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Œuvres Jean Chrysostome (344-407) Quod regulares feminae viris cohabitare non debeant Les vierges vouées à Dieu ne doivent pas cohabiter avec des hommes

6.

Le genre humain, presque tout entier, est avide de vaine gloire ; cela est vrai surtout pour les femmes. Cette cohabitation n'ayant pour objet ni l'utilité, je l'ai démontré, ni le plaisir des sens, il est évident qu'on ne peut plus supposer qu'un seul motif pour expliquer une telle conduite. Voilà donc la racine du mal, la vaine gloire : Laissons tout le reste de côté, seulement cherchons à leur prouver (et puissions-nous réussir) que leur sort est le même que celui des hommes. Les hommes, en habitant avec des vierges, paraissent, à la vérité, jouir d'un certain plaisir; mais, au fond, leur vie n'est qu'un supplice perpétuel: la pure et véritable satisfaction n'arrivera qu'avec la séparation et la retraite. De leur côté, les vierges s'imaginent que cette cohabitation fera rejaillir sur elles un certain éclat; mais pour l'oeil observateur, de combien de ridicule, de honte, d'opprobre et d'ignominie n'est-elle pas la source? J'ai déjà dit un mot là-dessus en commençant, parlons-en encore. Je suppose que l'homme qui habite avec vous rie soit pas vil et méprisable, mais qu'il soit revêtu d'une grande dignité dans l'Eglise, et que par l'éclat de sa naissance, son savoir et sa piété, il fasse l'admiration de tous , étant vraiment remarquable sous tout rapport, eh bien ! cet homme, même dans de pareilles conditions, ne pourra vous rendre illustre et recommandable. Quand nous voulons tirer gloire de l'amitié de quelqu'un, nous devons d'abord sauvegarder l'honneur de cette personne, car si elle perd son honneur, comment le partagera-t-elle avec nous? ou plutôt comment son déshonneur ne deviendra-t-il pas le nôtre? Ainsi, quand une source est empoisonnée, le courant formé par elle est empoisonné lui-même; quand la racine d'un arbre est gâtée, les fruits n'en sont pas sains quand l'homme qui doit illustrer une vierge du reflet de sa gloire devient lui-même ridicule et méprisable, précisément parce qu'il habite avec elle, cette vierge tombe elle-même dans le ridicule et le mépris avant lui et avec lui. Ainsi, une femme jouissait d'une bonne réputation, mais voilà qu'un homme met-le pied chez elle, loin d'apporter une nouvelle gloire dans la maison, il en chasse la bonne réputation. Il en est de même pour l'homme s'il jouit de l'estime générale, elle le quitte aussitôt qu'il entre chez vous. Cette cohabitation ne vous procure donc pas une bonne renommée , loin de là , elle vous enlève celle dont vous jouissiez et vous en apporte une mauvaise que vous n'aviez pas; et l'on peut dire ici ce que le Prophète disait des Juifs : Si jamais l'éthiopien perd sa couleur, le léopard changera aussi sa robe tachetée (Jér. XIII, 23), et l'on verra aussi les vierges qui habitent avec des hommes se laver de la tache qui les déshonore. C'est comme un chancre qui ronge leur réputation, et dévore leurs vertus.

Peut-être s'imaginent-elles qu'il est glorieux de commander à des hommes : vanité ridicule, qui convient bien et qui ne convient qu'aux courtisanes. Des femmes honnêtes et chastes ne mettront jamais leurs jouissances à tendre ainsi des piéges , d'autant plus que je trouve encore là une nouvelle ignominie, plus elles exercent d'empire sur les hommes, plus elles leur imposent de lourds fardeaux et plus elles s'ensevelissent avec eux dans une honte profonde. La femme que tous honorent, la femme vraiment considérée, n'est pas celle qui fait de l'homme un esclave, ruais celle qui le respecte. Au reste, si elles ne peuvent supporter nos paroles, la parole de Dieu est là pour les réduire au silence : C'est vers ton époux que tu dois porter ton cœur, et lui aura l'empire sur toi, car le chef de la femme, c'est l'homme. (Gen. III, 16; 1 Cor, II, 3.) Dans une foule de passages vous pouvez vérifier les prescriptions de la loi : tel est l'ordre établi dès l'origine aussi est-ce un désordre hideux que de voir en haut ce qui doit être en bas, la tête en bas et le corps en haut. Si un tel renversement est honteux dans l'état du mariage, il le deviendra bien davantage encore dans cette cohabitation, où la gravité du péché vient de ce que non-seulement la loi divine est violée, mais de ce que la flétrissure d'une mauvaise réputation est imprimée au front et de l'homme et de la femme. Habiter avec un homme, c'est une honte; le dominer est une honte plus grande encore. La gloire ne consiste pas à commander en tout et partout, il peut fort bien arriver que la gloire soit du côté de celui qui obéit, et la honte le partage de celui qui commande.

