief, nor a robber, nor has been convicted of committing any crime at all, but has confessed that he bears the name of Christian? You do not judge, O Urbicius, in a manner befitting the Emperor Pius, or the philosophical son 7 of Caesar, or the sacred senate.'
13. And without making any other reply, he said to Lucius, Thou also seemest to me to be such an one.' And when Lucius said, Certainly,' he again commanded that he too should be led away to punishment. But he professed his thanks, for he was liberated, he added, from such wicked rulers and was going to the good Father and King, God. And still a third having come forward was condemned to be punished."
14. To this, Justin fittingly and consistently adds the words which we quoted above, 8 saying, "I, too, therefore expect to be plotted against by some one of those whom I have named," &c. 9
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Eusebius in this chapter quotes what we now know as Justin's second Apology, calling it his first. It is plain that the two were but one to him. See chap. 18, note 3. ↩
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Justin, Apol. II. 2. ↩
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Our authorities are divided between hemin and humin, but I have followed Heinichen in adopting the former, which has much stronger ms. support, and which is in itself at least as natural as the latter. ↩
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Of this Ptolemaeus we know only what is told us here. Tillemont, Ruinart, and others have fixed the date of his martyrdom as 166, or thereabouts. But inasmuch as the second Apology is now commonly regarded as an appendix to, or as a part of, the first, and was at any rate written during the reign of Antoninus Pius, the martyrdom of Ptolemaeus must have taken place considerably earlier than the date indicated, in fact in all probability as early as 152 (at about which time the Apology was probably written). We learn from the opening of the second Apology that the martyrdoms which are recorded in the second chapter, and the account of which Eusebius here quotes, happened very shortly before the composition of the Apology (chthes de kai proen, "yesterday and the day before"). ↩
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'Ourbikios, as all the mss. of Eusebius give the name. In Justin the form 'Ourbikos occurs, which is a direct transcription of the Latin Urbicus. ↩
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Of this Lucius we know only what is told us here. ↩
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Marcus Aurelius. See above, chap. 12, note 2. ↩
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In chap. 16, §3. ↩
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Justin, Apol. II. 3. These words, in Justin's Apology, follow immediately the long account quoted just above. ↩