20.
Le M. Nous venons de déterminer le commencement du mètre: tâchons de voir où il finit. Le moindre mètre est de deux pieds, soit qu'ils aient un son plein, soit qu'il faille un silence pour les compléter. Reviens donc à la progression qui s'arrête au nombre 4, et, en vertu de ce principe, explique-moi quel est le nombre de pieds que le mètre ne peut dépasser. — L’E. Le calcul est facile : le raisonne ment suffit pour fixer cette limite à huit pieds. —- Le M. Te souviens-tu donc que, d'après les habiles, nous avons défini le vers un mètre composé de deux membres, dont la mesure est régulière? — L’E. Je m'en souviens. — Le M. Puisque le vers se compose de deux membres et non de deux pieds, et qu'il renferme non pas un seul pied, mais plusieurs, n'est-il pas évident que chaque membre doit avoir plus d'un pied? — L’E. Sans doute. — Le M. Mais si les deux membres sont égaux, ne seront-ils pas susceptibles d'être mis à la place l'un de l'autre, puisqu'ils n'offriront aucun trait distinctif? — L’E. C'est juste. — Le M. Pour obvier à cette confusion et pour marquer distinctement, dans le vers, l'endroit où commence le premier membre et où finit le second, nous sommes réduits à admettre que ces deux membres doivent être inégaux. — L’E. Rien de plus logique. — Le M. Vérifions ce principe en commençant, si tu veux bien, par le pyrrhique : dans un vers de ce genre, tu ne saurais trouver un membre composé de moins de trois temps, car cette combinaison est la première qui dépasse le pied. — L’E. Je suis de ton avis. — Le M. Combien de temps aura donc le moindre vers? — L’E. J'aurais répondu six infailliblement, si je n'avais été prévenu que deux membres égaux se confondaient ensemble. Le moindre vers doit donc avoir sept temps : car il ne peut avoir de membre qui renferme moins de trois temps. Qu'un membre en renferme davantage; je le veux bien; tu n'as pas encore établi de règle sur ce point. — Le M. Ta réponse fait honneur à ton esprit. Mais dis-moi combien il y a de pieds pyrrhiques compris dans une durée de sept temps? — L’E. Trois et demi. — Le M. Il faut donc avant de revenir au commencement, observer un silence d'un temps pour compléter le pied? — L’E. Ce silence est nécessaire. — Le M. Ce silence compté, combien aurons-nous de temps? — L’E. Huit. — Le M. Donc, si le moindre pied, qui est en même temps le premier, ne peut avoir moins de deux temps, le vers à la fois le plus petit et le premier de tous ne peut avoir moins de huit temps. — L’E. C'est vrai. — Le M. Et le plus grand vers, à quelle limite doit-il s'arrêter? Combien de temps doit-il renfermer? Ta réponse n'est-elle pas dictée, pour peu que tu songes à cette progression à laquelle nous revenons sans cesse? — L’E . Oui, je conçois qu'aucun vers ne puisse aller au delà de trente-deux temps1.
8 temps X 4 = 32 : toujours d'après le nombre quatre, limite des nombres. ↩