Si donc vous voulez jouir d'une véritable gloire auprès des hommes, qu'il n'y ait rien de commun entre eux et vous; arrière toute fréquentation, tout regard, toute cohabitation alors et les femmes et les hommes vous admireront et respecteront en vous une vierge assise près de l'Epoux, comme une compagne inséparable : alors non-seulement les chrétiens nos frères, mais même les païens et les juifs, et tous les hommes approuveront votre conduite. Aimez-vous la gloire? suivez cette route, rien que cette route : alors on dira que vous appartenez non à tel ou tel, mais au Christ; est-il pour vous un honneur comparable à celui-là? Dites-le-moi , quelles louanges plus dignes d'envie que celles qui retentissent sur le forum, dans les maisons, ici et même dans les autres villes : « Telle jeune personne dans la fleur de l'âge et dans tout l'éclat de la beauté n'avait qu'à vouloir, et de brillants partis assuraient son sort; elle n'a pas voulu elle a mieux aimé tout endurer, tout souffrir que de renoncer à l'amour du Christ et de voir se ternir la fleur de sa virginité. Ah! qu'elle est heureuse, oui mille et mille fois heureuse ! Quels biens sont mis en réserve pour elle, que sa couronne sera brillante, quelle grande récompense elle recevra, elle qui le dispute pour la pureté avec les purs esprits! » Voilà ce que l'on dira et davantage encore, et les mères la proposeront pour modèle à leurs filles. Quand on voudra encourager celles qui vivent dans la chasteté et ramener dans le sentier de la vertu celles qui s'en écartent, on répétera ces éloges, on les répétera toutes les fois qu'on parlera de la virginité, et elle sera louée par ceux qui vivent dans la chasteté comme par ceux qui ont fait tous leurs efforts pour obtenir sa main et qui ont été dédaignés et refusés.

Telle et mille fois plus belle sera sa gloire. Mais il en arrivera tout autrement pour celle qui demeure avec des hommes. D'abord lorsque, dans les cercles des hommes débauchés, on censure la virginité, on parle nécessaire ment de ces deux sortes de -vierges; et la première prête des armes à ceux qui défendent la vertu et la seconde à ceux qui l'attaquent. De plus, quand il s'agit de corriger une personne et de l'amener à conformer sa conduite à la règle de la bienséance, la première est citée comme un remède opposé aux mauvaises passions et comme un préservatif contre la corruption du vice : son nom est le plus bel ornement des discours de celui qui prêche la vertu. Mais la seconde est pour ainsi dire placée sur la sellette avec la personne qui reçoit la réprimande : bien qu'éloignée pour le moment, on lui reproche sa honte et son déshonneur. A-t-on une chute à déplorer, il faut qu'elle en partage l'accusation et la honte avec celle qui a failli. Chaque fois qu'une conversation s'engage sur cette matière, autant le bonheur de l'une est porté aux nues, autant la misère de l'autre est traînée dans la boue. Tout le monde fait l'éloge et célèbre la vertu de la première, ceux qui la connaissent, comme les étrangers qu'elle n'a jamais édifiés par le spectacle de sa vie sainte. C'est le contraire pour l'autre : qu'on la connaisse ou qu'on ne la connaisse pas; qu'on ait eu à s'en plaindre ou non , partout on la flétrit , partout on la condamne. La louange et l'admiration ne manquent jamais à ceux qui vivent bien : elles leur sont prodiguées par leurs amis, par les étrangers et même par leurs ennemis. Mais les méchants, les gens corrompus, leurs amis les condamnent eux-mêmes.

Admirable disposition de la divine Providence ! La vertu nous charme et le vice nous fait horreur. La vertu, tous l'approuvent, l'admirent, ceux même qui ne la pratiquent pas, et le vice est maudit aussi bien par les mauvais que par les bons. Il est donc bien évident que celles dont je parle, personnes lâches qui trahissent la vertu, sont méprisées non-seulement par leurs. connaissances, mais même par les étrangers et surtout par ceux qui habitent avec elles. Peut-être disent-ils qu'ils vous aiment et vous admirent, qu'ils sont charmés et de vos services et du plaisir que vous leur procurez : n'importe, dans leur coeur, quand parlera la voix de la conscience, ils vous haïront aussitôt qu'ils réfléchiront et qu'ils verront le filet dans lequel ils auront été pris. Le mal est quelque chose de si odieux, que vous serez condamnées surtout par ceux que vous aurez entourés de plus de soins; comme ils vous connaissent mieux que les autres, étant admis dans votre intimité, votre diffamation ne viendra que d'eux. Et la preuve qu'ils vous haïssent, la voici : souvent ils ont souhaité d'être guéris de cette plaie honteuse, délivrés de cette accablante infirmité; mais la force de l'habitude les retient et aussi un certain plaisir qu'ils croient trouver; cet état d'indécision est pénible, on voudrait s'affranchir, on le voudrait; et cependant l'on trouve un certain charme à rester comme l'on est. Si misérable que l'on soit, on n'est cependant jamais assez privé de bon sens , assez partisan de son propre déshonneur pour vouloir passer toute sa vie dans l'ignominie, être la fable du monde, l'objet de la réprobation, de la risée universelle, devenir le point de mire des plaisanteries, des sarcasmes et des injures de la foule, servir de plastron à la populace sur la place publique; être hué et montré au doigt avec ignominie ! quelle amertume dans cette pensée qui tourmente jour et nuit la conscience et qui, comme un, ver attaché à sa proie, ronge sans cesse le coeur !

