Traduction
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Contre les Académiciens
5.
Je veux, dis-je, que tu m'expliques un peu quelle est, selon toi, la différence entre le sage et le philosophe. La seule, à mon sens, reprit-il, c'est que le sage possède les choses dont le philosophe n'a que le désir. — Quelles sont donc ces choses? ajoutai -je; car pour moi je ne vois que cette différence : c'est que l'un connaît la sagesse, et que l'autre désire la connaître.— Si tu assignes, reprit-il, des limites modestes à cette connaissance, tu exprimes la chose même plus clairement. — De quelque manière, dis-je, que je la définisse, tout le monde est d'avis qu'il ne peut y avoir une connaissance des choses fausses. J'ai cru, reprit-il, que je devais opposer cette réticence, de crainte que , par mon imprudent assentiment, ton discours ne s'élance aisément dans les champs de la principale question. Il est de fait que tu ne me laisses plus d'autre place pour courir. Car, si je ne m'abuse, nous voici arrivés au but que je souhaite depuis si longtemps.
En effet, d'après ce que tu as dit avec tant de pénétration et de vérité, il n'y a aucune différence entre le sage et celui qui veut le devenir, si ce n'est que celui-là aime et que celui-ci a déjà la science, ou, selon son expression, l'habitude de la sagesse. Or, celui qui n'a rien appris ne peut avoir dans l'esprit aucune science; de plus, celui qui ne connaît rien n'a rien appris; et personne rie peut connaître le faux; donc, le sage connaît la vérité, puisque tu as reconnu toi-même qu'il a dans l'âme la science de la sagesse. — Je ne sais, dit-il, si je ne serai point trop hardi en niant que j'aie reconnu dans le sage une habitude de la recherche des choses divines et humaines. Mais je ne vois pas pourquoi tu ne lui reconnaîtrais pas l'habitude des choses probables qu'il aurait trouvées. —Tu m'accordes, lui dis-je, que personne ne connaît le faux? Oh ! certainement, reprit-il. — Dis maintenant, si tu veux, que le sage ne connaît point la sagesse. Pourquoi, reprit-il, enfermes-tu tout dans cette limite, et cherches-tu à lui faire croire qu'il ne comprend pas la sagesse? Donne la main, lui dis-je; car, si tu t'en souviens, voilà ce que j'avais prévu hier, et je me réjouis que sans m'avoir laissé tirer la conséquence, tu l'aies de toi-même tirée de si bon gré. Voici toute la différence que j'avais signalée entre les académiciens et moi : il leur avait paru que la vérité ne se pouvait connaître; à moi, il semblait que si je ne l'avais pas encore trouvée, le sage pouvait la découvrir. Et maintenant, pressé de me répondre à la question de savoir si le sage ne connaît pas la sagesse, tu dis qu'il lui semble la connaître. — Que s'en suit-il? - C'est, dis-je, que s'il lui semble connaître la sagesse, il ne lui semble donc pas que le sage ne peut rien connaître; ou bien il faut que tu soutiennes que la sagesse n'est rien.
Edition
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Contra Academicos (PL)
5.
Volo, inquam, mihi paululum aperias, quid tibi inter sapientem et philosophum distare videatur? Sapientem a studioso, ait, nulla re differre arbitror; nisi quod quarum rerum in sapiente quidam habitus inest, earum est in studioso sola flagrantia. Quae sunt tandem istae res, inquam? Nam mihi nihil aliud videtur interesse, nisi quod alter scit sapientiam, alter scire desiderat. Si scientiam, inquit, modesto fine determinas, ipsam rem planius clocutus es. Quoquo modo, inquam, eam determinem, illud omnibus placuit, scientiam falsarum rerum esse non posse. In hoc mihi, inquit ille, visa fuit objicienda praescriptio, ne inconsiderata consensione mea facile in principalis illius quaestionis campis tua equitaret oratio. Plane, inquam, mihi nihil ubi equitare possem reliquisti. Nam nisi fallor, quod jamdudum molior, ad ipsum finem pervenimus. Si enim, ut subtiliter vereque dixisti, nihil inter sapientiae studiosum et sapientem interest, nisi quod iste amat, ille autem habet sapientiae disciplinam; unde etiam nomen ipsum, id est, habitum quemdam exprimere non cunctatus es; nemo autem habere disciplinam potest in animo, qui nihil didicit; nihil autem didicit, qui nihil novit; et nosse falsum nemo potest: novit igitur sapiens veritatem, quem disciplinam sapientiae habere in animo, id est habitum jam ipse confessus es. Nescio, inquit, cujus impudentiae sim, si habitum inquisitionis divinarum humanarumque rerum esse in sapiente confessum me negare voluero. Sed qui tibi videatur inventorum probabilium habitus non esse, non video. Concedis mihi, inquam, falsa neminem scire? Facile id quidem, inquit. Dic jam si potes, inquam, sapientem nescire sapientiam. Quid enim, ait, hoc limite universa concludis, ut videri sibi non possit, comprehendisse se sapientiam? Da, inquam, dexteram. Nam si meministi, hoc est quod heri me dixi effecturum, quod nunc non a me conclusum, sed a te ultro mihi oblatum esse gaudeo. Nam cum inter me et Academicos hoc interesse dixissem, quod illis probabile visum est veritatem non posse comprehendi; mihi autem nondum quidem a me inventam, inveniri tamen posse a sapiente videatur: nunc tu cum mea interrogatione urgereris, utrum sapiens nesciat sapientiam, Videtur sibi scire, dixisti. Quid tum postea, inquit? Quia si videtur sibi, inquam, scire sapientiam, non ei videtur nihil scire posse sapientem. Aut si sapientia nihil est, volo affirmes.