Edition
ausblenden
De beata vita (PL)
4.
Quae cum ita sint, accipe, mi Theodore, namque ad id quod desidero, te unum intueor, teque aptissimum semper admiror; accipe, inquam, et quod illorum trium genus hominum me tibi dederit, et quo loco mihi esse videar, et abs te cujusmodi auxilium certus exspectem. Ego ab usque undevigesimo anno aetatis meae, postquam in schola rhetoris librum illum Ciceronis, qui Hortensius vocatur, accepi, tanto amore philosophiae succensus sum, ut statim ad eam me transferre meditarer. Sed neque mihi nebulae defuerunt, quibus confunderetur cursus meus; et diu, fateor, quibus in errorem ducebar, labentia in oceanum astra suspexi. Nam et superstitio quaedam puerilis me ab ipsa inquisitione terrebat: et ubi factus erectior, illam caliginem dispuli, mihique persuasi docentibus potius quam jubentibus esse credendum; incidi in homines quibus lux ista quae oculis cernitur, inter summa et divina colenda videretur. Non assentiebar, sed putabam eos magnum aliquid tegere illis involucris, quod essent aliquando aperturi. At ubi discussos eos evasi, maxime trajecto isto mari, diu gubernacula mea repugnantia omnibus ventis in mediis fluctibus Academici tenuerunt. Deinde veni in has terras; hic septentrionem cui me crederem didici. Animadverti enim et saepe in sacerdotis nostri, et aliquando in sermonibus tuis, cum de Deo cogitaretur, nihil omnino corporis esse cogitandum, neque cum de anima: nam id est unum in rebus proximum Deo. Sed ne in philosophiae gremium celeriter advolarem, fateor, uxoris honorisque illecebra detinebar; ut cum haec essem consecutus, tum demum me, quod paucis felicissimis licuit, totis velis omnibusque remis in illum sinum raperem, ibique conquiescerem. Lectis autem Platonis paucissimis libris, cujus te esse studiosissimum accepi, collataque cum eis, quantum potui, etiam illorum auctoritate qui divina mysteria tradiderunt, sic exarsi, ut omnes illas vellem anchoras rumpere, nisi me nonnullorum hominum existimatio commoveret 1. Quid ergo restabat aliud, nisi ut immoranti mihi superfluis, tempestas quae putabatur adversa, succurreret? Itaque tantus me arripuit pectoris dolor, ut illius professionis onus sustinere non valens, qua mihi velificabam fortasse ad Sirenas, abjicerem omnia, et optatae tranquillitati vel quassatam navem fissamque perducerem.
Conf. lib. 7, capp. 9, 20 ↩
Übersetzung
ausblenden
De la vie bienheureuse
4.
Cela étant, apprends, mon cher Théodore (car, pour obtenir ce que je désire, c'est sur toi seul que j'ai les yeux fixés, c'est toi que je considère toujours comme l'homme le plus propre à mes desseins), apprends, te dis-je, quelle est celle de ces trois classes de navigateurs à laquelle j'appartenais avant de m'attacher à toi, quelle est la situation dans laquelle je me trouve, et quel genre de secours j'attends de toi avec confiance. Dès l'âge de dix-neuf ans, depuis qu'à l'école d'un rhéteur j'ai étudié l'ouvrage de Cicéron, intitulé Hortensius je me suis senti enflammé d'un tel amour pour la philosophie que j'ai songé aussitôt à m'y livrer tout entier. Mais j'ai trouvé des brouillards qui ont égaré mes pas, et longtemps, je l'avoue, mes regards ont consulté des astres sur leur déclin, qui m'ont induit en erreur. Une superstition puérile me détournait de la recherche de la vérité, et lorsque. prenant le dessus , j'eus dissipé ces ténèbres., lorsque je me f?s persuadé que je devais m'en rapporter à la science plutôt qu'à l’autorité, je rencontrai des hommes qui regardaient comme une puissance supérieure, et comme une divinité digne de leur culte, cette lumière que l'on aperçoit avec les yeux du corps1; je ne leur accordais pas mon assentiment, mais je pensais qu'ils cachaient quelque grande vérité sous des voiles qu'ils devaient un jour écarter. Quand je me fus débarrassé d'eux, quand je leur eus échappé, quand j'eus enfin cessé de voguer avec eux, mon gouvernail lutta longtemps, contre tous les vents, au milieu des flots; les académiciens étalent mes pilotes. Je vins ensuite dans ces parages ; c'est là que j'appris à connaître l'étoile polaire qui devait me guider. Je me suis dit souvent en écoutant les entretiens de notre saint Pontife2, et quelquefois en écoutant les tiens, que l'idée de Dieu exclut toute pensée matérielle, et qu'il en est de même de l'idée de l'âme; car l'âme est sans contredit ce qui se rapproche le plus de Dieu. Mais ce qui m'empêchait, je l'avoue, de m'envoler bien vite dans le sein de la philosophie, c'était l'attrait du mariage et des honneurs. Ce double but une fois atteint, je me proposais ce qui n'a été donné qu'à un petit nombre de privilégiés, de m'élancer à pleines voiles et en taisant force de rames, vers cet asile du bonheur et d'y goûter le repos. Mais après avoir lu quelques ouvrages de ce Platon, pour lequel je connais ton amour, après leur avoir comparé autant que possible , ces ouvrages tout pleins d'autorité qui nous ont transmis les divins mystères, je fus transporté d'ardeur. Je voulais briser toutes les ancres qui retenaient mon navire; mais la considération que j'ai pour l'opinion de certains hommes3 touchait encore mon âme. Quelle ressource me restait-il donc, quand je m'arrêtais à ces vanités? II me fallait le secours de quelqu'une de ces tempêtes qui passent pour des malheurs. J'éprouvai alors un tel déchirement de coeur, qu'incapable de soutenir le fardeau d'une profession qui poussait peut-être mes voiles vers les Sirènes, je renonçais à tout pour conduire vers le port, tranquille objet de tous mes voeux, mon navire battu par la tempête et fort endommagé.