7.
De tout ce qui précède ressort encore cette conséquence (car c’est comme en géométrie, où les corollaires succèdent aux corollaires), que de deux frères celui qui ne vaut rien c’est l’aîné. Dans la race humaine s’opère aussi cette sorte d’expurgation, quand Dieu se prépare à produire un être d’une vertu parfaite et sans tache: alors, tout en ayant l’air d’être de la même famille, deux hommes sont en réalité entièrement étrangers l’un à l’autre. Cela ne se voit pas, il est vrai, chez les frères qui naissent dans les conditions ordinaires, c’est-à-dire à moitié bons, à moitié mauvais; mais s’ils sortent de l’ordre commun, si parmi les qualités contraires dont la nature fait en nous le mélange ils ont les unes sans avoir les autres, il serait étonnant qu’ils n’offrissent pas entre eux l’opposition dont je viens de parler. Mais assez là-dessus. Ce récit suggère encore d’autres réflexions. Souvent, dans des contrées et à des époques différentes, les mêmes événements se reproduisent; les vieillards sont témoins de révolutions dont ils entendaient, dans leur enfance, parler à leurs grands-pères, ou qu’ils lisaient dans les livres. Il y a là de quoi nous donner un profond étonnement; mais nous serons moins étonnés si nous recherchons la cause de ce phénomène; pour la rechercher, remontons un peu haut, car la question a son importance et ses difficultés. Considérons le monde comme un tout composé de parties qui se tiennent et s’accordent; nous ne comprendrons pas en effet que l’unité puisse se maintenir si les parties sont en lutte les unes avec les autres : comment formeront-elles un tout si elles ne se relient ensemble par des rapports mutuels? Il y aura donc entre elles des influences tantôt réciproquement subies et exercées, tantôt seulement exercées ou subies par certaines parties. Ces principes une fois posés, si nous en venons à la question qui nous occupe, nous trouverons que tout ce qui se produit sur la terre est dû à ce corps bienheureux qui se meut circulairement.1 Le ciel et notre monde sont des parties de l’univers, et il existe entre eux des relations. Si la génération céleste est la cause de la génération terrestre,2 ce qui se passe ici-bas n’est aussi que la conséquence de ce qui s’accomplit là-haut. A la possession de cette vérité si l’on ajoute cette autre connaissance que nous tenons de l’astronomie, à savoir que les astres et les sphères reviennent à leur point de départ, après avoir effectué leurs révolutions par des mouvements tantôt simples, tantôt composés, on unit à la science des Égyptiens l’intelligence des Grecs, et l’on s’élève ainsi jusqu’à la parfaite sagesse.
Alors on ne se refuse pas à croire, puisque les astres recommencent leur cours, que les mêmes effets reparaissent avec les mêmes causes, et que sur la terre vivent des hommes, identiques à ceux des temps anciens par la naissance, l’éducation, le caractère et la destinée. Nous n’avons donc pas à nous étonner si nous voyons revivre l’histoire dés âges passés. C’est ainsi que nous avons pu saisir des ressemblances frappantes entre les faits qui se sont déroulés naguère, et qui continuent de se dérouler sous nos yeux, et ceux que nous connaissons pour les avoir entendu raconter. Les idées qui se cachent dans le sujet que je viens de traiter offrent des analogies nombreuses avec les mystères des mythes sacrés. Quels sont ces mystères? Il n’est pas permis de les publier; chacun pourra faire ses conjectures. Quelques-uns de ceux dont ce récit aura frappé les oreilles se pencheront sur les livres des Égyptiens, pour essayer de deviner l’avenir, en recherchant ces analogies que nous avons indiquées du passé avec le présent. Mais entre diverses époques la ressemblance n’est pas exacte de tout point. Il faut comprendre d’ailleurs que c’est une entreprise impie de prétendre découvrir ce qui doit rester profondément caché.