18.
L. R. Tu as déjà fait des progrès considérables; cependant les défauts que tu conserves sont un grand obstacle pour voir cette lumière éternelle. Mais je vais employer un moyen qui tue semble facile pour bien m'assurer s'il ne nous reste plus de cupidité à dompter, ou si nous n'avons fait aucun véritable progrès, et si la racine des vices que nous croyons détruits ne subsiste pas encore. Réponds à cette question : Si tu étais persuadé de ne pouvoir vivre dans l'étude de la sagesse avec tes amis les plus chers, sans une fortune considérable pour fournir à tous vos besoins, ne désirerais-tu pas, ne souhaiterais-tu pas les richesses? — A. J'en conviens. — L. R. Et si tu étais persuadé que tu amèneras à la sagesse un grand nombre de personnes, mais à la condition de recevoir des honneurs, une autorité plus considérable; si tu voyais aussi que tes amis ne sont capables de mettre un frein à leur cupidité ni de se convertir entièrement à la recherche de Dieu , qu'autant qu'ils recevraient eux-mêmes des honneurs et qu'ils ne pourraient y parvenir que dans le cas où tu serais élevé en gloire et en dignité : ne devrais-tu pas aspirer et travailler énergiquement à les obtenir? — A. La chose serait ainsi que tu le dis. — L. R. Je ne te parle plus de femme; car il est possible que peut-être il n'y ait jamais une telle nécessité d'en prendre une. Cependant, si elle devait avoir assez de patrimoine pour fournir, et fournir de grand coeur aux besoins de tous ceux que tu désirerais réunir auprès de toi dans un doux loisir; si de plus elle joignait à cette fortune une naissance assez illustre pour te faire obtenir facilement ces honneurs, que tu as reconnu pouvoir être nécessaires, te serait-il permis de dédaigner tous ces avantages? — A. Quand oserais-je former une telle espérance ?