2.
Vient ensuite encore une prière : « Que le Dieu d'espérance vous comble de joie et de paix, dans votre foi, afin que votre espérance abonde par la vertu du Saint-Esprit (13) » ; c'est-à-dire, afin que vous soyez affranchis de vos discordes, et que les tentations ne vous abattent jamais; vous en triompherez, si l'espérance abonde en vous. Voilà la cause de tous les biens. Voilà ce qui nous viendra du Saint-Esprit, non sans condition de la part du Saint-Esprit, mais à la condition que nous ferons tout ce qui dépend de nous; voilà pourquoi l'apôtre dit aussi : « Dans votre foi »: voulez-vous être remplis de joie, montrez votre foi, montrez votre espérance. L'apôtre ne dit pas : afin que vous espériez, mais : « Afin que votre espérance abonde » : c'est-à-dire, de manière que vous trouviez, non-seulement la consolation de vos maux, mais la joie que procure l'abondance de la foi et de l'espérance. Car c'est par là que vous attirerez l'Esprit sur vous; c'est par là qu'avec son assistance, vous conserverez tous les biens. De même que la nourriture soutient notre vie, et que c'est la vie qui distribue la nourriture, de même si nous avons les bonnes couvres, nous aurons l'Esprit; et si nous avons l'Esprit, nous aurons les bonnes oeuvres : et de même, l'inverse est également vrai, si nous n'avons pas les couvres, l'Esprit nous échappe aussi. Que nous perdions l'appui de l'Esprit, aussitôt nous clochons dans les oeuvres : une fois en effet que l'Esprit se retire, l'impur arrive. Saül en est un exemple (406) évident. Qu'importe que l'esprit immonde ne nous suffoque pas comme ce roi? Il nous étreint d'une autre manière, par les oeuvres mauvaises. Nous avons donc besoin de la harpe de David pour chanter à notre âme les divins cantiques, et la gloire de Dieu et la gloire des bonnes oeuvres. Car si nous nous bornons à louer Dieu, à entendre des chants, si nos oeuvres les démentent, si nous faisons ce que faisait Saül, le remède se changera pour nous en damnation, et notre folie deviendra plus monstrueuse. Avant que nous ayons entendu les cantiques, le démon maudit tremble, il a peur de nous voir nous corriger; mais, si malgré ce qu'entendent nos oreilles, nous demeurons les mêmes, sa crainte se dissipe alors.
Chantons donc le cantique des oeuvres, afin de chasser loin de nous le péché, plus affreux encore que le démon. Le démon en effet ne nous prive pas nécessairement du royaume des cieux, et même parfois il sert les intérêts de celui qui veille; le péché nous bannit tout à fait du ciel. Car le péché est un démon volontaire, un délire spontané; aussi ne rencontre-t-il ni miséricorde, ni pardon. Chantons donc dans ces dispositions, et tout ce que chante l'Ecriture, et ce que chante le bienheureux David; que la bouche fasse entendre les psaumes et que l'esprit s'instruise. Il n'y a pas là un secours à dédaigner; une fois que nous aurons appris à notre langue à chanter, notre âme rougira, pendant que celle-ci chante, de céder à des pensées contraires. Et ce n'est pas là le seul fruit que nous recueillerons, mais nous recueillerons grand nombre de connaissances qui nous seront utiles. Car David vous entretient et des choses présentes et des choses à venir, et des créatures visibles, et de la création invisible. Voulez-vous savoir si le ciel demeure tel qu'il est., ou subit des changements? sa réponse est claire : « Les cieux vieilliront tous comme un vêtement; vous les roulerez comme un habit dont on se couvre», ô Dieu, « et ils seront changés ». (Ps. CI, 27.) Voulez-vous connaître la forme du ciel : « Etendant le ciel comme une tente ». (Ps. CIII, 2.) Et si vous tenez à en savoir un peu plus sur la voûte extérieure , David vous dira encore : « Vous qui couvrez d'eau sa partie la plus élevée ». (Ps. CIII, 3.) Et le chantre sacré ne s'arrête pas là, mais il vous parle encore et