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Works John Chrysostom (344-407) In Matthaeum homiliae I-XC Commentaire sur l'Evangile selon Saint Matthieu
HOMÉLIE XXVII

3.

Jésus-Christ a souvent usé de cette même conduite. Il ne reprochait point ouvertement leurs crimes à ceux qui lui parlaient; mais il leur faisait connaître par ses réponses quel était le fond de leur coeur. C’est ainsi qu’il agit envers cet homme qui l’appelait « bon Maître, » et qui espérait par cette flatterie de se le rendre favorable. Il lui répondit selon la pensée qu’il lui voyait dans le coeur: « Pourquoi, » dit-il, « m’appelez-vous bon, puisqu’il n’y a personne de bon que Dieu seul? » (Matth. XII.)

C’est ainsi qu’il se conduisit encore lorsque le peuple lui dit : « Voilà votre mère et vos frères qui vous cherchent. » (Marc, III.) Comme alors ses parente agissaient humainement, et qu’ils demandaient à approcher de lui, moins pour apprendre quelque chose d’utile, que pour montrer qu’ils étaient ses proches, et tirer gloire de cet avantage, voici ce qu’il leur répondit: «Qui est ma mère, ou qui sont mes frères? » et le reste. Il traite encore ses parents de même, lorsque, pour satisfaire leur vanité, ils le portaient à s’acquérir de la réputation en lui disant : «Faites-vous connaître au monde. Votre temps, leur dit-il, est toujours prêt, mais le mien ne l’est pas encore.» (Jean, VII, 6.)

Il répond aussi à la pensée du coeur, mais pour l’approuver et non pour la reprendre, lorsqu’il dit de Nathanaël : « Voilà un véritable israélite, en qui il n’y a point de tromperie.» (Jean, I, 46.) Lorsqu’il dit aux disciples de saint Jean : « Allez et dites à Jean ce que vous avez entendu et ce que vous avez vu (Luc, VII, 9),» il ne répondait pas tant à ceux qui l’interrogeaient, qu’à la pensée de celui qui lui envoyait faire cette demande.

Jésus-Christ de plus a répondu à la pensée du peuple, lorsqu’il dit aux Juifs : «Qu’êtes-vous allés voir dans le désert?» Comme il voyait que dans leur pensée Jean n’était qu’un homme versatile et inconstant, c’est ce sentiment qu’il réfute et corrige en disant : « Qu’êtes-vous allés voir dans le désert? Un roseau agité du vent? ou un homme vêtu d’étoffes délicates? » montrant par là que l’âme de ce saint avait toujours été ferme et qu’aucune volupté n’avait pu l’amollir.

C’est donc de cette même manière que Jésus-Christ répond en cet endroit, non aux paroles, mais à la pensée de cet homme qui le voulait suivre. Et considérez , avec quelle modestie il lui répond ! Il ne lui dit point : J’ai ; mais : Je méprise; il dit simplement : Je n’ai pas, parole aussi exacte que pleine de condescendance. Et de même, lorsqu’il mangeait et buvait avec les Juifs et qu’il menait une vie qui semblait toute contraire à celle de saint Jean, (227) il n’avait pour but que leur salut, ou plutôt que celui de tous les hommes. Il a voulu fermer ainsi la bouche aux hérétiques qui devaient nier un jour qu’il eût été véritablement homme et gagner par surcroît l’affection de ceux avec qui il vivait, en rendant sa vie semblable à la leur.

« Un autre de ses disciples lui dit: Seigneur, permettez-moi, avant que je vous suive, d’aller ensevelir mon père (21). » Admirez quelle différence il y a entre ces deux hommes. L’un dit hardiment: « Je vous suivrai partout où vous irez. » Et l’autre qui cependant demandait quelque chose de louable en soi, dit modestement : « Permettez-moi. » Mais Jésus-Christ ne permit pas, et voici sa réponse : « Jésus lui dit : Suivez-moi, et laissez aux morts le soin d’ensevelir leurs morts (22).» On voit partout que Jésus-Christ pénétrait le fond des coeurs. Mais, direz-vous, pourquoi refuser cette permission? Parce qu’il y avait d’autres personnes pour ensevelir son père, et qu’il n’était pas raisonnable que cette occupation détournât ce disciple d’une autre beaucoup meilleure. Quand il dit : «Laissez aux morts le soin d’ensevelir leurs morts, » il montre que celui-ci n’était pas de ce nombre; quant à son père, c’était apparemment un infidèle.