Si donc ce déshonneur dont on se couvre devant les hommes, bien qu'ils ne disent rien en public et se contentent de désapprouver en secret cause une si grande douleur, que sera-ce, quand nous irons trouver le céleste Epoux outragé par nous , quand les choses cachées seront mises au grand jour et les coeurs dévoilés; quand on connaîtra tout, parole, attitude, regard, pensée (je ne parle pas de choses plus honteuses) ; quand tout sera démasqué; quand la réalité apparaîtra nue et sans voile aux yeux de l'univers entier ! Quels regrets alors ! quels supplices ! quel tourment ! Toute aine qui ne se présentera pas brillante de vertu comme il convient à une âme unie à l'Epoux des vierges, qui ne sera pas pure de toute tache, de toute ride, de toute souillure, sera perdue et subira les plus terribles châtiments. Si une seule tache peut l'exclure du séjour du bonheur, qui pourra la soustraire aux châtiments, l'arracher au supplice quand les souillures seront ajoutées aux souillures, et que de ses nombreuses blessures s'exhalera une odeur infecte? Méprisée ici-bas, passant sa vie au milieu des plus grandes amertumes, au point qu'elle inspire de L'horreur à tous, amis et ennemis, comment pourra-t-elle s'envoler vers les célestes demeures, couverte de la boue de tant d'iniquités?

Voyez si, dans la maison d'un simple particulier, on laisse entrer un pourceau qui vient de se rouler dans la fange; s'il se présentait, on le chasserait, on le repousserait bien loin, on fermerait sur lui la porte avec dégoût. Si donc les hommes ne peuvent souffrir dans l'intérieur de leurs maisons un animal de ce genre, nourri dans la boue, comment une âme souillée pourra-t-elle entrer dans la céleste Jérusalem où brillent tant de clartés, où tout est resplendissant, abîme immense de lumière dans lequel se plongent les vierges dont l'éclat surpasse tout ce que l'on peut imaginer?

Celles qui n'avaient pas d'huile ont vu se fermer devant elles l'appartement de l'Epoux, et vous, vous osez espérer que le ciel vous sera ouvert l Cependant votre crime surpasse de beaucoup le leur. Celles-là avaient négligé de, soulager les pauvres, et vous, vous perdez une foule d'âmes, quelle différence ! Elles n'avaient point maltraité les pauvres, non, elles furent punies pour n'avoir pas soulagé leurs misères en prenant sur leurs biens. Mais vous, vous maltraitez, vous ruinez; non-seulement vous êtes inutiles, mais vous êtes nuisibles, vous êtes des fléaux pour la religion. Si donc celles qui n'ont pas été nuisibles ont été punies si sévèrement, surtout si l'on considère qu'elles ont gardé la virginité, quel ne sera pas le châtiment infligé à celles qui font beaucoup plus que d'être inutiles, qui se nuisent à elles-mêmes, qui nuisent à ceux qui vivent avec elles, et qui nuisent enfin à tous ceux qu'une telle vie scandalise et qui surtout couvrent d'opprobres le nom du céleste Epoux?

Ignorez-vous donc quelle grande affaire vous avez entreprise? Dans quelle lutte vous êtes engagées7quel poste vous devez défendre au milieu du combat? c'est près du général, que dis-je, c'est à côté du roi lui-même que se trouve votre place, c'est là que vous devez combattre l Dans la guerre, chacun n'occupe pas indifféremment n'importe quel poste; les uns sont vers les ailes, les autres au milieu, ceux-ci à l'arrière-garde, ceux-là sur le front de la phalange; d'autres sont pour le roi comme une escorte d'honneur, et vont partout avec lui : telle est la sainte phalange des vierges, je parle de celles qui méritent vraiment ce nom, c'est là leur place , vers le roi des rois, pas ailleurs; et encore la comparaison est faible, et la vue de ces hommes tout brillants d'or, montés sur des coursiers richement caparaçonnés, couverts de cuirasses étincelantes d'or et de pierres précieuses indique moins la présence du roi que les vierges n'indiquent celle du Christ l Les premiers sont seulement autour du char royal, mais les secondes sont le char royal lui-même, comme les chérubins; elles servent d'escorte comme les séraphins.

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