de la largeur et de la hauteur, dont il vous montre l'égalité : « Autant l'orient est éloigné du couchant, autant il a éloigné de nous nos iniquités Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant a-t-il affermi, sa miséricorde sur ceux qui le «craignent ». (Ps. CII, 12, 11.) Si vous voulez scruter les fondements de la terre, il ne vous les tiendra pas cachés, vous l'entendrez chanter et vous dire : « Car c'est lui qui l'a fondée sur les mers ». (Ps. XXIII, 2.) Désirez-vous apprendre la cause des tremblements de terre, il ne vous laissera aucune incertitude : « Lui qui regarde la terre et la fait trembler ». (Ps. CIII, 32.) Vous cherchez à quoi sert la nuit, vous l'allez apprendre de lui : « C'est durant la nuit que toutes les bêtes de la forêt se répondent sur la terre ». (Ps. CIII, 20.) Et les montagnes, à quoi bon? il vous répond « Les hautes montagnes servent de retraite aux cerfs ». Et les rochers? « Et les rochers aux hérissons, et aux lièvres ». Pourquoi les arbres stériles? apprenez-le : « Les petits oiseaux y feront leurs nids ». (Ps. CIII, 18, 17.) Pourquoi les sources dans les déserts? « Sur leurs bords habiteront les oiseaux du ciel, et les bêtes des champs ». (Ibid. XII, 11.) Et pour quel usage; le vin? Non-seulement pour boire, car l'eau suffisait, mais pour y trouver le contentement et la joie : « Le vin réjouit le coeur de l'homme ». (Ibid. 15.) Vous saurez ainsi quelle mesure vous devez garder.
D'où vient, aux oiseaux du ciel, aux bêtes des champs, leur nourriture? Ecoutez la réponse : « Toutes les créatures attendent de vous que vous leur donniez leur nourriture, lorsque le temps en est venu ». (Ibid. 27.) Si vous dites : A quoi bon les bêtes de somme? il vous répond qu'elles sont pour votre usage. « Qui produit le foin pour les bêtes de somme, et l'herbe pour les esclaves de l'homme ? » (Ibid. 14.) Quel besoin avez-vous de la lune? Ecoutez le psalmiste : « Il a fait la lune pour les temps ». (Ibid. 19.) Et que Dieu a tout fait, toutes les choses, soit visibles, soit invisibles, c'est ce qu'il enseigne avec clarté, en disant : « Il a parlé, et toutes choses ont été faites ; il a commandé, et toutes choses ont été créées ». (Ps. XXXII, 9.) Quant à ce que la mort même sera détruite, c'est ce que le psalmiste vous apprend, en disant : « Dieu rachètera et délivrera mon âme de la puissance de l'enfer, lorsqu'il m'aura pris en sa protection ». (Ps. XLVIII, 16.) D'où nous vient notre corps? Le psalmiste le dit aussi . « Il (407) s'est souvenu que nous ne sommes que poussière». (Ps. CII, 14.) Où retourne-t-il? « Il rentrera dans sa poussière ». (Ps. CIII, 29.) En vue de quoi toutes ces choses? Pour vous. « Vous l'avez couronné de gloire et d'honneur, et vous l'avez établi sur les ouvrages de vos mains »: (Ps. VIII, 6.) Avons-nous quelque chose de commun, nous autres hommes, avec les anges? C'est ce que le psalmiste dit encore, de cette manière: « Vous ne l'avez qu'un peu abaissé au-dessous des anges ». (Ibid. 5.) Sur l'amour de Dieu : « De même qu'un père a une tendre compassion pour ses fils, le Seigneur a une tendre compassion pour ceux qui le craignent». (Ps. CII, 13.) Sur la vie qui nous attend après celle-ci, sur le tranquille repos qui sera la fin des choses : « Rentre », dit-il, « ô mon âme, dans ton repos ». (Ps. CXIV, 7.) Pourquoi le ciel est-il si grand ? Le psalmiste répondra aussi : « Les cieux racontent la gloire de Dieu ». (Ps. XVIII, 2.) Dans quel but le jour et la nuit? Ce n'est pas seulement pour que le jour brille et que la nuit nous procure le repos, c'est aussi pour nous instruire : « Il n'y a point de langue, ni de différent langage, au milieu de qui leur voix ne soit entendue ». (Ibid. 4.) Comment la mer entoure-t-elle la terre? « L'abîme l'environne comme un vêtement » (Ps. CIII, 6) ; c'est là ce que dit le texte, hébreu.