Que si vous vous étonnez que ce jeune homme demande permission pour s’acquitter d’un devoir si nécessaire, et qu’il ne prend pas sur lui de s’en aller sans même consulter, je vous réponds que ce qu’il faut surtout admirer, c’est que, la défense faite, il se rend et obéit docilement.

Mais n’est-ce pas une étrange ingratitude, direz-vous, de n’assister pas à la sépulture de son propre père? J’avoue que s’il l’eût fait par indifférence, c’eût été de l’ingratitude, mais s’il ne le faisait que pour ne pas interrompre une affaire plus importante, ç’aurait été au contraire une extrême folie de s’en aller malgré tout pour faire les funérailles mêmes de son père. Jésus-Christ ne fait pas cette défense pour nous apprendre à mépriser nos parents, mais pour nous faire voir que nous n’avons rien de plus important que l’affaire de notre salut; que c’est à cela que nous devons nous attacher de tout notre coeur, sans différer d’un moment à nous y appliquer, quelque pressants que soient les motifs qui s’y opposent; car quoi de plus nécessaire parmi les affaires de ce monde que d’assister aux funérailles de son père? Et tout ensemble quoi de plus facile, et qui exige moins de temps?

Si donc, mes frères, il nous est défendu de perdre aussi peu de temps qu’il en faut peur ensevelir notre père, et s’il n’est pas sûr d’interrompre pour un moment ses exercices spirituels, jugez de quels supplices nous nous rendons dignes en nous éloignant continuellement de ce qui nous pourrait approcher de Jésus-Christ, en nous amusant volontairement à des choses où nous n’avons pas le moindre prétexte de nous appliquer, et en préférant des bagatelles et des folies à notre salut.

Mais ne devons-nous pas admirer ici la conduite et la sagesse de Jésus-Christ, qui d’abord attache ce jeune homme à sa parole, et qui le délivre ainsi d’une Infinité, de maux, comme des pleurs, des cris et de tout ce que des funérailles entraînent après soi de pénible et de douloureux? Car après l’enterrement de son père, il aurait fallu ouvrir le testament, partager la succession, et faire bien d’autres choses qui suivent nécessairement la mort d’un père. Ainsi dans ce flux et reflux d’affaires, ce jeune homme se serait trouvé comme emporté dans la haute mer et bien éloigné du port de son salut. Jésus-Christ donc lui fait une grande grâce en le tirant de tous ces embarras, et le tenant attaché auprès de lui.

Que si vous continuez à croire qu’il y avait de la dureté à ne pas permettre à un fils d’assister aux funérailles de son père, je vous, prie, de considérer que tous les jours, lorsqu’on prévoit que quelqu’un serait trop douloureusement affecté de la mort d’un père ou d’un fils, ou de quelqu’autre de ses proches, on lui cèle sa mort, on laisse passer le temps de l’enterrement, et l’on attend un moment favorable pour lui dire et lui adoucir en même temps cette nouvelle. Cependant on ne croit point qu’il y ait de la dureté dans cette conduite, on croirait au contraire être cruel, de dire tout d’un coup à ces personnes ce qui devrait les accabler de douleur. Que si c’est un mal, de pleurer à l’excès la mort d’un père, et de tomber pour cette cause dans une prostration qui anéantit l’âme, combien sera-ce encore un plus grand mal, si, pour la même cause, nous nous privions de la partie spirituelle qui donne la vie? C’est pourquoi Jésus-Christ dit ailleurs:

« Celui qui met la main à la charrue et qui tourne la tête en arrière, n’est pas propre au royaume de Dieu. » (Luc, IX, 62.) N’est-il pas (228) plus avantageux d’annoncer le royaume de « Dieu, » et de retirer les autres de la mort, que de rendre à un mort un service qui ne peut-lui servir de rien, surtout lorsqu’il y en a d’autres qui peuvent lui rendre ce dernier devoir?

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